Le Talmud1 nous dit que l’une des raisons pour lesquelles le peuple juif fut exilé de la Terre d’Israël et dispersé dans le monde entier est pour que des convertis vertueux puissent rejoindre nos rangs. Tout au long de l’histoire, le peuple juif s’est enrichi de nombreux convertis sincères issus de différentes nations, qui sont devenus des maîtres de la Torah et ont marqué l’histoire juive de leur empreinte. Certains de ces convertis descendaient de nos ennemis qui avaient tenté de nous détruire.
Le descendant de Sisera, Rabbi Akiva
Sisera
Environ un siècle et demi après que le peuple juif, conduit par Josué, s’installa sur la Terre d’Israël, des poches de territoire étaient restées sous le contrôle des nations cananéennes qui terrorisaient les Juifs vivant à proximité. Au nord, le roi Yavin et ses sujets attaquaient constamment les Juifs, les obligeant à s’abriter dans des villes fortifiées et à éviter les grandes routes.2
L’un des généraux du roi Yavin, le puissant Sisera, opprima le peuple juif pendant 20 ans. Cruel et arrogant, il se moquait des Juifs et de leur D.ieu.3
Sur ordre divin, la prophétesse Devorah et Barak, fils d’Abinoam, conduisirent la guerre des Juifs contre Sisera. La bataille décisive eut lieu sur les rives du Kishon, au pied du mont Tabor.4 Bien qu’en infériorité numérique, l’armée juive écrasa l’armée de Sisera. Selon la tradition, un violent coup de tonnerre désorienta les troupes de Sisera et les poussa à se frapper les unes les autres.5 Elles prirent bientôt la fuite, l’armée juive les poursuivant avec ardeur.
Comprenant qu’il serait tué dès que les Juifs le reconnaîtraient, Sisera sauta de son char et s’enfuit à pied, seul. À la recherche d’un endroit où se cacher, il courut jusqu’à une tente voisine, qui appartenait à une femme nommée Yaël.6
Lorsque Yaël vit Sisera se diriger vers sa tente, elle prit une décision qui changea le cours de l’histoire. Yaël invita Sisera à entrer, lui dit de ne pas avoir peur et lui offrit une cachette et une cruche de lait chaud.
Épuisé par ses mésaventures et détendu par le lait chaud, Sisera ne tarda pas à s’endormir. C’est le moment qu’attendait Yaël. Elle saisit un lourd piquet de tente et l’enfonça dans la tempe de Sisera, le tuant sur le coup.7
La mort de Sisera paracheva la victoire juive sur le roi Yavin, qui n’osa plus jamais importuner les Juifs.8
Rabbi Akiva
La Guemara nous apprend que les descendants de Sisera enseignèrent la Torah à Jérusalem.9 Qui étaient ces descendants ? La tradition juive nomme Rabbi Akiva, le plus grand sage de la Torah qui vécut pendant et après la destruction du Second Temple.10
Le père de Rabbi Akiva, Yossef, était un converti. Enfant, Akiva n’a pas reçu beaucoup d’éducation juive. Ce n’est qu’à l’âge de 40 ans, avec le soutien et les encouragements de sa femme Rachel, qu’il commença à étudier la Torah. Avec beaucoup de dévouement et de persévérance, il rattrapa son retard, passa à un niveau d’étude plus avancé, puis à l’enseignement.11
Rabbi Akiva rencontra de nombreuses difficultés sur le chemin de la grandeur. Ses 24 000 élèves moururent lors d’une épidémie, mais au lieu de sombrer dans le désespoir, Rabbi Akiva rassembla cinq autres élèves, qui continuèrent plus tard à enseigner et à étudier la Torah pendant cette période dangereuse.12
Alors que Rabbi Akiva était déjà un vieil homme, les dirigeants romains interdirent l’enseignement de la Torah afin de prévenir toute rébellion juive contre leur pouvoir. Ignorant le danger, Rabbi Akiva continua d’enseigner à ses élèves. Lorsqu’on lui demanda pourquoi il risquait sa vie, il donna la célèbre réponse suivante : « Tout comme les poissons ne peuvent survivre sans eau, le peuple juif ne peut survivre sans Torah. »13
Vers la fin de sa longue vie (il mourut à 120 ans), Rabbi Akiva fut arrêté pour avoir enseigné la Torah en public. Alors qu’il était torturé à mort, il consola ses disciples en leur disant qu’il était heureux de pouvoir renoncer à sa vie pour l’amour de D.ieu.14
Rabbi Akiva a laissé un héritage considérable d’enseignements de la Torah, qui sont consignés dans la Mishna et étudiés jusqu’à aujourd’hui.
