Bien que les Juifs se soient établis en Iran il y a environ 2 700 ans, le règne du Shah (de 1941 à 1979) représente un véritable âge d’or pour eux. Sous son égide modernisatrice, la communauté juive, majoritairement de classe moyenne ou moyenne supérieure, connut une prospérité économique sans précédent. Les établissements d’enseignement juifs, les synagogues et les organisations culturelles ont prospéré.

Et puis, en 1979, tout a changé.

Des grèves et des manifestations ont paralysé le pays tandis que le Shah quittait l’Iran pour l’exil. Peu après, des guérilleros et des troupes rebelles ont porté Ruhollah Khomeini au pouvoir officiel en tant que Grand Ayatollah, le « Guide Suprême » du pays.

L’Iran, quasi du jour au lendemain, s’est transformé d’une monarchie pro-occidentale en une théocratie autoritaire et anti-occidentale. Les expressions d’animosité anti-juive se sont intensifiées. Des pamphlets menaçaient de « mort aux Juifs », alors qu’une vague de sentiment anti-israélien balayait le pays.

Dans le tumulte révolutionnaire, le Rabbi de Loubavitch prit des mesures immédiates pour sauver les jeunes Juifs iraniens, tant que c’était encore possible. Entre 1979 et 1980, des milliers d’enfants furent transportés en lieu sûr, à New York.

Je ne peux imaginer les émotions tumultueuses vécues par ces familles. Des parents consentant à laisser leurs enfants partir avec des inconnus vers un pays inconnu ; des enfants se détachant de leurs parents sans savoir quand ils se retrouveraient ni même s’ils se reverraient jamais.

Il m’est également difficile de saisir la logistique nécessaire pour accueillir soudainement un tel nombre de jeunes, pour leur trouver de la nourriture, un logement et organiser leur éducation, tout en construisant progressivement une relation de confiance avec eux.

Faisons un bond de 37 ans en avant. Nous voici en 2016, à Marina del Rey, en Californie.

C’était un dimanche après-midi, et je venais d’arriver sur la côte ouest. J’étais dans la voiture du Rav Danny Yiftah, qui me conduisait à son centre ‘Habad à Marina del Rey pour y donner une conférence destinée à sa communauté. Au fil de notre conversation, l’histoire du Rav Yiftah commença à se dévoiler.

Le Rav Yiftah faisait partie de ces enfants que le Rabbi avait sauvés d’Iran.

Il se remémorait le vol, les différents hébergements à New York, dont un moment dans un hôpital désaffecté, avant d’être finalement envoyé étudier dans une yeshiva à Los Angeles. Il évoquait les lettres qu’il envoyait à sa famille restée en Iran et les rares conversations téléphoniques qu’il avait pu avoir, toutes menées avec d’extrêmes précautions pour des raisons de sécurité. Des décennies seraient nécessaires avant qu’il puisse enfin retrouver ses parents.

J’étais assise dans la voiture, admirant le parcours courageux de cet homme humble. Mais plus que tout, je percevais en lui une force d’idéal. Bien qu’il soit doux et réservé, ce ‘hassid abrite un feu dans son cœur.

Dans la lecture de la Torah de cette semaine, nous lisons : « Le feu sur l’autel sera maintenu allumé, il ne s’éteindra pas... et le prêtre allumera du bois dessus chaque matin. » (Lév. 6,5)

Le Alshikh commente : Il y a un feu d’amour pour D.ieu qui brûle dans chaque âme. C’est le devoir du « kohen » – les guides spirituels de la génération – de découvrir et de nourrir ce feu.


La mission du Rav Yiftah aujourd’hui est d’allumer ce feu dans les âmes des jeunes et des adultes de sa communauté.

Tout comme le Rabbi le fit pour lui il y a tant d’années.