Chaque parent a connu au moins une fois ce sentiment de détresse absolue. Et une fois, c’est déjà beaucoup trop...
Vous êtes avec votre tout-petit dans un centre commercial surpeuplé ou bien sur le trottoir d’une grande artère parcourue par une intense circulation.
Il y a une seconde, la main de votre enfant était douillettement blottie dans le creux de la vôtre. D’un seul coup il n’est plus là. Il a disparu. Volatilisé.
Votre cœur bat la chamade. Vos mains sont moites. Votre estomac vous remonte dans la gorge. Vous vacillez d’effroi et respirez avec difficulté. Prise de panique, vous vous mettez à sa recherche. Vous scrutez votre entourage, cherchant à repérer tout ce qui porte la teinte de bleu pâle de la chemise de votre fils. Vous essayez en vain de repousser les pensées sinistres qui vous bombardent l’esprit... L’horreur de ce qui pourrait arriver... Comment les choses pourraient finir. L’image d’un petit corps démembré coincé sous les roues d’une voiture ou de mauvais kidnappeurs enlevant votre enfant envahit votre esprit.
Votre tête explose. Des larmes se forment dans vos yeux. Vous courrez... aveuglément... éperdument... Vous devez retrouver votre enfant chéri, la prunelle de vos yeux.
Et alors, miracle parmi les miracles, du coin de l’œil, vous l’apercevez. Vous l’attrapez tendrement, le serrez fort contre vous, en jurant de ne plus jamais le laisser s’échapper, de toujours l’envelopper de votre étreinte protectrice. Vous laissez s’échapper un long soupir de soulagement, éternellement reconnaissante de l’avoir retrouvé sain et sauf.
Il faudra plusieurs minutes pour que votre pouls se stabilise, pour que vous repreniez votre respiration et que vos bras cessent de trembler. Mais, en regardant votre montre, vous prenez conscience que ce moment de terreur qui vous a semblé durer une éternité n’a en réalité duré que... 15 secondes.
Peut-être avez-vous réagi de manière excessive ? Au vu de ce court laps de temps, votre panique était-elle complètement injustifiée ? Non, vous savez très bien que 15 secondes c’est plus de temps qu’il n’en faut à un criminel fou pour se saisir de votre enfant et filer vers la sortie. Quinze secondes suffisent largement à votre énergique bambin pour sauter du trottoir et se retrouver sur la chaussée, à la merci des voitures qui foncent.
Quinze secondes, cela peut paraître comme un temps très court, mais pas 15 secondes de torture. Pas 15 secondes d’une agonie qui pourrait résulter en malheur absolu pour le reste de votre vie.
Ce furent les pires 15 secondes de votre existence.
À présent, multipliez cette terrible expérience de 15 secondes par vingt. Vingt fois. Chaque jour. Imaginez l’effet de cette tension sur votre mental.
Vingt fois par jour, chaque jour. Pendant une semaine entière. Pendant des mois, sans s’arrêter.
Imaginez, si après ces interminables 15 secondes vous n’étiez pas réuni avec votre enfant, mais entendiez une terrible, immense explosion – du genre qui fait s’effondrer des immeubles comme s’ils étaient des châteaux de cartes, ou qui provoque des incendies tout autour de vous. Une explosion qui a détruit des maisons, des immeubles, des usines et des cours d’école – et tous ceux qui ont eu le malheur de s’y trouver.
Rappelez-vous comment vous avez serré votre enfant lorsque vous l’avez retrouvé sain et sauf et imaginez que vos bras, la chaleur de votre foyer ou les murs de son école ne fussent jamais pour lui une protection adéquate.
Imaginez qu’il fut vulnérable et en danger où qu’il se trouve. À chaque instant de la journée. Vingt fois par jour. Et que vous ne pouviez rien faire pour le protéger.
Et alors que vous vous rappelez l’horreur qui vous a saisie pendant ces indélébiles 15 secondes, imaginez les terrifiantes 15 secondes qui suivent l’annonce « ALERTE ROUGE – TSEVA ADOM » que chaque citoyen de Sdérot a vécues en cherchant un abri autour de soi pour que la roquette qui s’abat ne le réduise pas en charpie. Vingt fois par jours.
Six mille cinq cents roquettes ont été envoyées sur Israël, à toute heure du jour ou de la nuit. Deux cent cinquante mille hommes et femmes, depuis les vieillards jusqu’aux nouveaux nés, sont sous la menace directe de ces roquettes. Des centaines de civils israéliens ont été blessés et de nombreux ont été tués par ces bombes volantes.
Si vous imaginez tout cela, et si vous imaginez l’horreur de ces 15 secondes, vous ne vous demanderez pas pourquoi Israël a attaqué Gaza.
À la place, vous vous demanderez : si un gouvernement a pour mission de sauvegarder la vie de ses administrés, pourquoi leur a-t-il fallu tellement de temps pour réagir ?
Rejoignez la discussion