Lire : Au temps de Rabbi Akiva
Les descendants de Sennachérib : Shemaya et Avtalyone
Sennachérib
Plus de 500 ans après la défaite de Sisera, un ennemi encore plus puissant menaça de détruire le peuple juif. Il s’appelait Sennachérib et régnait sur l’Assyrie, un royaume situé au nord-est de la Terre d’Israël.
À cette époque, il y avait deux royaumes juifs : le royaume de Juda au sud, où vivaient les tribus de Juda et de Benjamin, et le royaume d’Israël au nord, où vivaient les dix autres tribus. Sennachérib conquit le royaume d’Israël et exila les 10 tribus.15 Aujourd’hui encore, l’endroit où sont allées les 10 tribus reste le plus grand mystère de l’histoire juive.
Lire : Où sont les 10 tribus perdues ?
Dans son ambition de conquérir le reste du monde, Sennachérib assiégea Jérusalem, alors gouvernée par le roi Ézéchias de Judée.
En infériorité numérique, les Juifs se préparèrent à la guerre et prièrent. Par l’intermédiaire du prophète Isaïe, ils reçurent un message de D.ieu selon lequel Sennachérib et son armée n’entreront pas dans Jérusalem mais rebrousseront chemin.16
Ce qui se passa ensuite fut un miracle flagrant. Le Livre des Rois nous dit : « Cette nuit-là, un ange de D.ieu sortit et frappa 185 000 soldats dans le camp assyrien ; le lendemain matin, ils étaient tous morts. » Les Juifs de Jérusalem furent sauvés sans qu’aucune flèche n’ait été tirée !17
Le roi Sennachérib lui-même ne fut pas tué par l’ange. Il s’échappa et retourna en Assyrie, où il fut assassiné par ses propres fils.18
Shemaya et Avtalyone
Plusieurs siècles plus tard, à l’époque du Second Temple, certains descendants du roi Sennachérib se convertirent au judaïsme, parmi lesquels Shemaya et Avtalyone.19 On ne sait pas grand-chose de leurs débuts, mais à un moment donné au cours du 1er siècle avant l’ère commune, Shemaya devint le nassi – le chef spirituel du peuple juif, tandis qu’Avtalyone devint le chef du tribunal rabbinique, un poste d’une importance similaire.20
Shemaya et Avtalyone étaient aimés du peuple juif. Un contemporain les décrit comme « les deux grands [chefs] de la génération, Shemaya et Avtalyone, qui sont de grands érudits et de grands interprètes [de la Torah] ».21
Le respect des Juifs pour Shemaya et Avtalyone est illustré par une histoire talmudique.22 Une année, à la fin de Yom Kippour, une foule escortait le grand prêtre à sa sortie du Temple, comme c’était la coutume. Mais lorsque les gens aperçurent Shemaya et Avtalyone à proximité, ils quittèrent le grand prêtre et suivirent Shemaya et Avtalyone.
Le grand prêtre, qui n’était manifestement pas la personne la plus humble de l’histoire, s’en offusqua. Lorsque les deux Sages s’approchèrent de lui, il les salua en disant : « Que les descendants d’étrangers aillent en paix ». Cette allusion à l’ascendance de Shemaya et d’Avtalyone, issus des ennemis des Juifs, se voulait une insulte. Cependant, les deux Sages n’avaient pas honte de leurs origines. Ils répondirent : « Que les descendants d’étrangers aillent en paix, eux qui ont accompli les actes d’Aaron [en référence à la réputation d’Aaron en matière de paix et de bonté], et que le descendant d’Aaron [en référence au grand prêtre] aille en paix, lui qui n’accomplit pas les actes d’Aaron. »
Le descendant de Néron, Rabbi Méir
Néron
Néron fut l’empereur romain de 54 à 68 de l’ère commune. L’opinion communément admise est qu’en l’an 68, Néron s’est suicidé sous l’effet de pressions politiques. Cependant, même à cette époque, tout le monde ne croyait pas que Néron fut mort. Peu après sa mort présumée, une rumeur se répandit selon laquelle il était encore en vie. Au moins trois imposteurs réussirent à convaincre certains Romains qu’ils étaient l’empereur Néron lui-même.
