Il est bien connu que la joie et le judaïsme sont intimement liés. Par exemple, la Présence Divine ne repose que sur une personne empreinte de joie,1 et nous savons que le saint Arizal a mérité ses révélations de sagesse intérieure grâce à sa joie incroyable dans le service de D.ieu.2

Cependant, la sim’ha – la joie – est plus qu’une simple « cerise sur le gâteau » dans notre lien avec D.ieu. Elle est élément essentiel qui définit cette relation.

Considérez, par exemple, un verset vers la fin de la Torah.3 Au milieu de l’énumération des nombreuses malédictions qui s’abattront sur le peuple juif s’ils n’écoutent pas D.ieu, la Torah stipule qu’une relation avec D.ieu, si elle est dénuée de joie, n’est pas réellement considérée comme telle : « Parce que tu n’as pas servi Hachem ton D.ieu avec joie et allégresse de cœur. »

La Torah affirme qu’une relation avec D.ieu dépourvue de joie n’est pas considérée comme une relation du tout.4 Pour reprendre notre métaphore du gâteau : la joie est le four qui fait le gâteau. Vous pouvez avoir les meilleurs ingrédients du monde, mais sans four, vous n’avez pas de gâteau.

Rabbi Chnéour Zalman de Lyadi, le fondateur du ‘hassidisme ‘Habad, donne une raison très pratique de la nécessité d’une joie constante.5 Il explique que la vie doit être vue comme un combat entre deux lutteurs. Si l’un des concurrents se sent abattu ou déprimé, même s’il est physiquement plus fort, il perdra presque certainement. Pour gagner, vous avez besoin d’enthousiasme et d’excitation.6

Mais que se passe-t-il si vous traversez quelque chose qui n’est vraiment pas une expérience heureuse ? Comment êtes-vous censé être heureux quand vous ne ressentez rien de tel ?7

Explorons trois méthodes que nos sages ont données pour être heureux même lorsque les choses se corsent :

1. La joie en se concentrant sur notre connexion à D.ieu

Dans une lettre souvent citée (imprimée dans Iguéret Hakodech,8 le quatrième livre du Tanya), Rabbi Chnéour Zalman écrit que nous devons être joyeux même lorsque nous manquons de choses véritablement importantes (telles que des enfants, la santé ou des moyens de subsistance). Il explique que la véritable foi consiste à reconnaître que tout ce que D.ieu fait et donne est bon (si nous ne le voyons pas, cela signifie simplement que cela n’a pas encore été révélé9 ), et il nous engage à travailler sur nous-mêmes jusqu’à ce que les domaines dans lesquels nous manquons n’aient plus d’importance, parce que nous choisissons à la place de nous concentrer sur notre connexion avec D.ieu et le bien constant qu’Il nous accorde.

Rabbi Chnéour Zalman conclut que le but entier de la lutte était de nous amener à cet état d’esprit. Une fois que nous avons accompli cela, la lutte n’aura plus aucun but, et nous verrons alors notre situation transformée positivement.10

Notre matriarche Sarah incarnait cette approche. Sur le verset « Les années de la vie de Sarah »,11 Rachi donne un célèbre commentaire selon lequel « Tous ses jours furent également bons ». Le Rabbi, Rabbi Mena’hem Mendel Schneerson, de mémoire bénie, demande12  : Comment pouvons-nous dire que tous ses jours étaient également bons ? Comment peut-on dire que le jour où elle a donné naissance à son fils Isaac dans sa quatre-vingt-dixième année fut aussi bon que le jour où Pharaon l’a enlevée à son mari ?

Le Rabbi répond : Sarah, comme tout le monde, a vécu une vie remplie de hauts et de bas. Certains jours étaient meilleurs, d’autres plus difficiles. Mais ces défis n’étaient pas les choses qui donnaient un sens à Sarah. Ils n’étaient pas sa vie. Sa vie résidait dans sa relation avec D.ieu. Elle a fait de cette relation le point central de chaque instant de chaque jour, et ils étaient, par conséquent, tous également bons.

Le Rabbi a utilisé une métaphore13 pour illustrer cette idée : Supposons que vous découvriez que vous avez gagné cent millions de pièces d’or, mais que vous avez également perdu un sou de cuivre. Vous ne vous arrêteriez pas pour calculer que si vous soustrayez un sou de cuivre de cent millions, vous êtes toujours gagnant. Le fait que vous avez perdu un sou est complètement insignifiant !

De même, la vie est remplie de hauts et de bas, et parfois nous traversons des moments difficiles. Mais tout cela est sans importance face à la joie que nous ressentons lorsque nous savons que nous, êtres finis et mortels, avons été choisis par D.ieu et avons l’opportunité de nous connecter à Lui chaque jour.

2. La joie comme outil pour changer notre situation

Il y a une autre dimension à cette discussion : la joie n’est pas seulement quelque chose à embrasser, même dans les moments difficiles, mais quelque chose qui a réellement le pouvoir de changer notre situation.

