J’ai récemment rencontré un Juif qui n’a que faire de la religion organisée. Il est d’accord avec la morale et l’éthique ; il nous félicite pour notre sens du fair-play et notre dévouement à la justice naturelle, mais ne voit pas la nécessité de ce qu’il appelle les détails chicaniers de la pratique quotidienne. Il prétend ne pas laisser l’arbre lui cacher la forêt et observer l’esprit de la religion plutôt que sa lettre.

Pourquoi les gens religieux insistent-ils sur l’uniformité de l’expression ?

« Prenez le Chabbat, par exemple, a-t-il dit. Vous avez pris un magnifique engagement hebdomadaire au repos et à la bonne compagnie et vous l’avez gâché avec toute une liste d’énervantes futilités pointilleuses. Je suis le premier à célébrer le jour de repos, mais je le fais à ma façon, selon mes conditions. Pourquoi les gens religieux insistent-ils sur l’uniformité de l’expression plutôt que de permettre à tout le monde d’observer le judaïsme selon leurs propres rythmes naturels ? »

J’ai fait valoir que, même si le judaïsme laisse aux gens la latitude de mettre l’accent sur les pratiques qui sont à leurs yeux les plus importantes et que personne ne contestera l’idée qu’il est préférable que la religion soit mue par l’amour plutôt que par l’obéissance aveugle, il reste qu’il existe une bonne raison de souligner les minuties de la vie quotidienne.

Le Chabbat en est le parfait exemple. Nous lisons : « Et les Enfants d’Israël devrons observer le Chabbat, pour faire du Chabbat, à travers les générations, une alliance éternelle » (Exode 31, 16). » Il y a deux niveaux de Chabbat : l’observer et le faire.

À première vue, le Chabbat est une composante naturelle de la vie.

À première vue, le Chabbat est une composante naturelle de la vie : il s’agit de passer du tumulte éreintant de la semaine à la sainteté et au repos qui caractérisent la détente du week-end. Au fil du flux et du reflux de notre vie, le Chabbat est observé, comme une nécessaire constante divinement prescrite qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue.

Mais nous devons aussi faire le Chabbat. Nous devons travailler le judaïsme. Nous extrayons cette période de 24 heures du train-train quotidien pour en faire une quête hebdomadaire de découverte de soi et de transformation cosmique. En remplissant chaque instant et chaque action de sens, nous nous transformons nous-mêmes et, par extension, nous altérons irrévocablement le tissu même de notre existence.

Il en est de même de chaque mitsva et de chaque observance que nous accomplissons. En obéissant aux souhaits de D.ieu, nous apportons à la fois amour, sens et moralité à nos vies, en nous conformant aux aspects techniques de la vision de D.ieu pour le monde.