Adapté de
Likoutei Si’hot, Vol. VIII, p. 114 ;
Vol. XVIII, p. 187 ;
Sefer HaSi’hot 5748, p. 499 ;
Sefer HaSi’hot 5750, p. 526
Ce que Kora’h voulait vraiment
Le nom de la lecture de la Torah de cette semaine, Kora’h, suscite une question évidente : il est écrit1 : « Le nom du méchant pourrira », et sur la base de ce verset, nos Sages statuent2 qu’il ne convient pas de nommer une personne du nom d’un homme méchant. Pourquoi, dans ce cas, une lecture entière de la Torah est-elle nommée « Kora’h » ? Car avec ce titre, l’identité de Kora’h est perpétuée à jamais, car la Torah est éternelle.
Parmi les explications données se trouve le fait que le désir de Kora’h était en soi positif. Kora’h voulait être Grand Prêtre et connaître la proximité absolue avec D.ieu qui résulte de l’entrée dans le Saint des Saints. D’ailleurs, lorsque Moïse répondit à Kora’h, il ne lui dit pas que cet objectif était indigne. Au contraire, comme le rapporte Rachi,3 Moïse dit qu’il partageait ce même désir. Lui aussi aurait voulu être Grand Prêtre.
De plus, au mont Sinaï, D.ieu dit au peuple juif qu’il était « un royaume de prêtres »,4 et nos rabbins interprètent5 cela comme faisant référence au niveau atteint par un Grand Prêtre. Chaque Juif a ce potentiel en lui.6
La plainte de Kora’h était ainsi fondée sur une vérité essentielle7 : « Toute la congrégation est sainte ; D.ieu est au milieu d’eux. » Chaque membre du peuple juif a une étincelle de sainteté. Kora’h et ses disciples voulaient que cette étincelle s’épanouisse. Ils étaient prêts à tout risquer, même leur vie, pour une expérience spirituelle aussi élevée. C’est pourquoi même après que Moïse leur ait dit qu’apporter l’offrande d’encens signifierait leur mort, ils n’ont pas hésité à le faire.8
Nommer la lecture de la Torah « Kora’h » met en évidence le potentiel de croissance spirituelle que chacun de nous possède, et le désir que nous devons manifester que ce potentiel se manifeste.
Intention ou action
Cette explication est cependant insuffisante, car les bonnes intentions ne suffisent pas. Ce sont principalement nos actions que D.ieu juge, et non notre intention. Quelles qu’aient été les intentions de Kora’h, il initia une controverse qui entraîna la mort de milliers de personnes. Il ne semble pas approprié d’immortaliser ce message dans le nom d’une de nos lectures de la Torah.9
De plus, le nom même de Kora’h est associé à la division. La racine hébraïque קרח signifie « division » ou « scission », et nos Sages10 associent Kora’h, non seulement eut égard à ses actions, mais aussi spirituellement, à ces tendances. La division est en opposition directe avec le but de la Torah, qui « a été donnée uniquement pour apporter la paix dans le monde ».11 Pourquoi un nom synonyme de division sert-il comme le nom d’une des lectures hebdomadaires de la Torah ?
Une unité plus complète
La résolution de cette question dépend de la définition de l’unité. L’unité absolue et élémentaire est impossible dans notre monde matériel. Comme le commente Rachi12 : « Le Saint, béni soit-Il, a défini des limites dans Son monde. Peut-on transformer le matin en soir ? » Chaque entité a sa propre nature distincte.
Le concept de division ne doit cependant pas aller à l’encontre de nos efforts vers l’unité. Au contraire, l’unité est plus complète lorsqu’elle englobe des entités divergentes, chacune ayant une nature propre.
Telle est l’intention de la paix que la Torah a été donnée pour établir. Non pas que les différences n’existent pas, mais qu’elles se rejoignent en une harmonie synergique. Il y a ainsi une place pour Kora’h dans la Torah, car la Torah enseigne que la division peut servir un objectif positif, et que la diversité ne doit pas conduire à des conflits.
Prendre nos propres décisions
Néanmoins, D.ieu désire que l’homme réalise cette unité multiforme de sa propre initiative. Il donne à l’homme le pouvoir et la responsabilité d’accomplir ce but, et le libre choix de déterminer la direction de ses efforts. Cela se reflète également dans la conduite de Kora’h. Il vit qu’après les péchés du veau d’or et des espions, Moïse avait prié D.ieu et avait évité les décrets célestes. De même, Kora’h estima que bien que D.ieu ait accordé à Moïse et à Aharon leurs fonctions respectives, il pourrait être possible grâce à une prière sincère d’effectuer un changement et de réaliser ses propres ambitions spirituelles.
Il fit tout simplement le mauvais choix. Plutôt que de renforcer l’unité en renforçant le lien du peuple avec Moïse et Aharon, il prit une voie différente. Au lieu de voir l’harmonie potentielle des différences, il les fit s’affronter.
Kora’h ne prit jamais conscience de son erreur. Ses enfants ont cependant proclamé13 : « Moïse est vrai, et sa Torah est vraie. » Ils ont réalisé que la vérité que Moïse a enseignée est le moyen de réaliser l’unité parmi notre peuple et de permettre à chaque individu de réaliser son potentiel.
Une question de temps
D’un point de vue mystique,14 il est expliqué que les désirs de Kora’h reflétaient les sommets spirituels à atteindre à l’ère de la Rédemption. En ce temps-là, les Lévites (la tribu de Kora’h) seront élevés au rang de prêtres,15 et le peuple juif tout entier atteindra des sommets d’expérience spirituelle, car « Je répandrai mon esprit sur toute chair. »16
Les récompenses de cette ère ne peuvent cependant pas être atteintes prématurément, mais seulement en conséquence de notre service divin. C’est seulement à travers notre dévouement désintéressé à la Torah de Moïse et aux directives de « l’extension de Moïse en chaque génération »,17 les maîtres de la Torah de notre peuple, que nous pouvons nous élever et élever le monde au point que « le monde sera rempli de la connaissance de D.ieu. »18
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