Curieux flashback
Cette semaine, dans la paracha de « A’harei Mot », la Torah reprend le récit de la mort tragique des deux fils aînés d’Aharon, lorsqu’ils pénétrèrent dans le Saint des Saints le jour de l’inauguration du Sanctuaire pour y faire une offrande d’encens. Cela a été lu il y a deux semaines, dans la paracha de « Chemini » qui relata que D.ieu ordonna alors que désormais un Cohen ne pourrait pas accomplir son sacerdoce en état d’ébriété, ce qui avait été le cas des deux frères défunts qui avaient bu du vin avant de faire leur offrande.
La semaine dernière nous avons lu les deux sections conjointes de « Tazria » et « Metsora » qui traitaient principalement des causes les plus importantes d’impureté rituelle, en premier lieu desquelles la « lèpre » biblique qui découle de la médisance.
Puis cette semaine la mort tragique des fils d’Aharon est de nouveau évoquée, avec une nouvelle règle : l’interdiction au grand-prêtre de pénétrer dans le Saint des Saints à toute heure, mais seulement le jour saint de Kippour.
Pourquoi cette séquence anachronique ? Pourquoi cette interruption de deux parachas pour revenir au même sujet ?
La ‘Hassidout enseigne que la Torah s’adresse en fait à deux catégories de Juifs, chacun selon la manière qui lui convient.
Il est des Juifs dont l’activité principale est l’étude de la Torah. Ces Juifs sont immergés dans la sainteté en permanence et le danger qui les guette est de devenir « enivrés » de sainteté au point de perdre conscience de la réalité du monde et de la nécessité de le pénétrer de la sainteté qu’ils acquièrent à travers leur étude et leur service de D.ieu.
La majorité des Juifs, cependant, n’a pas le privilège de pouvoir étudier en permanence. Ceux-ci s’efforcent de ménager dans leur emploi du temps des moments d’études de Torah quotidiens. Pour ces Juifs-là, la réalité matérielle est tout sauf théorique. Ils sont exposés aux aspects les plus « impurs », les plus spirituellement dangereux de ce monde, et doivent batailler contre toutes les tentations, qu’elles viennent de l’extérieur ou de l’intérieur. C’est de loin, derrière le voile de « Tazria-Metsora », qu’ils contemplent la sainteté de « Chemini ».
Le risque qui guette ces Juifs est d’être terrorisés par les dangers de ce monde au point de chercher à les fuir en se réfugiant dans une citadelle de sainteté.
À ces Juifs de « A’harei Mot », la Torah dit qu’il est louable et nécessaire de s’imprégner de sainteté, mais pas d’une manière qui fait fi de la vie. Il y a un temps et une mesure pour cela, il y a un seder, un ordre des choses. Et cette relation avec la sainteté ultime n’a pas pour vocation d’abandonner la vie terrestre, mais au contraire, à l’instar de la prière du grand prêtre dans le Saint des Saints, d’en assurer la pérennité en y révélant son sens divin.
C’est en vivant selon les principes exposés dans la seconde paracha de cette semaine, « Kedochim », régissant les relations interpersonnelles, que l’on peut vivre une vie sainte au sein de ce monde.
Chabbat Chalom !
Emmanuel Mergui
au nom de l’équipe éditoriale de Chabad.org