La Torah exige que nous nourrissions nos animaux avant nous-mêmes.1 Vous vous réveillez le matin et donnez à manger à Médor avant de prendre votre petit-déjeuner. Cela ne veut pas dire pas que nous devons donner à nos bêtes notre dernier morceau de pain alors que nous mourons de faim. La vie humaine a la priorité absolue sur la vie animale. Mais si nous avons des moyens en suffisance pour sustenter les deux, les animaux doivent être nourris avant que nous prenions notre repas. Très simplement, la Torah nous délivre une leçon d’humanité en nous préconisant d’attribuer aux besoins des créatures dépendantes la préséance sur les nôtres.

Si vous êtes familier de la philosophie ‘hassidique, vous savez que, souvent, ce qui semble n’être qu’une très simple affirmation de la Torah possède un sens spirituel sous-jacent très profond. Sur un plan métaphorique, nous avons tous un animal intérieur, une nature basique totalement égocentrique. Notre mission dans la vie est de dominer notre nature animale en maîtrisant nos pulsions, ou de sublimer l’animal en le rendant plus spirituel.

Cette tâche est la raison de la descente de notre âme ici-bas depuis la demeure céleste où elle résidait avant notre naissance. L’âme était parfaitement heureuse de servir D.ieu dans son domaine spirituel où elle contemplait le divin, tremblait d’émoi et fondait d’extase. Mais elle a reçu la mission de descendre du ciel et d’investir le corps humain. Le but de l’âme n’est pas seulement de continuer à servir D.ieu toute seule, même si cela reste sa plus grande joie, mais d’enseigner au corps et d’entrainer notre nature animale à servir D.ieu.

Notre âme ne demanderait de mieux que de s’isoler toute la journée dans la prière et la méditation. Mais elle ne vient pas ici pour s’améliorer. Cela, elle peut le faire beaucoup plus librement dans le royaume spirituel dont elle est issue. Elle est descendue dans ce monde matériel pour affiner nos pulsions animales, pour transformer un être égocentrique en un être altruiste. Elle doit enseigner à l’animal la valeur de l’accomplissement des mitsvot et de l’étude de la Torah. Telle est la priorité de l’âme, et elle doit être mise en œuvre.

Les bénéfices pour l’âme

Il est clair que c’est là une épreuve difficile pour l’âme. Elle voudrait s’élever à des niveaux transcendantaux de sainte inspiration et au lieu de cela elle doit passer entre huit et dix décennies à travailler avec un animal têtu, paresseux et ignorant. Mais, en retour, l’âme atteint un niveau qu’elle n’aurait jamais pu atteindre à elle toute seule.

Alors qu’avant la naissance, l’âme s’adonnait à la fascination spirituelle, elle se concentre désormais à une cause plus grande qu’elle même. Et après cent vingt ans, lorsque l’âme retourne à sa demeure céleste, elle parvient à des degrés bien plus élevés qu’auparavant.

En entraînant le corps à servir D.ieu, l’âme a fait d’un petit morceau du monde matériel une demeure pour D.ieu ici-bas. Telle fut l’intention originelle de D.ieu dans la création, et l’âme a eu l’occasion de jouer un rôle dans ce dessein cosmique.

L’âme est descendue pour enseigner à un animal égoïste à devenir altruiste et, ce faisant, a appris une leçon. Aussi sacrées qu’aient pu être ses poursuites spirituelles avant sa descente, celles-ci constituaient, de manière subtile, une quête égoïste. Ayant vécu ici-bas, l’âme récolte alors les bénéfices de ses efforts et apprend la leçon qu’elle s’est elle-même évertuée à enseigner : que nous sommes finalement doublement récompensés lorsque nous faisons passer les autres en premier.