Cette double caractérisation de la Torah – en tant que sagesse et volonté « données » par D.ieu d’une part, et en tant que produit de l’esprit humain qui la reçoit et l’assimile d’autre part – correspond à sa division en deux composantes principales : la « Torah Écrite » et la « Torah Orale ».1

Dès son origine, la Torah comprenait des composantes « écrites » et « orales »

Dès son origine en tant que communication divine destinée à l’humanité, la Torah était constituée de ces deux entités distinctes. Lorsque D.ieu déclare que le premier Juif, Abraham, « a maintenu Mes observance, Mes mitsvot, Mes décrets et Mes Torahs »,2 le Talmud explique que le pluriel « Torahs » désigne « la Torah Écrite et la Torah Orale ».3 Maïmonide commence son introduction à sa codification de la loi de la Torah, le Michné Torah, par la déclaration suivante (basée sur le Talmud, Berakhot 5a) : « Toutes les mitsvot qui furent transmises à Moïse au Sinaï furent accompagnées de leur explication. Comme il est écrit4  : “Je donnerai les tables de pierre, et la Torah, et la mitsva.” “La Torah” – c’est la Torah Écrite. “Et la mitsva” – c’est son explication. Et Il nous a ordonné d’accomplir la Torah conformément à la mitsva. Cette “mitsva” est ce que l’on nomme la Torah Orale ». En effet, les deux sont indissociables, car aucun texte ne peut avoir de signification faisant autorité sans une tradition l’accompagnant pour en expliciter le sens et les principes qui régissent son interprétation.5

La « Torah Écrite » fut transcrite par Moïse « de la bouche du Tout-Puissant »6 et est contenue dans le rouleau de la Torah. La « Torah Orale » englobe les traditions transmises depuis le Sinaï mais non (initialement) consignées par écrit,7 ainsi que les interprétations et décisions formulées par les sages de chaque génération. Plus précisément, Maïmonide énumère cinq catégories d’enseignements et de lois que comprend la « Torah Orale » : 1) La signification traditionnelle du texte de la Torah telle qu’enseignée par Moïse et transmise de génération en génération. 2) Les lois et principes non contenus dans le texte, mais enseignés par Moïse dans le cadre de la tradition orale. 3) Les interprétations et expositions du texte logiquement déduites par les sages selon les règles et méthodes traditionnelles d’exégèse de la Torah, les différences d’opinion (ma’hloket) entre les sages étant tranchées à la majorité. 4) Les ordonnances édictées par les sages de chaque génération comme « garde-fous » pour les lois de la Torah, conformément à l’autorité que celle-ci leur confère. 5) D’autres ordonnances édictées par les sages de chaque génération, selon l’autorité que la Torah leur confère, pour le bien commun ou en réponse aux besoins et circonstances spécifiques de leur époque.8

La divinité de la Torah s’exprime à travers la Torah Écrite, et sa dimension humaine dans les délibérations de la Torah Orale

À un niveau fondamental, la Torah Écrite représente l’aspect divin de la Torah, tandis que la Torah Orale incarne sa dimension humaine. Mais comme nous l’avons vu – et comme nous l’approfondirons plus loin, la Torah Orale est tout autant « les paroles du D.ieu vivant ». Et la dimension humaine, nous le verrons, n’est pas l’apanage de la Torah Orale, mais trouve ses racines dans la Torah Écrite. Ainsi, il serait plus juste d’affirmer que la symbiose entre la sagesse divine et l’intellect humain caractérise l’ensemble de la Torah, tant sa partie écrite-textuelle que sa partie orale-explicative, chaque élément trouvant toutefois son expression principale dans sa partie respective : la divinité de la Torah s’exprime le plus explicitement à travers les mots de la Torah Écrite, et sa dimension humaine est plus manifeste dans les enseignements et délibérations de la Torah Orale.