Les mariages de Jacob avec Ra’hel et Léah, les filles de Laban, sont relatés dans la paracha de cette semaine et de nombreux commentateurs cherchent à expliquer comment Jacob put épouser deux sœurs, sachant qu’il observait toute la Torah avant que celle-ci fût donnée1 et que la Torah l’interdit explicitement.2 Voici le résumé de la profonde et subtile réponse que le Rabbi donna à cette question :
Nos ancêtres avaient pris sur eux d’observer la Torah tout entière – bien qu’ils n’en eussent pas reçu l’ordre – afin d’ajouter une dimension supplémentaire à leur dévotion envers D.ieu. Toutefois, s’il s’avérait que l’accomplissement de telle ou telle mitsva qu’ils s’étaient imposée entrait en conflit avec un ordre explicite de D.ieu, ils s’abstenaient alors évidemment d’accomplir cette mitsva non commandée. De fait, cette attitude constituait pour eux une véritable observance de la Torah. C’est en effet la Torah elle-même qui exigeait qu’ils s’abstiennent d’accomplir un acte de dévotion facultatif lorsque celui-ci s’opposait à un ordre divin explicite.
Jacob avait promis à Rachel qu’il l’épouseraitOr, mis à part les préceptes que Noé et ses descendants s’étaient vus prescrire par le Tout-Puissant, ceux-ci avaient également pris sur eux, de façon collective, des lois morales supplémentaires3 qui devinrent dès lors obligatoires aussi bien au regard des Lois noa’hides que d’après la Torah.4 Si l’une de ces lois universellement acceptées entrait en conflit avec l’une des « mitsvot du Sinaï » que les Patriarches observaient de leur propre volonté, ils devaient, dans ce cas là aussi, renoncer à leur « mitsva du Sinaï ». Un exemple d’une de ces lois universellement acceptées par la société était l’interdiction de la malhonnêteté, de sorte que même Laban « l’escroc » se sentit tenu de justifier et d’excuser la façon dont il avait trompé Jacob.
Jacob avait promis à Rachel qu’il l’épouserait. Ne pas accomplir cette promesse aurait été malhonnête, et aurait mis Rachel en grande détresse car elle craignait d’être alors donnée en mariage à Ésaü.5 Dès lors, bien qu’il fût déjà marié à Léah, il était défendu à Jacob d’observer la future loi interdisant d’épouser deux sœurs et il était de son devoir de tenir sa promesse envers Rachel et de l’épouser.
Il y a, dans cette histoire, une leçon simple et claire pour nous tous : si une personne désire prendre sur elle des observances supplémentaires, elle doit d’abord s’assurer que ceci ne se fera pas aux dépens de quelqu’un d’autre. Si on connaît – et on a la possibilité d’aider – une personne ignorante de son Judaïsme et en grand besoin de se voir enseigner les bases de la vie juive, on n’a pas le droit de se dire : « Je préfère utiliser mon temps pour élever mes propres études et mon observance à un niveau supérieur. » La question qu’il ou elle doit plutôt se poser est : « Suis-je à ce point plus important(e) que l’autre que cela justifie d’ajouter des enjolivements à mon étude et à ma pratique de la Torah au détriment des besoins spirituels élémentaires de l’autre ? »6
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