Le Chabbat qui précède Pourim, la lecture de la Torah comprend une section spéciale appelée Parachat Zakhor. La lecture de Zakhor traite du commandement de se souvenir d’Amalek et de comment ce peuple attaqua le peuple juif, sans aucune provocation, après sa sortie d’Égypte. Haman, le méchant de l’histoire de Pourim, était un descendant d’Amalek, d’où le lien avec Pourim.
Amalek représente le prototype de l’antisémite et, à notre époque, ce titre infâme a généralement servi à qualifier le régime nazi. De nombreux auteurs juifs et chroniqueurs de l’Holocauste ont appelé les hordes d’Hitler « les Amalécites de notre génération ». Et ainsi, le commandement de se rappeler ce qu’a jadis fait Amalek nous parle encore aujourd’hui, nous engageant à ne jamais laisser la mémoire s’éteindre.
En tant que fils d’un survivant – mon père a perdu toute sa famille dans la Shoah –, c’est un sujet très proche de mon cœur. J’ai lu beaucoup, j’ai parlé souvent de la Shoah, j’ai prononcé des discours lors d’importantes cérémonies commémoratives et, de manière générale, je la considère comme le plus grand cataclysme qui ait frappé notre peuple depuis de nombreux siècles, peut-être même depuis la destruction de Jérusalem.
Mais là, maintenant, je voudrais dire : « D’un autre côté. » Et l’autre côté de l’histoire, c’est que, aussi important et impératif qu’il soit de se rappeler de la Shoah, il existe un risque que dans nos écoles et dans l’éducation de nos jeunes, nous lui accordions une importance démesurée au point qu’elle occulte tout le reste. Je ne suis pas le premier à exprimer la préoccupation que les éducateurs, les écrivains et les cinéastes puissent exagérer à ce sujet au point où nos enfants risquent de grandir en en sachant plus sur la Shoah que sur le judaïsme.
Le judaïsme existait avant l’Holocauste, et continuera d’exister longtemps après. Le judaïsme n’est pas uniquement la tragédie, ou même une réponse à la tragédie. L’expérience juive n’est pas seulement douleur et persécution, épreuves et tribulations. Le judaïsme est la joie, le bonheur et une célébration de la vie. Le judaïsme est le Chabbat, les fêtes, mettre les téfilines, faire la brit mila, se tenir sous une ‘houpa, batifoler à Pourim et danser à Sim’hat Torah.
Le peuple juif a été appelé par D.ieu à être une nation sainte et une lumière pour les nations du monde. Nous avons été chargés d’une mission de morale et de mentschlichkeit, de valeurs divines, de charité, de nous préoccuper les uns des autres et de nous préoccuper des autres.
Les gens disent que l’Israël moderne a ressuscité des cendres d’Auschwitz. Mais sans la finalité positive d’être juif, un État juif devient vide de sens. Nous avons peut-être fait fleurir le désert et créé la seule démocratie au Moyen-Orient, mais au bout du compte, à quoi tout cela rime-t-il ? Sans une finalité supérieure, nous devenons juste un autre Liban, et nous produisons une mafia israélienne.
Il y a toujours eu un destin supérieur et un but plus profond à notre judéité. Nous ne laissons pas l’entièreté de notre identité juive être consommée par la réaction à l’antisémitisme. L’étude de la Shoah est sacrée, en ce sens que nous avons une obligation solennelle de ne jamais oublier « ce que t’a fait Amalek » et d’honorer à jamais la mémoire des millions de nos martyrs. Mais notre peuple et notre foi vont au-delà de la lutte pour la survie et la détermination à survivre à nos ennemis et à nos bourreaux. Il y a un but à notre survie. Nous devons survivre non seulement pour décevoir Hitler et Amalek, mais pour assurer notre continuité, préserver notre mode de vie et accomplir avec succès la mission juive dans ce monde. Toute la création en dépend.
N’oublions jamais notre passé douloureux. Mais rappelons-nous toujours qu’être juif, ce n’est pas seulement le kaddich et le yahrtseit. C’est la sagesse et l’émerveillement, la philosophie et la raison d’être, la joie et la célébration.
Joyeux Pourim !
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