Le plus élevé des cinq mondes est appelé « Adam Kadmone ». « Adam » signifie « à la ressemblance de » ou « à l’image de », et vient du mot hébreu domé. « Kadmone » signifie « primordial » ou « primaire », de la racine hébraïque kadam. Ainsi, Adam Kadmone est le monde primordial qui est « à la ressemblance » de la Lumière Infinie qui l’a précédé et qui fut occultée dans le processus de création. Cela signifie que même si Adam Kadmone est un monde, c’est-à-dire qu’il naît grâce à l’occultation de la Lumière Infinie, il s’agit d’un niveau de réalité si élevé qu’il est « à la ressemblance » de la Lumière Infinie (qui, par nature, « précède » le monde d’Adam Kadmone).

Adam Kadmone... reflète la Lumière Infinie originelle...

Ainsi, bien que le monde d’Adam Kadmone soit un monde, il s’agit d’un niveau si sublime, pur et transcendant qu’il est presque imperceptible. Il s’attache à la Lumière Infinie originelle et la reflète.

Dans la Kabbale, le monde d’Adam Kadmone représente la volonté transcendante de D.ieu. Le désir de D.ieu pour la Création et la manière dont il se manifeste sont planifiés dans une vision globale de la Création, sans séparation en détails spécifiques. C’est ce qu’on appelle la ma’hchava kedouma, ou « pensée primordiale » d’Adam Kadmone. La pensée primordiale joue le rôle de plan de toute la Création.

Dans le monde d’Adam Kadmone, tout est considéré dans large une vue d’ensemble, mais les détails précis ne sont pas encore distingués et ordonnés dans les catégories de la réalité. Tous les détails de la création, du début de l’espace à la fin de l’espace et du début du temps à la fin du temps, sont superposés dans cette seule pensée, car dans Adam Kadmone, il n’y a aucune notion d’espace et de temps. Il n’y a pas encore d’intérieur et d’extérieur, de haut et de bas, d’avant et d’après. Il n’y a qu’un potentiel pour ces limitations. Tout est indéfini, unifié et simultané. C’est là que se trouvent la racine et la source de tous les autres plans de la réalité, qui descendent d’Adam Kadmone.

Lorsque la lumière descend d’Adam Kadmone, elle se divise en dix qualités individuelles...

Il est clair que les niveaux ultérieurs de la Création, c’est-à-dire la série de mondes qui descendent de Adam Kadmone, en particulier le monde le plus bas, ne peuvent pas exister dans les paramètres de l’existence d’Adam Kadmone. Tout dans Adam Kadmone est indéfini, unifié et simultané, superposé en une seule pensée primordiale, ce qui contredit l’idée même de mondes au sens où nous l’entendons, en tant qu’existences limitées qui présupposent la séparation et la division. Subjectivement, en termes de conscience de D.ieu, le monde d’Adam Kadmone correspond à la plus haute source de conscience de l’homme. C’est la conscience de l’unité totale avec la Lumière Infinie.

La première étape de la séparation et de la division nécessaires à la création des mondes inférieurs consiste à « briser » l’unité de la lumière telle qu’elle se trouve dans Adam Kadmone. Lorsque la lumière descend d’Adam Kadmone, elle se divise en dix qualités ou attributs individuels (sefirot, pluriel de sefira), qui agissent comme des points de lumière distincts et indépendants. Chacun de ces points est une concentration extrêmement puissante de la lumière qui descend d’Adam Kadmone. On les appelle les sefirot de Tohou, terme qui signifie « chaos » ou « désordre ». Le monde de Tohou n’est pas inclus dans le schéma des cinq mondes mentionné précédemment, en vertu du fait qu’il s’est brisé et qu’il n’existe pas en tant que plan stable de la réalité.

Les Sefirot de Tohou

Il sera expliqué plus loin que les sefirot constituent généralement la structure interne de chacun des mondes, un peu comme les os donnent forme au corps ; cependant, dans Tohou (« chaos » en hébreu), c’est précisément ce qui est absent. Les sefirot de Tohou sont absolument indépendantes les unes des autres et n’ont aucune relation entre elles. Il n’y a donc ni ordre ni structure. De plus, chaque sefira de Tohou est la manifestation d’un seul aspect absolu et quintessentiel de la lumière d’Adam Kadmone, et n’interagit donc pas avec les autres sefirot, puisqu’elles n’ont rien en commun.

Une conséquence de ce manque d’interaction est qu’aucune des sefirot de Tohou n’est capable de limiter l’activité et l’expansion d’aucune des autres sefirot à un niveau où toutes les sefirot peuvent fonctionner ensemble. Par conséquent, aucune des sefirot ne peut supporter l’activité d’aucune des autres sefirot. Il en résulte une désintégration, ou un « éclatement » des sefirot de Tohou.

La séparation provoquée par l’éclatement de Tohou est rectifiée dans le Tikoun...

Les Écritures font allusion à ce processus en décrivant les rois successifs d’Édom :

« Voici les rois qui ont régné sur le pays d’Édom avant qu’aucun roi n’ait régné sur les Israélites [qui représentent la rectification de Tohou, comme nous l’expliquerons bientôt]. Béla, fils de Béor, devint roi... il mourut et Yoav lui succéda... Yoav mourut et ‘Houcham lui succéda... » (Gen. 36,31-39).

Rabbi Its’hak Louria explique que cela fait référence aux sefirot de Tohou, chacune d’entre elles régnant de manière exclusive, puis se brisant et « mourant ».

Néanmoins, l’éclatement des sefirot de Tohou n’est pas une coïncidence et ne signifie pas non plus une faille dans le processus créatif. Au contraire, il sert un objectif très spécifique et important : créer un état de séparation ou de compartimentage de la lumière en qualités et attributs distincts et introduire ainsi la diversité dans la création.

Cependant, comme le but ultime de la création n’est pas de rester dans un état de séparation et de diversité, mais plutôt de parvenir à l’unité et à l’harmonie, la séparation provoquée par l’éclatement du Tohou est rectifiée dans le Tikoun, qui signifie « rectification », « restitution » ou « reformation ». Tikoun signifie la synthèse et la réunification de la diversité et de la fragmentation introduites par l’éclatement des réceptacles de Tohou.

La nature et les spécificités de la rectification qui a lieu dans le Tikoun seront discutées plus en détail dans un prochain article.