Comment naquit la foi juive ?
Le Midrache raconte la naissance du judaïsme à travers cette énigmatique parabole :
« Et D.ieu dit à Abraham : “Quitte ton pays, ta patrie, et la maison de ton père...” » (Genèse 12, 2) – À quoi cela peut-il être comparé ? À un homme qui voyageait de lieu en lieu lorsqu’il vit un palais en flammes. Il se demanda : « Est-il possible que ce palais n’ait pas de propriétaire ? » Le propriétaire du palais regarda au-dehors et dit : « Je suis le propriétaire du palais. » De même, Abraham notre père dit-il : « Est-il possible que le monde n’ait pas de maître ? » D.ieu regarda au-dehors et lui dit : « Je suis le maître, le Souverain de l’univers. »
La perplexité d’Abraham est bien compréhensible. Cet homme sensible contemple un univers magnifiquement structuré, une splendide œuvre d’art. Il est ému par la grandeur d’un coucher du soleil et par le miracle de la naissance ; il s’émerveille des rugissantes vagues de l’océan et du battement silencieux et régulier du cœur humain. Le monde est effectivement un palais.
Mais le palais est en flammes. Le monde est plein de crime, d’injustice et de conflits. Des voyous, des agresseurs, des violeurs, des kidnappeurs et des assassins sont continuellement en train de démolir le palais, faisant de notre monde un champ de bataille ou la douleur le dispute à l’horreur.
« Qu’est-il arrivé au propriétaire du palais ? » crie Abraham. Pourquoi D.ieu permet-Il à l’homme de détruire Son monde ? Pourquoi laisse-Il un si beau palais brûler de la sorte ? Se pourrait-il que D.ieu ait créé le monde pour l’abandonner ensuite ? Mais qui construirait un palais pour l’abandonner ?
Le Midrache donne la réponse de D.ieu : « Le propriétaire du palais regarda au-dehors et dit : “Je suis le propriétaire du palais.” D.ieu regarda au-dehors et dit à Abraham : “Je suis le maître, le Souverain de l’univers.” »
Que signifie la réponse de D.ieu ?
Remarquez que le propriétaire du palais n’essaie pas de s’extraire de l’incendie ou d’éteindre le feu. Il ne fait qu’annoncer qu’Il est le propriétaire de ce palais qui part en fumée. C’est comme si, au lieu de s’enfuir, le propriétaire appelait à l’aide. D.ieu a fait le palais, l’homme y a mis le feu, et seul l’homme peut éteindre les flammes. Abraham demande à D.ieu : « Où es-Tu ? » D.ieu répond : « Je suis là. Mais où es-tu, toi ? » L’homme demande à D.ieu : « Pourquoi as-Tu abandonné le monde ? » D.ieu demande à l’homme : « Pourquoi M’as-tu abandonné ? »
C’est ainsi qu’a commencé la révolution du judaïsme, la courageuse entreprise humaine d’éteindre les flammes de l’immoralité et du sang pour refaire du monde le palais harmonieux et sacré qu’il aurait toujours dû être. La rencontre d’Abraham avec D.ieu devant un palais en flammes a donné naissance à la mission du judaïsme : être obsédé par le bien et horrifié par le mal.
(Midrache Rabba Béréchit 39:1 ; tel qu’interprété par le grand rabbin lord Jonathan Sacks dans Radical Then, Radical Now, Harper Collins, 2000).
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