Mardi 13 mai dernier, en pleine réunion de crise et au milieu d’appels téléphoniques urgents, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a invité Mme Rou’hama Davino et le Rav Or Ziv à son bureau pour les remercier en personne.
Deux semaines plus tôt, lors de la Journée du Souvenir d’Israël pour ses soldats tombés et les victimes du terrorisme (Yom Hazikarone), Netanyahou avait mis les téfiline dans son bureau et prié. Une image du Premier ministre israélien portant fièrement les téfiline a fait le tour du monde.
« Le Premier ministre avait besoin de donner de la force à la nation en ces moments difficiles », déclara le Rav Ziv, qui co-dirige le centre ‘Habad-Loubavitch de Katamon, à Jérusalem. « Porter des téfiline était la manière la plus émouvante de le faire. »
Les téfiline eux-mêmes racontaient une histoire incroyable. Ils étaient ceux du fils de Rou’hama Davino, Moché, surnommé « Mochiko » par son entourage, un soldat israélien tué à Gaza en 2014.
Cet été-là, pendant l’opération « Bordure protectrice », Mochiko fut l’un des premiers soldats de l’Armée de Défense d’Israël (Tsahal) à entrer à Gaza pour une mission visant à trouver des tunnels terroristes. Avec son bulldozer D9, il dégageait la route des mines qui s’y trouvaient, ouvrant le chemin aux troupes. Tragiquement, un missile frappa sa cabine, et il fut tué à l’âge de 20 ans. Lorsque le Rav Ziv apprit que Rou’hama observait la chiva pour son fils à Katamon, il alla lui rendre visite.
C’est ainsi qu’une chaîne de mitsvot en mémoire de Mochiko commença.
« Prendre soin de nos héros »
« Rou’hama voulait faire quelque chose de bien en mémoire de son fils et le garder en vie, à ses côtés, expliqua le Rav Ziv. Nous avons eu l’idée du “Fun Truck”. »
Le Fun Truck est un camion que le Rav Ziv, Rou’hama et sa famille conduisent vers des bases militaires éloignées, apportant des barbecues et de la joie aux soldats de Tsahal. Il perpétue l’héritage de Mochiko en tant que jeune soldat qui se préoccupait toujours des autres, les soutenant et prenant soin d’eux. Depuis le 7 octobre, le camion sort tous les jours, atteignant des soldats sur des avant-postes isolés tout le long de la frontière de Gaza, et même au nord sous le feu à la frontière du Liban.
« C’est très gratifiant de pouvoir rendre à nos soldats le bien qu’ils nous font et de pouvoir prendre soin de nos héros, déclara Rou’hama à Chabad.org. Nous avons tant de bénévoles et de donateurs qui se joignent à nous. C’est merveilleux. »
Un jour, quelques semaines après le 7 octobre, après qu’Israël eut déjà lancé sa réponse militaire « Épées de fer » à la déclaration de guerre palestinienne, le Rav Ziv rendit visite à Rou’hama et à sa famille chez eux. « Je remarquai qu’elle avait une petite vitrine avec une photo de Mochiko et quelques objets sentimentaux lui appartenant, se souvint-il. Parmi ceux-ci se trouvait une paire de téfiline. »
Rou’hama raconta au Rav l’histoire des téfiline. « Tous les soldats connaissaient Mochiko pour ses téfiline. Avant chaque bataille, il les encourageait à les mettre aussi et à dire une prière. Il voulait que chaque soldat de sa compagnie soit protégé par les téfiline. C’était important pour lui, et une partie inséparable de qui il était. »
Mochiko mit ses téfiline jusqu’à son dernier jour. Quand le véhicule de Mochiko fut touché, il a pris feu. Les soldats ont réussi à récupérer le corps de Mochiko mais rien d’autre avant que le feu n’engloutisse complètement le véhicule. Tout fut réduit en cendres à l’intérieur, à l’exception de deux objets restés en parfait état : les téfiline de Mochiko et son ‘Hitat, un livre contenant le ‘Houmach, les Psaumes et le Tanya (l’œuvre fondatrice du ‘hassidisme ‘Habad), et un livre de prières.
Le Rav Ziv fut touché par cette histoire. Une idée lui vint. « Que penseriez-vous que le Premier ministre mette ces téfiline ? »
Rou’hama réagit avec enthousiasme. Elle avait toujours voulu voir les téfiline de Mochiko réutilisées, surtout d’une manière qu’il aurait aimée. Après avoir fait vérifier les téfiline et effectué quelques petites réparations, Rou’hama écrivit une lettre à Netanyahou, et le Rav Ziv l’envoya avec les téfiline à un ami qui devait rencontrer le Premier ministre prochainement.
