La première fois que le peuple juif est désigné comme « les enfants de D.ieu » se trouve dans la section Chemot de la Torah, où le verset énonce : « Israël est Mon fils, Mon premier-né ».1 Le terme « premier-né », comme l’explique Rachi,2 dénote la maturité.
Néanmoins, dans de nombreux autres passages, nous constatons que les Juifs sont considérés comme les enfants de D.ieu en vertu de leur extrême jeunesse. Ainsi, nous trouvons le verset3 : « Car Israël n’est qu’un jeune garçon et [par conséquent] Je l’aime ». Cette idée est développée par nos Sages, qui relatent la parabole d’un roi qui avait de nombreux enfants, mais chérissait le plus jeune par-dessus tout.4
Si l’amour se manifeste plus intensément envers les plus jeunes, pourquoi le verset dans Chemot présente-t-il les Juifs comme des enfants plus âgés ?
Quelle est, précisément, la raison pour laquelle l’amour parental se manifeste avec plus d’intensité envers les plus jeunes enfants ?
Parvenu à sa maturité intellectuelle et émotionnelle, l’enfant plus âgé n’est plus aimé de ses parents pour le seul fait d’être leur enfant. Leur amour peut aussi naître de sa sagesse ou de la noblesse de son caractère. Un tel amour est fondé sur la logique.
En revanche, l’amour porté à un très jeune enfant est de nature élémentaire – transcendant l’entendement – car celui-ci ne possède encore aucune qualité particulière susceptible de susciter l’amour ; ce sentiment qui émane des parents prend sa source uniquement dans l’unité essentielle entre eux et leur enfant.
Même s’il demeure essentiel par nature, l’amour envers l’enfant qui a grandi se mêle à des sentiments fondés sur la raison. Cette dimension rationnelle voile alors la relation élémentaire entre parent et enfant.
Ce qui est vrai de l’amour parental s’applique également à l’amour de D.ieu pour Ses enfants, le peuple juif, selon deux modalités distinctes :
Lorsque les Juifs, par leur service divin, révèlent leurs qualités exceptionnelles, l’amour de D.ieu s’enrichit d’une dimension rationnelle, comparable en cela à l’amour des parents pour leur enfant plus âgé.
Mais il existe aussi l’amour élémentaire que D.ieu porte au peuple juif, fondé sur le fait que chaque Juif est « véritablement une partie de D.ieu d’en haut ».5 À l’image de l’amour pour un très jeune enfant, cet amour transcende toute considération de mérite lié au service divin.
Cet amour élémentaire se révèle lorsque les Juifs servent D.ieu à la manière d’un petit enfant : humbles et petits face à D.ieu, ils Lui obéissent avec une loyauté innée, même sans comprendre Ses raisons.
Néanmoins, le service divin intellectuel et émotionnel n’exclut pas la révélation de cet amour intrinsèque, car les facultés intellectuelles et spirituelles du Juif sont indissociables de son effacement de soi.
Un Juif comprend la nécessité d’un effort intellectuel pour comprendre la Torah, et que ses émotions doivent être imprégnées du plaisir d’étudier la Torah et d’accomplir les mitsvot. Cette prise de conscience procède directement du fait qu’un tel plaisir est le désir de D.ieu.6
La raison pour laquelle le verset déclare « Israël est Mon fils, Mon premier-né » s’éclaire alors :
Lorsqu’il s’agit d’exprimer l’amour essentiel de D.ieu pour le peuple juif en lui-même, la métaphore utilisée est celle d’un très jeune enfant, car en pareil cas, l’amour élémentaire est ressenti naturellement.
Cependant, lorsqu’on cherche à exprimer les qualités fondamentales du peuple juif, le terme « Israël est Mon fils, Mon premier-né » est utilisé, car il indique que la nature fondamentalement « enfantine » des Juifs imprègne même leur dimension intellectuelle et émotionnelle.
D’après Likoutei Si’hot vol. XXI, p. 20-26.
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