Avec la parachat Vaye’hi, nous terminons cette semaine la lecture du Séfer Béréchit, le Livre de la Genèse. Toutefois, les derniers mots de celle-ci semblent déroger au principe talmudique selon lequel il convient de terminer sur une note positive. En effet, le dernier verset nous dit : « Joseph mourut âgé de cent dix ans ; on l’embauma, et il fut déposé dans un cercueil en Égypte. » Alors que son père Jacob avait été enterré en Terre d’Israël, Joseph, celui qui avait assuré la survie de sa famille en Égypte, celui qui avait su pardonner à ses frères et à voir le bien dans le mal qu’ils lui avaient fait, se voit enterré en Égypte, le pays de toutes les impuretés, de l’idolâtrie au matérialisme. Quelle peut bien être la « note positive » d’une telle situation ?
Cette question se pose d’ailleurs pour un très grand nombre de nos tsadikim dont la vie n’eut pas l’issue heureuse, la « note positive », de mériter d’être enterrés en Terre Sainte. Contrairement à Joseph, d’ailleurs, dont la dépouille fut emmenée par le peuple qui sortit d’Égypte et qui fut finalement inhumé à Che’hem, beaucoup demeurent à ce jour en dehors de la Terre d’Israël, au premier rang desquels Moïse lui-même. Mordekhaï et Esther, les Sages du Talmud de Babylone, les exégètes français et espagnols du Moyen-Âge, les décisionnaires allemands et les commentateurs italiens de la Renaissance, les Rabbis ‘hassidiques polonais, russes et hongrois, les kabbalistes du Maghreb et tant d’autres, sont pour la plupart enterrés en terre d’exil.
Cependant si l’on considère le fait que ces personnages se définissaient avant tout comme des bergers du peuple juif, la question se dissipe d’elle-même.
L’un de nos grands sages, Rabbi Mordekhaï Hacohen de Safed (1523–1598), enseigne dans son commentaire Siftei Cohen que lorsque Jacob fit prêter serment à Joseph de l’enterrer avec ses pères à Hébron, il lui dit que lui, Joseph, devrait demeurer avec son peuple en Égypte même après sa mort, de manière à les protéger et à invoquer sur eux la grâce et la bonté de D.ieu durant leur exil et à les guider dans leur traversée du désert.
Tel fut le rôle de tous les tsadikim qui, par leur présence à nos côtés tant de leur vivant qu’après leur décès nous ont donné la force de surmonter toutes les vicissitudes de l’exil et de demeurer le peuple de D.ieu de manière indéfectible.
C’est ainsi qu’immédiatement après la lecture des mots « il fut placé dans un cercueil en Égypte », toute l’assemblée s’écrie ‘Hazak ‘hazak venit’hazek ! – « Nous sommes forts, nous sommes forts, et nous nous renforcerons encore ! » : avec les tsadikim à nos côtés, nous vaincrons l’exil.1
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