Netanyahou avait rarement, voire jamais, été vu publiquement portant des téfiline. Mais bientôt, ils reçurent une réponse : une promesse à Rou’hama que le Premier ministre mettrait les téfiline et leur enverrait une photo.
« Le nom de l’Éternel sur toi »
Des mois passèrent sans qu’ils n’aient de nouvelles. C’était compréhensible – le Premier ministre était occupé par une crise après l’autre. Bientôt, les choses devinrent vraiment tendues. La Maison Blanche menaçait d’arrêter des livraisons d’armes vitales et des avancées militaires cruciales étaient retardées.
Enfin, le matin du jour du souvenir le plus douloureux qu’Israël ait connu depuis longtemps, Netanyahou mit les téfiline de Mochiko et récita les mots ancestraux de la prière du Chéma, « Écoute, ô Israël : l’Éternel est notre D.ieu, l’Éternel est Un. » Une photo de ce moment fut prise et commença bientôt à circuler en Israël, puis dans le monde entier.
« Ses principaux assistants qui étaient avec lui à ce moment-là m’ont dit que c’était extrêmement émouvant, déclara le Rav Ziv. Certains étaient émus aux larmes. Le Premier ministre était visiblement ébranlé. Ce n’était pas un moment ordinaire, ce n’est pas quelque chose qu’ils avaient vu auparavant. »
Lorsque Netanyahou partagea publiquement la photo, il l’accompagna d’un verset du livre de Devarim : « Alors tous les peuples de la terre verront que le nom de l’Éternel est proclamé sur toi, et ils te craindront. » (Deut. 28,10)
C’était le même verset que le Rabbi – Rabbi Mena’hem Mendel Schneerson, de mémoire bénie – cita à l’approche de la guerre des Six Jours de 1967, ajoutant l’explication du Talmud selon laquelle ce verset faisait référence aux téfiline. Tout effort devait être fait, déclara le Rabbi à l’époque, pour aider les soldats juifs protégeant leurs frères en Terre Sainte à mettre les téfiline, ce qui instillerait la peur dans le cœur de leurs ennemis et apporterait une victoire certaine.
Israël est une nation unique, expliqua le Rabbi, « un peuple qui demeurera seul », dont le destin et la victoire ultime sont entre les mains de D.ieu. Leurs décisions impactant la vie de millions de Juifs, c’était quelque chose que les dirigeants politiques et militaires israéliens devaient comprendre et apprécier plus que quiconque.
Le Rabbi était donc particulièrement heureux lorsque, immédiatement après être devenu un héros israélien en 1967, le général Ariel Sharon mit fièrement des téfiline au Mur Occidental. La photo de l’événement fit également sensation en Israël, étant publiée dans tous les grands journaux. Dans une lettre à Sharon, le Rabbi souligna « l’inspiration immense que vous avez éveillée dans le cœur de nombreux de nos frères juifs lorsque vous avez mis les téfiline au Mur Occidental, un acte qui a mérité une grande publicité et a résonné puissamment et positivement dans les diverses couches de notre nation... »
La consolation d’une mère
Netanyahou fut ému par les téfiline, et par le fait qu’ils appartenaient à Mochiko. Il écrivit qu’il pensait à Mochiko et à l’odeur des flammes encore présente sur les boîtiers des téfiline. Il ajouta : « J’ai promis à Rou’hama que je consacrerais les téfiline pour l’élévation de l’âme de Mochiko et pour l’élévation de tous nos défunts. C’est ce que je fais aujourd’hui avec une révérence sacrée. Que la mémoire de nos défunts soit bénie et gardée dans nos cœurs à jamais. »
« Que notre Premier ministre porte des téfiline et tienne un livre de prières était très émouvant, déclara Rou’hama. C’était un message au monde : nous avons Hakadoch Baroukh Hou, D.ieu, avec nous. Les téfiline sont notre connexion avec Lui, et grâce à Lui, nous vaincrons. »
Lorsque le Premier ministre accueillit Rou’hama Davino et le Rav Ziv dans son bureau mardi dernier, c’était pour remercier personnellement la mère qui lui avait donné de la force et l’avait aidé à inspirer tant de gens – avec des réactions bien au-delà de ce qu’il avait imaginé.
« Dans cela, » dit-il à Rou’hama en désignant les téfiline de Mochiko, « se trouve une puissance spéciale de notre peuple. »
Benjamin Netanyahou promit à Rou’hama qu’il mettrait les téfiline de Mochiko chaque Jour du souvenir. Rou’hama dit qu’elle était remplie d’émotion et, plus que tout, elle sentait que son fils était à ses côtés, apportant sa lumière au monde. « C’étaient ses téfiline, encore en train de faire ce qu’il avait toujours fait, jusqu’à son dernier jour : connecter notre nation à D.ieu, donner de la force. Je sais qu’il est rempli de joie. »
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