Question :
Récemment, j’ai lu la Bible, et il semble que le peuple juif ait négligé sa mission. Tout au long de la Bible, le Seigneur demande au peuple de « proclamer Son nom » (Isaïe 12,4 ; Psaumes 105,1) et « de chanter des louanges à Son nom » (Psaumes 68,5), fait des éloges à ceux qui « connaissent Mon nom » (Psaumes 91,14), et il y a d’innombrables autres références à Son nom.
Pourtant, dans toutes mes rencontres avec des Juifs, ils semblent faire exprès de ne pas mentionner Son nom. À la place, ils Le désignent vaguement comme « le Tout-Puissant », « le Très Haut » ou « Hachem », ce qui, ai-je compris, signifie « le nom » en hébreu.
Pourquoi les Juifs n’obéissent-ils pas à D.ieu en « proclamant et en louant Son nom » au lieu de tourner autour du pot ?
Réponse :
Vous avez vraiment mis le doigt sur quelque chose. Nous, les Juifs, évitons à l’extrême de prononcer le nom de D.ieu. (Remarquez que nous ne l’écrivons même pas normalement lorsque nous écrivons le mot français pour désigner D.ieu. Voir : Pourquoi n’écrivez-vous pas « D.ieu » correctement ?) De fait, nous veillons à ne pas prononcer les noms de D.ieu en dehors de la lecture de la Torah ou de la prière.
Notre prudence découle d’une interprétation du troisième des Dix Commandements : « Tu n’invoqueras pas le nom de l’Éternel, ton D.ieu, en vain ». Traditionnellement, ce commandement est compris comme se référant à l’usage impropre du nom de D.ieu dans un serment frivole. Cependant, c’est dans toutes les circonstances que l’on s’abstient de prononcer le nom de D.ieu, excepté dans le contexte de la prière et de l’étude de la Torah.
Selon Maïmonide, le grand codificateur juif :
« Il n’est pas seulement interdit de prononcer un faux serment, mais il est également proscrit de mentionner l’un des noms de D.ieu en vain, même sans prêter serment. Car le verset nous enjoint de “craindre Son nom glorieux et redoutable”.1 S’abstenir de ne pas le prononcer en vain fait partie de cette crainte.
Ainsi, si l’on mentionne par inadvertance le nom [de D.ieu] sans raison valable, il convient de s’empresser de le louer, de le glorifier et de le vénérer de sorte qu’il n’aura pas été mentionné en vain. Qu’est-ce que cela signifie ? Si l’on mentionne le nom de D.ieu, il convient de dire ensuite « Béni soit-Il pour l’éternité », ou bien « Il est grand et digne d’une abondance de louanges », etc., de sorte qu’il n’aura pas été [mentionné totalement] en vain.2
Compte tenu de la révérence avec laquelle nous devons aborder D.ieu et Ses noms, les versets des Prophètes qui exhortent à faire connaître le nom de D.ieu ne font pas référence à Son nom en tant que tel. Le sens de ces exhortations des prophètes est que le peuple juif doit faire savoir au monde que D.ieu existe, qu’Il est le Créateur du monde et qu’Il supervise et recrée continuellement chaque être vivant. De même, lorsque le Psalmiste évoque fréquemment le fait de louer le nom de D.ieu, cela signifie louer les œuvres merveilleuses de D.ieu.
Cela soulève une question évidente : si le Psalmiste entend que nous devrions louer D.ieu Lui-même, sans mentionner Son nom, pourquoi ne dit-il pas simplement « louez-Le », au lieu d’utiliser systématiquement l’expression « louez Son nom » ?
Cette question a été abordée par le grand maître ‘hassidique, Rabbi Chnéour Zalman de Lyadi. En substance, il explique3 que la louange est, par définition, l’expression d’un certain degré d’appréciation, qu’elle soit émotionnelle ou intellectuelle, pour la grandeur ou la beauté de l’objet de cette louange. Or, la grandeur de D.ieu Lui-même transcende totalement tout ce que l’esprit humain peut concevoir.
Notre louange de D.ieu est donc inspirée par une appréciation émotionnelle ou intellectuelle de Sa grandeur, mais uniquement telle qu’elle nous est révélée à travers Ses diverses manifestations, qui sont incarnées et décrites par les différents noms que la Torah Lui attribue. D’où l’utilisation répétée de l’expression « louez Son nom ».
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