Le grand sage, philosophe et médecin, Rabbi Moché ben Maïmone, plus connu sous le nom de Maïmonide, a vécu à Fès, au Maroc, après avoir été exilé d’Espagne suite à la conquête de Cordoue par les Almohades en 1148. Des rabbins sont revenus dans cette ville dans le cadre d’une conférence rabbinique historique à Casablanca cette semaine, probablement le plus grand rassemblement de dirigeants rabbiniques à Fès depuis l’époque de Maïmonide. Ils étaient là pour célébrer la conclusion du dernier chapitre de l’œuvre maîtresse de Maïmonide, le Michné Torah, dont le cycle d’étude s’est achevé dans le monde entier il y a quelques semaines.

Les rabbins présents à la conférence représentaient des communautés juives relativement petites de 40 pays, de l’Afrique au Moyen-Orient, ainsi que des communautés juives européennes également assez petites telles que Bucarest en Roumanie et Dublin en Irlande, parmi des dizaines d’autres. La conférence a également attiré des participants de pays à majorité musulmane, dont la Turquie, les Émirats arabes unis, le Maroc et le Nigeria.

La conférence s’est tenue près de 75 ans après la fondation du mouvement ‘Habad au Maroc en 1950, lorsque le Rabbi de Loubavitch, de mémoire bénie, a envoyé le Rav Michoel Lipsker au Maroc, à la demande de son beau-père et prédécesseur, Rabbi Yossef Its’hak Schneersohn, de mémoire bénie, où lui et son épouse ont servi la communauté juive historique et ont établi une yeshiva à Meknès.

Quelques mois plus tard, ils furent rejoints par le Rav Shlomo et Pessia Matusof, qui ont dirigé les activités de ‘Habad à Casablanca. Au fil des ans, ils furent rejoints par plusieurs autres couples rabbiniques ‘Habad, dont le rabbin Nissan et Rachel Pinson à Casablanca en 1953. Ceux-ci furent ensuite affectés en Tunisie, où Rachel Pinson, âgée de 95 ans, dirige encore aujourd’hui ‘Habad-Loubavitch de Tunisie.

Les premiers émissaires marocains, des jeunes hommes et femmes parlant le yiddish, dont beaucoup avaient survécu à la Russie stalinienne, étaient issus d’une culture et d’un milieu très différents de ceux des Juifs marocains séfarades, francophones et arabophones. Pourtant, ils ont créé et dirigé des externats pour garçons et filles, des yeshivas et des séminaires pour former la prochaine génération de dirigeants, dont certains ont ensuite dirigé des communautés juives marocaines au Maroc et dans le monde entier.

Aujourd’hui, de nombreux enfants de ces émissaires servent d’émissaires ‘Habad dans le monde entier, souvent dans les communautés de la diaspora marocaine, comme le Rav Mendel Raskin, qui dirige le centre ‘Habad de Côte-Saint-Luc à Montréal.

Des rabbins célèbrent l’achèvement du Michné Torah de Maïmonide dans la ville où il a étudié et écrit après avoir fui l’Espagne. - Photo: Avi Winner/Merkos 30
Des rabbins célèbrent l’achèvement du Michné Torah de Maïmonide dans la ville où il a étudié et écrit après avoir fui l’Espagne.
Photo: Avi Winner/Merkos 30

Une résurgence de la vie juive

Servant d’interprète pour ‘Habad.org lors de l’événement, le Rav Raskin a rejoint Ra’hamim Azuelos, un habitant de Fès dont la famille est installée dans la ville depuis qu’elle a été exilée d’Espagne il y a quelque 500 ans. M. Azuelos se souvient avoir rencontré le père du Rav Raskin, le Rav Yehouda Leib Raskin de Casablanca, à Fès, lors de la cérémonie de clôture du premier cycle d’étude du Michné Torah en 1985. En discutant, ils ont découvert que le jeune Raskin avait été le moniteur du fils de M. Azuelos au centre aéré ‘Habad de Fès 40 ans plus tôt.

