La lecture de la Torah de Eikev contient la deuxième partie du Chéma,1 qui présente de nombreuses similitudes avec la première partie qui se trouve dans la lecture précédente de Vaet’hanane.2

Néanmoins, des différences existent entre les deux parties. La première nous commande d’aimer D.ieu « de tout ton cœur, de toute ton âme et de toutes tes forces », tandis que la seconde nous exhorte seulement à l’aimer « de tout votre cœur et de toute votre âme », en omettant « de toutes vos forces. »

De plus, dans Vaet’hanane, le commandement d’étudier la Torah (« Vous l’enseignerez à vos enfants… ») précède le commandement de porter des téfiline – auquel l’ensemble des commandements est assimilé3 –, tandis que dans Eikev, la mitsva des téfiline précède le commandement d’étudier la Torah.

Encore une différence : la première partie ne mentionne aucune récompense pour l’accomplissement des mitsvot, tandis que la seconde le fait.

Nous devons comprendre la raison de ces différences.

De fait, elles découlent toutes de quelque chose présent en allusion dans les noms des deux lectures de la Torah dans lesquelles ces deux parties du Chéma apparaissent :

Le contenu général de Vaet’hanane relève de la matanat ‘hinam – un « cadeau gratuit » d’En haut.

La lecture de Eikev – qui signifie littéralement « talon », la partie la plus basse (c’est-à-dire la moins vivante) du corps humain – traite d’une situation dans laquelle aucune révélation divine n’émane d’En haut. Néanmoins, même dans cette situation, les Juifs accomplissent la Torah et les mitsvot.

Cela explique également pourquoi la demande de Moïse dans Vaet’hanane était qu’il lui soit permis d’entrer dans le Terre d’Israël de sorte à la voir, alors le début de Eikev évoque l’audition (« Parce que vous avez entendu »). Car la vision spirituelle4 résulte d’une intense révélation d’En haut, que n’implique pas l’audition spirituelle.

L’audition, cependant, possède une qualité qui manque à la vue : le son pénètre à l’intérieur d’une personne et devient partie d’elle, tandis que ce qu’une personne voit demeure extérieur à elle ; elle le voit « de loin », pour ainsi dire.5

Tout comme il en est ainsi s’agissant de la vision et de l’audition physiques, il en est de même pour la « vision » dans la lecture de Vaet’hanane et « l’audition » dans Eikev : bien que « l’audition » spirituelle soit inférieure à la « vision » demandée par Moïse, dans la mesure où elle est accomplie à travers le service de D.ieu de l’homme (contrairement à la vision qui vient comme un don gratuit d’En haut), elle peut imprégner une personne d’une manière plus profonde.

Ceci permet de comprendre les différences entre les deux parties du Chéma : lorsqu’il y a une révélation d’En haut, comme dans la lecture de Vaet’hanane, une personne est capable de dépasser les limites et d’agir « de toutes ses forces ». Cependant, quand il est question de ce que l’homme peut accomplir strictement par lui-même – le niveau de la deuxième partie du Chéma –, alors le service spirituel est limité à ce qui peut être accompli par « tout votre cœur et toute votre âme ».

Et, puisque la Torah reflète la Divinité lorsqu’elle descend – telle quelle – d’En haut, ceci étant le contenu général de la première section du Chéma, la Torah y précède les mitsvot. Les mitsvot, d’un autre côté, mettent l’accent sur le service de l’homme, thème de la deuxième partie du Chéma. C’est pourquoi dans celle-ci les mitsvot précédent la Torah.

Il en va de même pour la nécessité de décrire la récompense pour l’accomplissement des mitsvot : ce n’est qu’au niveau inférieur de Eikev qu’il est nécessaire de mettre l’accent sur la récompense ; au niveau de Vaet’hanane, une personne accomplit les mitsvot uniquement pour satisfaire à la volonté divine.

Néanmoins, le mérite du Chéma tel qu’il est relaté dans Eikev demeure, car comme mentionné ci-dessus, il y a une grande valeur dans le service divin apparemment inférieur de « l’audition ».

Basé sur Likoutei Si’hot, vol. IX, p. 79-84