Mon fils luttait pour sa vie et un médecin insensible a rendu les choses encore pires.

Nous ne ressentons que de la gratitude pour tous les médecins et infirmières héroïques qui ont soutenu notre fils, Ye’hezkel No’houm (puisse-t-il reposer en paix), tout au long de son séjour à l’hôpital. Ils furent tous et toutes uniformément professionnels et attentionnés. Ils étaient respectueux de la souffrance que notre famille traversait et ont démontré par leurs actions et leurs paroles qu’ils feraient tout pour le soutenir tout au long de sa courte vie.

À une exception près.

Ye’hezkel avait moins d’une semaine et venait de subir une nouvelle « désaturation ». Sans prévenir, son taux d’oxygène s’effondra et son rythme cardiaque ralentit. Les alarmes ont retenti dans tout le service et les médecins et les infirmières ont afflué dans sa chambre pour le réanimer. Leah et moi sommes restées là, terrifiées et impuissants, regardant et priant, sans savoir si chaque seconde serait sa dernière.

Par la grâce de D.ieu, ils réussirent à stabiliser Ye’hezkel, et il se remit à respirer par lui-même. Le personnel est sorti de la pièce, tandis que nous balbutiions des mots de remerciement inadéquats. Tout le monde était parti, à l’exception d’un médecin que nous n’avions jamais vu auparavant, qui nous a impérieusement demandé de la suivre dans une petite pièce annexe au service.

Elle a insisté pour que nous signions immédiatement une ordonnance de non-réanimation qui, en cas de récidive, donnerait l’ordre au personnel hospitalier de le laisser mourir. Elle était dogmatique et dominatrice. Lorsqu’elle vit que nous n’étions pas d’accord sur-le-champ, elle devint encore plus affirmative et nous accusa de faire souffrir notre fils bien-aimé.

Je suis un rabbin. J’ai longuement étudié le sujet de savoir quand le judaïsme exige que l’on prenne des mesures héroïques pour préserver la vie, donnée par le D.ieu Tout-Puissant, et quelles interventions médicales sont considérées comme essentielles. Nous étions en consultation constante avec un expert de renommée mondiale en matière d’éthique médicale et de halakha. J’avais déjà accompagné des fidèles dans ce terrible parcours et j’étais conscient des difficultés et de la complexité d’une décision aussi déchirante. En collaboration avec les médecins de Ye’hezkel, nous avions convenu un jour plus tôt d’un plan de soins personnel qui nous permettait de respecter la halakha, tout en faisant de notre mieux pour éviter des souffrances inutiles. Mais ce médecin avait visiblement décidé qu’elle savait mieux que nous. Même moi, j’ai commencé à hésiter face à son insistance à suivre ses instructions et à signer le papier immédiatement.

Je n’oublierai jamais l’arrogance avec laquelle elle nous a regardés puis a déclaré : « Nous avons déjà reçu beaucoup de religieux comme vous, mais ils finissent toujours par faire ce qu’il faut. »

D.ieu merci, elle nous a finalement permis de retourner au chevet de notre fils et nous avons pris le temps d’appeler le néonatologiste de notre fils. Il fut consterné par notre récit de la conversation et nous a encouragés de tout cœur à respecter les principes de notre foi.

Notre fils est décédé à la maison, dans nos bras, quelques jours plus tard. Au moins, nous avons pu nous consoler en sachant que nous avions fait tout ce qui était possible pour lui pendant son court séjour sur cette terre, en le protégeant et en le nourrissant, tant physiquement que spirituellement.

Un meurtre légalisé par l’État

L’épisode désagréable de ce médecin condescendant m’est revenu à l’esprit en lisant les terribles nouvelles concernant le meurtre de la petite Alta Fixler (puisse-t-elle reposer en paix), âgée de deux ans, le lundi 18 octobre 2021, à Manchester au Royaume-Uni. Je pleure avec les parents d’Alta et je prie pour qu’ils trouvent du réconfort.