« Qu’un tel événement se produise au Maroc est extraordinaire », a déclaré M. Azuelos à ‘Habad.org. « En Amérique, c’est normal, mais pas ici au Maroc. »

Le Rav Levi Banon salue les dignitaires marocains. - Photo par Avi Winner/Merkos 302
Le Rav Levi Banon salue les dignitaires marocains.
Photo par Avi Winner/Merkos 302

Henri Cohen, qui vit à Fès depuis 54 ans, a fait remarquer qu’il avait rencontré ‘Habad pour la première fois dans son enfance à Sefrou, une ville proche de Fès. Aujourd’hui, Henri Cohen est l’un des 40 juifs qui vivent à Fès, contre 27 000 à l’époque où lui et Ra’hamim Azuelos grandissaient. Il entretient les cimetières de Sefrou, où il est né, et de Fès. « Nous sommes très heureux que les émissaires de ‘Habad soient venus. Aujourd’hui, j’ai rencontré mon cousin ici à Fès lors de la conférence. C’est le rabbin ‘Habad de Marrakech [Rav Chimone Lahiany]. Je n’avais jamais entendu parler de lui auparavant. Sa grand-mère et ma mère étaient sœurs ».

La conférence a été organisée par le Rav Levi Banon, né au Maroc, et son épouse ‘Hana, née aux États-Unis, qui sont les émissaires de ‘Habad-Loubavitch du Maroc depuis 2009, lorsque Mme Raizel Raskin, directrice de ‘Habad-Loubavitch du Maroc, les a nommés pour diriger la prochaine génération de juifs marocains.

Les émissaires féminines ont rejoint leurs maris à la conférence. - Photo par Avi Winner/Merkos 302
Les émissaires féminines ont rejoint leurs maris à la conférence.
Photo par Avi Winner/Merkos 302

Tout au long des trois jours qu’a duré la conférence, les émissaires ont discuté des opportunités et des défis liés au fait de servir des communautés ayant un accès limité aux éléments de base de la vie juive, qu’il s’agisse de nourriture casher, de mikvés ou d’écoles juives.

Les rabbins et leurs familles ont été accueillis à la conférence par le Rav David Banon de Montréal, éminent rabbin de la diaspora juive marocaine, qui a récité la bénédiction traditionnelle pour le monarque du pays, le roi Mohammed VI.

La conférence comprenait des présentations et des réunions avec M. Serge Bardugo, président des communautés juives du Maroc, et les membres du tribunal rabbinique du Maroc.

Au cours de la dernière décennie, la présence de ‘Habad s’est étendue dans cet hémisphère, avec la création de centres en Angola, aux îles Canaries, au Ghana, en Islande, en Côte d’Ivoire, à Malte, au Monténégro, au Rwanda, en Ouganda, dans les Émirats Arabes Unis et en Zambie.

Rav Mendy Chitrik et Rav David Banon - Photo par Avi Winner/Merkos 302
Rav Mendy Chitrik et Rav David Banon
Photo par Avi Winner/Merkos 302

« Le choix du Maroc comme lieu de la conférence de cette année souligne l’engagement permanent de ‘Habad en faveur de la vie juive au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, en particulier dans les communautés à faible population juive », a déclaré le Rav Moshé Kotlarsky, vice-président de Merkos L’Inyonei Chinuch, la branche éducative du mouvement ‘Habad-Loubavitch. « C’est grâce à la vision du Rabbi que ‘Habad est aujourd’hui le mouvement juif le plus dynamique, avec des émissaires dévoués qui donnent beaucoup d’eux-mêmes pour le bien des autres. »

Le Rav Mendy Chitrik, émissaire de ‘Habad-Loubavitch à Istanbul (Turquie), rabbin de la communauté ashkénaze d’Istanbul et président de l’Alliance des Rabbins des Pays Musulmans, vient de rentrer d’une visite à Djerba (Tunisie), où il s’était rendu immédiatement après l’attentat contre la communauté juive de Djerba le jour de Lag BaOmer, l’un des rares rabbins à s’être rendu sur place et à avoir renforcé la communauté. « Le fait que des rabbins se réunissent dans un pays musulman pour renforcer la vie juive est un signe important de l’avenir de la vie juive dans la région. »

La plupart des quelque 60 émissaires de ‘Habad-Loubavitch qui se sont réunis à Casablanca.
La plupart des quelque 60 émissaires de ‘Habad-Loubavitch qui se sont réunis à Casablanca.