Maintenant que l’année scolaire est bien entamée, de nombreux organes directeurs et responsables d’établissements se penchent sur les améliorations nécessaires et, le cas échéant, sur le changement. Si l’on se fie au passé, les parents ne tarderont pas à se manifester et à réclamer des changements, que ce soit dans un programme d’études ou dans la restructuration même de l’école. Ce n’est pas un phénomène nouveau ; en fait, aussi loin que je me souvienne, il y a toujours eu des appels à la réforme de l’enseignement. Régulièrement, tous les trois ou quatre ans, de nouvelles recherches montrent comment les enfants accusent des retards dans différents domaines, et les « tours d’ivoire » lancent des appels à la « réforme éducative ».
Le changement s’opère lorsque les administrateurs, les éducateurs et les parents travaillent en coopération, prenant des mesures progressives et modestes, avec une démarche méthodique visant la réussite.Pour ceux qui s’en souviennent, vers la fin des années 60 et pendant les années 70, il y avait un mouvement en faveur d’une « éducation ouverte ». Il avait été « démontré » que la salle de classe avec toutes ses limitations constituait un environnement étouffant, ayant un impact négatif sur l’épanouissement des élèves. Pour développer pleinement les capacités et la réussite de nos enfants, nous devions les libérer des contraintes des salles de classe fermées, des devoirs restrictifs, de l’apprentissage méthodique des compétences et des « exigences déraisonnables ». L’idée était que si nous les guidions correctement et leur présentions des possibilités d’épanouissement, les enfants apprendraient de leurs expériences de multiples façons. En tant que directeur d’école à Hartford, dans l’Etat du Connecticut, durant ces années, j’ai contribué à la création d’un magnifique établissement scolaire avec des cloisons mobiles au lieu de murs et de vastes espaces d’apprentissage ouverts.
Finalement, cette grande expérience de réforme éducative a échoué, et une décennie plus tard à Hartford, des murs ont été construits et les salles de classe traditionnelles sont revenues. Cette histoire s’est répétée dans tout le pays. Pourquoi ? L’idée était-elle si imparfaite ou était-ce les méthodes utilisées pour mettre en œuvre le changement qui posaient problème ?
Les chercheurs ont divisé les processus de changement en deux grandes catégories. La première est lente, progressive, graduelle et évolutive, la seconde est radicale et parfois révolutionnaire. Chacune de celles-ci possède sa propre approche, et les processus nécessaires pour réussir dans chaque cas sont complètement différents.
Pour mettre en œuvre un changement graduel, nous repérons un problème et établissons des objectifs à long et court terme pour y remédier. Nous mettons en place des étapes spécifiques et mesurables qui permettront d’opérer le changement nécessaire. Pour réussir, les initiateurs de la réforme doivent impliquer toutes les parties prenantes et coordonner leurs actions communes, une étape à la fois. La direction doit constamment suivre l’évolution et procéder aux ajustements nécessaires en consultation avec toutes les parties.
Le changement radical exige une façon de penser différente. Il nécessite de ré-éduquer ceux qui le mettront en œuvre et d’assurer leur adhésion pleine et entière au projet. Ce type de changement ne peut pas être entrepris progressivement sur une longue période ou accompli seulement en partie. Il exige une détermination sans faille tout au long du processus. En fin de compte, à moins que toutes les parties prenantes ne changent radicalement leur façon de voir les choses et n’agissent en conséquence, l’effort s’essoufflera.
J’ai vu de nombreux innovateurs en éducation proposer ce qui semblait être de très bonnes idées, mais ils n’ont finalement pas réussi à mettre en place la structure pour en assurer une mise en œuvre efficace. Je suis prêt à parier que la même chose pourrait être dite pour beaucoup des changements radicaux qui n’ont pas pris. Les études montrent que c’est ce qui est arrivé au mouvement de l’« éducation ouverte ». C’est pourquoi, si vous envisagez un changement dans votre école, j’aimerais partager les lignes suivantes avec vous.
Je tiens à préciser d’emblée que je fais ces commentaires à ce moment-ci, comme une mise en garde émanant d’une personne ayant de l’expérience. Bien que nous puissions repérer des aspects de la vie scolaire qui pourraient bénéficier d’un changement radical, l’expérience a montré que les écoles réussissent mieux lorsque le changement est graduel et progressif. Cela ne veut pas dire que nous pouvons remédier à un problème avec une démarche partielle, ou bien si seulement quelques unes des parties prenantes y adhèrent. Le changement évolue lorsque les administrateurs, les éducateurs et les parents travaillent en coopération, prenant des mesures progressives et modestes, avec une démarche méthodique visant la réussite.
Permettez-moi de formuler quelques recommandations :
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Le changement a plus de chances de réussir lorsqu’il vient du terrain plutôt que lorsqu’il est imposé par la hiérarchie. Les instances dirigeantes ne devraient pas dicter les pratiques de classe, et les administrateurs ne devraient pas imposer des approches pédagogiques, ou même un programme, sous forme de décret. Lorsque les enseignants adhèrent à une idée et se l’approprient, ils se donnent corps et âme pour la faire fonctionner.
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Un changement efficace implique de définir chacune des étapes nécessaires et l’ordre dans lequel elles doivent être mises en œuvre. Essayer de faire trop de choses à la fois ou précipiter la démarche en faisant l’impasse sur une étape risque de compromettre le projet. Changez une chose à la fois. Entreprendre trop de choses simultanément peut conduire au chaos.
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Tout projet important a besoin d’un responsable qui le portera personnellement. Il devra tenir des réunions régulières avec l’ensemble de son équipe, ils sauront exactement qui fait quoi et quand ce sera terminé. Diffuser l’information, pour que tout le monde sache où en sont les choses, renforce l’esprit d’équipe.
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Même après que toutes les étapes menant au changement ont été franchies et que le changement est pleinement en vigueur, ce n’est pas fini. Comme disait Yogi Berra, « ce n’est pas fini jusqu’à ce que ce soit fini, et même alors, ce n’est pas fini ». Les habitudes sont profondément ancrées et les gens reviennent naturellement à leurs méthodes familières. Tout changement doit être supervisé et des ajustements doivent être faits jusqu’à ce qu’il devienne routinier. De plus, il est rarement possible de prévoir toutes les éventualités, c’est pourquoi il est essentiel de continuer à assurer le suivi de chaque phase et de procéder aux ajustements nécessaires lorsque des problèmes se présentent.
Aucune école ne peut se permettre d’ignorer le besoin de progresser ou d’évoluer selon les exigences de son époque. J’ai vu trop de bonnes institutions péricliter en raison de leurs réticences à entreprendre des changements. Les leaders éducatifs avisés, professionnels ou non, traceront une voie pour refléter les besoins à venir de la communauté dont ils ont la charge et mettront en œuvre les changements qui mèneront dans cette direction. Ma recommandation essentielle est que cela soit fait comme il faut pour que le résultat soit comme il faut.
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