Alors que nous n’avons rencontré qu’un seul médecin désagréable et que la décision concernant l’intérêt supérieur de notre fils nous a été laissée, dans le cas d’Alta, l’ensemble du corps médical et juridique britannique s’est ligué pour l’assassiner. Les juges n’ont eu aucun scrupule à prendre des décisions pour Alta, contre la volonté expresse de ses parents et au mépris des préceptes de la religion d’Alta.

N’y avait-il pas de place pour D.ieu ? L’espoir et la foi, outils essentiels sur le chemin de la guérison pour les médecins et les patients, ont-ils été supprimés par la loi ?

Il ne s’agissait pas de faire des économies pour le service de santé britannique, puisqu’Israël et les États-Unis avaient accepté de l’accueillir et que les membres de la communauté d’Alta étaient prêts à financer entièrement son transfert et son traitement. Il s’agissait purement d’un cas où l’État affirmait son contrôle sur un individu, abrogeant les droits parentaux et décidant que les idéaux laïques et la moralité atavique de certains médecins et juges l’emportaient sur la perspective confessionnelle des parents d’Alta.

Alta était vivante et a respiré toute seule pendant 90 minutes après le retrait de son tube respiratoire. Selon la loi juive, chacun a droit à l’hydratation, à la nutrition et à la respiration et le retrait de ce tube respiratoire équivalait à un meurtre. Je peux accepter que d’autres aient des points de vue différents, mais comment la société contemporaine ne pourrait-elle pas respecter réciproquement un autre point de vue sur ce qui constituait l’intérêt supérieur d’Alta ?

Il est choquant de constater que dans un monde qui prône les droits individuels et l’inclusion, les seules perspectives qui ne semblent pas compter sont les valeurs intemporelles de la foi et de la confiance en D.ieu. Sur quoi le juge s’est-il fondé pour prendre sa décision, si ce n’est sur un vague sentiment personnel de ce qu’Alta pourrait préférer ? Pourquoi les traditions millénaires du judaïsme et ses principes fondamentaux du caractère sacré de la vie ne bénéficient-ils pas d’un respect au moins égal à celui de la moralité personnelle du juge ? Quand les valeurs de la société se sont-elles transformées en une situation où l’État s’accorde le seul droit sur la vie et la mort, face à tout contre-argument ?

Nous lisons dans la Torah l’histoire tragique de la destruction de Sodome et Gomorrhe (Genèse 19). La Torah justifie la colère de D.ieu en expliquant que les habitants de Sodome étaient de « méchants pécheurs » (13,13). L’une des descriptions traditionnelles des iniquités des habitants de Sodome est que leur système judiciaire était totalement arbitraire, sans autre valeur morale que l’intérêt personnel à court terme de ses juges. Ils abrogeaient les droits de propriété et décrétaient à l’envie quelles vies humaines devaient être supprimées, sans avoir à se justifier. Il n’y avait pas de règles, pas de statuts et pas de pouvoir supérieur, autres que la moralité floue des mœurs contemporaines. L’État s’attribuait la prérogative de la vie et de la mort, et le droit absolu de décision pour les individus.

Cela ne vous semble-t-il pas familier ? N’est-ce pas un signe précurseur de la direction dans laquelle la société dégénère ? Nous avons maintenant l’euthanasie sur demande. Combien de temps avant que nous ne déclinions encore plus et que la société n’impose le meurtre des personnes handicapées au nom d’une soi-disant « compassion » ?

Le judaïsme n’a pas à avoir honte de quoi que ce soit et n’a pas à rougir face à cette nouvelle moralité. Nous sommes issus d’une tradition qui valorise la vie et voit la valeur de chaque vie. Nous affirmons fièrement nos croyances et nous nous engageons à faire briller la lumière de la Divinité dans les coins sombres d’une société en décomposition.

Nous aimons les gens et nous croyons en D.ieu. Nous sommes guidés par une Puissance Supérieure et vivons des vies passionnées et déterminées. Même si la société nous juge de façon désobligeante, nous ne nous inclinerons pas et ne serons pas brisés, et nous attendons avec impatience le moment où tous ceux qui nous ont été enlevés seront restaurés et rachetés par notre juste Messie.

Dédié à la mémoire d’Alta bat Avraham.