Le Talmud23 raconte différemment ce que fut le destin de Néron. Soupçonnant les Juifs de préparer une révolte contre les Romains, Néron se rendit en Terre d’Israël. Là, il chercha un signe d’en haut qui lui indiquerait s’il devait ou non attaquer les Juifs. Néron décocha une flèche vers l’est, qui atterrit à Jérusalem. Il tira ensuite une flèche vers l’ouest, qui atterrit également à Jérusalem. Il en fut de même pour les flèches tirées vers le nord et le sud.
Néron essaya un autre signe. Il arrêta un enfant juif et lui demanda quel verset il avait appris ce jour-là. L’enfant répondit par le verset d’Ézéchiel : « Je me vengerai d’Édom (l’ancêtre de Rome) par la main de mon peuple d’Israël ».24
Les signes étaient clairs et Néron prit peur. « Le Saint, béni soit-il, veut détruire Son Temple et Il veut s’essuyer les mains sur moi », dit-il. Néron comprit que si lui, descendant d’Édom, poursuivait son projet d’attaquer les Juifs et de détruire le Temple, bien qu’il accomplît le plan de D.ieu, il finirait par encourir Sa vengeance. Il s’échappa et se convertit au judaïsme. Rabbi Méir fut l’un de ses descendants.25
Rabbi Méir
Rabbi Méir fut l’un des cinq disciples avec lesquels Rabbi Akiva rebâtit l’érudition juive après l’épidémie dévastatrice mentionnée plus haut.26 Le Talmud atteste que D.ieu lui-même sait qu’aucun sage de son époque ne l’égalait.27
Pendant la période de persécution romaine, Rabbi Méir risqua sa vie pour recevoir son ordination rabbinique et fut ensuite contraint de fuir la Terre d’Israël.28
Des années plus tard, lorsque les persécutions s’apaisèrent, il revint et fut nommé ‘Hakham – un poste élevé au sein de la Cour Suprême juive.29 Scribe de profession, Rabbi Méir devint un enseignant de la Torah très apprécié, capable de transmettre des messages puissants par le biais de paraboles. Il était connu comme un homme humble, compatissant et saint. Malgré les épreuves et les tragédies qu’il connut, comme la mort soudaine de ses deux fils,30 Rabbi Méir demeura positif, optimiste et engagé dans l’enseignement de la Torah. Il est l’un des érudits les plus fréquemment cités dans la Michna.
Rabbi Méir était marié à Berouria, qui était elle-même une érudite. Le père de Berouria, Rabbi ‘Hananya ben Teradyone, fut cruellement exécuté par les Romains pour avoir enseigné la Torah. Les Romains s’emparèrent également de la sœur de Berouria et la placèrent dans une maison close. Berouria supplia son mari de sauver sa sœur.
Rabbi Méir corrompit l’un des gardes de la maison close et libéra sa belle-sœur. Lorsque le garde demanda à Rabbi Méir ce qu’il devait faire si ses supérieurs découvraient qu’il avait laissé partir une femme juive, Rabbi Méir lui dit de les soudoyer à leur tour.
« Et si l’argent vient à manquer ? », demanda le garde.
« Crie alors : “D.ieu de Méir, réponds-moi !” et tu seras sauvé », répondit Rabbi Méir.
Et c’est ce qui arriva. Le garde fut arrêté et condamné à la potence. Sur le point d’être pendu, il s’écria : « D.ieu de Méir, réponds-moi ». La corde cassa et le garde eut la vie sauve.31
Depuis lors, Rabbi Méir est connu sous le nom de Baal Hanès – « faiseur de miracles ».
Lire : Rabbi Méir
À notre époque
Les histoires de descendants de nos ennemis qui deviennent des enseignants de la Torah ne se limitent pas à l’histoire ancienne. Aujourd’hui encore, il y a des convertis, vivant en Israël, dont les parents ou les grands-parents étaient des nazis. Ces convertis ont dénoncé l’antisémitisme de leurs ancêtres et ont décidé de rejoindre le peuple juif et de consacrer leur vie à l’étude et à l’enseignement de la Torah.
La Torah32 nous apprend à aimer les convertis. Les convertis cités plus haut, ainsi que de nombreux autres, ont apporté une contribution éternelle au judaïsme et méritent notre immense reconnaissance.
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