Pourquoi le long processus ?
L’expression « D.ieu nous a pris d’Égypte avec une main puissante et un bras étendu » est un refrain courant dans la liturgie de Pessa’h. Le sens évident de cela est que les Israélites, asservis par de terribles ravisseurs, étaient impuissants à s’échapper, et D.ieu apparut avec une main puissante et un bras étendu pour les arracher des mains de l’Égypte.
Cela pourrait expliquer la main puissante, mais pourquoi le bras étendu ? Est-ce que D.ieu a dû tendre la main de loin ? Les Égyptiens étaient-ils trop puissants pour que D.ieu puisse s’en approcher ? En outre, on se demande pourquoi D.ieu a pris autant de temps avec les Égyptiens quand Il aurait pu les anéantir en quelques instants, comme Il le fit à la mer Rouge, et comme Il le fit aux Assyriens de nombreuses années plus tard. Pourquoi tout ce drame interminable et apparemment inutile dans l’exode d’Égypte ?
La réticence de Moïse
Moïse, vous vous en souvenez, était réticent à accepter la mission de D.ieu de libérer les Israélites. Il savait que le sauveur juif aurait besoin d’inspirer le Pharaon païen à croire en D.ieu et à être ému par Sa directive. Cela ne pourrait arriver que si le messager lui-même était un parangon de piété, embrasé d’amour, tremblant de crainte, et fort dans la foi. Seul un homme qui parlait de D.ieu avec une conviction totale pouvait espérer faire une entaille dans le mur de négation du Pharaon.
Moïse savait qu’il était un grand prophète, mais il était aussi le plus humble des hommes, et il ne faisait pas de conjectures sur son avenir. Il était peut-être le choix parfait de D.ieu à ce moment-là, mais peut-être ne serait-il plus digne de ce choix quand il atteindrait Pharaon.
Moïse finit par accepter la mission, mais quand il échoua à faire changer d’avis Pharaon, et qu’au lieu de cela, Pharaon augmenta le fardeau porté par les esclaves, Moïse s’en considéra responsable. S’il était un peu plus pieux, pensa-t-il, Pharaon aurait été ému.
Il s’approcha de D.ieu et déversa son cœur torturé. « Pourquoi m’as-Tu envoyé ? s’écria-t-il. Depuis que je suis venu parler à Pharaon en Ton nom, il n’a fait que nuire à ce peuple et toi [qui m’as choisi pour cela], Tu n’as pas sauvé Ton peuple. »1
Moïse disait en substance : « Tu aurais pu faire cela de deux manières : Tu aurais pu envoyer un messager qui inspirerait le Pharaon à libérer les Israélites, contrairement à moi, qui ne leur ai causé que du tort. Ou Tu aurais pu frapper Pharaon et les avoir libérés Toi-même. Tu n’as fait ni l’un ni l’autre... pourquoi ? »
Ce à quoi D.ieu répondit : « Maintenant, tu verras ce que Je ferai à Pharaon, car par [Ma] main puissante il les fera sortir, et par une main puissante, il les chassera de sa terre. »2
Encore une fois, Pourquoi la nécessité d’une main puissante ou d’un bras étendu ? D.ieu aurait pu libérer instantanément Sa nation. Il est D.ieu, après tout.
Juste à temps
Le problème était que les Israélites eux-mêmes étaient dans un état spirituel englouti. Ils s’étaient assimilés au point où, s’ils étaient restés un seul moment de plus en Égypte, ils seraient tombés dans un abîme spirituel permanent. Quand D.ieu apparut à Moïse, les Israélites ne méritaient pas d’être libérés. Leurs ravisseurs égyptiens, en revanche, n’avaient pas encore atteint un niveau de cruauté qui justifiait leur destruction.
D.ieu ne détruirait pas l’Égypte d’un coup, car cela aurait été injuste. Les Israélites ne méritaient pas une telle rédemption miraculeuse, et les Égyptiens ne méritaient pas une telle destruction spectaculaire. Alors D.ieu offrit à Pharaon assez de corde pour se pendre. Chaque fois que Pharaon allait défier D.ieu, il pousserait l’Égypte plus près du bord de la destruction.
Mais c’était une course contre le temps. Chaque instant que les Israélites restaient en Égypte les rapprochait du dernier abîme.
En des circonstances normales, Pharaon aurait dû être inspiré par Moïse, mais D.ieu a bloqué l’inspiration, « durcissant » son cœur, et ainsi Pharaon rejeta impudemment D.ieu. D.ieu donna à Pharaon l’occasion de lui obéir, mais Pharaon augmenta le fardeau des esclaves. D.ieu offrit au Pharaon dix chances de libérer les Israélites et de se racheter dans le processus, mais Pharaon refusa à chaque fois. Et à chaque refus, Pharaon amena involontairement l’Égypte plus près du bord en augmentant sa culpabilité.
Pour permettre à ce processus de se dérouler, D.ieu permit au Pharaon de le défier et de démontrer la pleine prouesse de la puissance égyptienne. Puis D.ieu a utilisé une « main puissante », une démonstration de Sa force, pour forcer les Égyptiens à libérer les Israélites contre leur volonté.
Mais une main puissante ne suffisait pas. Lorsque la balance égyptienne atteignit enfin un point de basculement, les Israélites étaient eux-mêmes au bord du gouffre. D’où le bras tendu. D.ieu les rattrappa au moment où ils étaient sur le point de tomber dans l’abîme et les préserva ainsi du désastre.
C’est pourquoi nous remercions D.ieu dans la nuit du Séder pour avoir parfaitement calculé le moment de notre rédemption. Un niveau de perfection que seul D.ieu pouvait atteindre.3
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