Il existe une histoire bien connue d’un ‘hassid à qui il avait été révélé d’En Haut qu’un de ses enfants mourrait cette année-là. Il se rendit chez son rabbi pour recevoir une bénédiction, mais le rabbi indiqua que rien ne pouvait être fait. Le ‘hassid resta, désespéré, dans la synagogue de son rabbi, et finit par rester en marge pendant les hakafot (les danses de la Torah) de Sim’hat Torah, trop déprimé pour danser. Pourtant, malgré sa souffrance, il ne pouvait s’empêcher de penser qu’un Juif doit danser à Sim’hat Torah. Finalement, il rejoignit les hakafot et dansa de toute son âme. Son rabbi lui informa plus tard que le pouvoir de sa joie avait annulé le décret contre son fils.

Comme le Baal Chem Tov l’a fameusement exprimé : « Si les larmes ouvrent les portes du ciel, la joie, elle, les démolit ! »

3. La joie parce que nous avons une confiance si profonde que nous savons que tout s’arrangera

Nous avons jusqu’à présent parlé de la joie comme d’une chose à laquelle il faut adhérer en dépit de la situation ou comme d’un outil permettant de changer la situation. Mais il existe toutefois une troisième dimension : éprouver de la joie en raison même de votre situation.

En effet, un Juif ne doit pas seulement croire en D.ieu, mais avoir confiance en Lui.14 L’une des principales différences entre les deux est que la foi est une croyance abstraite que tout ce que D.ieu fait est pour le meilleur, d’une manière ou d’une autre. La confiance, cependant, est le choix actif de continuer à croire que tout s’arrangera, quelle que soit votre situation.

D.ieu répond à une telle confiance en assurant que cela sera effectivement pour le meilleur.15 Comme le célèbre Na’houm Ich Gam Zou, qui répondait à chaque situation de la vie par la phrase : « Ceci aussi sera pour le meilleur. » Sa confiance en D.ieu était si grande que chaque situation s’arrangeait effectivement pour le meilleur.

Comme le Rabbbi l’a écrit dans une lettre :

Vous avez sans doute entendu l’affirmation du Rabbi... « Le monde dit : “Si tu ne peux pas passer en dessous, tu dois passer au-dessus”, mais moi je dis : “Passe d’emblée au-dessus !” » Il en est de même dans cette situation : même si apparemment il vous faut attendre que l’état de votre santé s’améliore avant de pouvoir être ouvertement joyeux, il y a lieu de dire – en se basant sur cette citation – que vous pouvez ressentir la joie dès maintenant, bien que vous n’ayez pas encore vu l’amélioration de façon manifeste. Un tel comportement accélérera réellement cette amélioration ! Comme nous l’avons entendu de nombreuses fois des Rebbéïm : « Pense bien et ça ira bien. »

Se réjouir d’une solution qui n’a pas encore été révélée n’est pas la même chose que de compter sur un miracle (ce qui nous est explicitement dit de ne pas faire16 ), mais résulte de notre confiance totale dans la bonté de D.ieu.

Le Rabbi a également écrit :

Vous êtes sans aucun doute un croyant. Le principe numéro un de notre foi est que D.ieu dirige le monde. Et s’Il peut s’occuper de la vie de 1,5 milliard de personnes, alors vous verrez certainement dans votre propre situation l’accomplissement de la promesse : « Je t’ai fait, Je te porterai, Je te soutiendrai et Je te délivrerai. »

Donc maintenant, vous devez réfléchir : D.ieu a promis « Je te soutiendrai et te délivrerai. » Considérez ceci : est-il possible qu’un non-juif dans un pays lointain puisse avoir le pouvoir – D.ieu nous en préserve – d’empêcher D.ieu de réaliser Sa promesse ? Et ensuite, comme conclusion naturelle de ceci : D.ieu a-t-Il besoin de mon inquiétude sur la façon dont Il va gérer toutes mes affaires et résoudre tous mes problèmes, ou bien trouvera-t-Il et me montrera-t-Il la meilleure solution indépendamment de mes préoccupations ?

Ainsi, vous avez deux options :

a) Être consumé par l’inquiétude jusqu’à ce que vous voyiez l’accomplissement de la bénédiction, vous demandant si peut-être, D.ieu nous en préserve, la bénédiction ne sera pas réalisée, et ensuite, quand elle sera réalisée, être confronté à une nouvelle préoccupation : pourquoi avez-vous dû gaspiller tant d’énergie en inquiétude inutile ?

b) Rester ferme dans votre foi et votre confiance en D.ieu qu’Il vous mènera sur le bon chemin et accomplira toutes les bénédictions qu’Il vous a données. Et ensuite, quand les bénédictions seront actualisées et réalisées, vous pourrez vous dire : « Regarde comme j’ai bien géré cela ! Je ne me suis pas inquiété pour des choses qui ne le méritaient pas. »

Là où règne la Joie, il n’y a pas de ténèbres.

Dans le Hayom Yom du 15 Nissan, il y a une citation de Rabbi Chnéour Zalman de Lyadi : « Quand la guérison apporte la foi, vous amenant à dire, “Merci à D.ieu pour ma guérison”, alors vous étiez, au moins initialement, malade.

« Mais quand la foi apporte la guérison, vous n’avez jamais été malade. »

Voilà la beauté de trouver la joie dans les moments difficiles. Quand vous attendez que la situation soit (espérons-le) résolue, toute la joie du monde ne peut pas effacer l’expérience négative que vous avez eue.

Mais quand vous réagissez à chaque situation avec confiance et joie, alors chaque situation devient une raison de célébration.