Maké bepatich signifie littéralement « donner le coup de marteau [final] ». Les touches finales d’un artisan perfectionnent l’objet et le rendent complet ; de même, la melakha de maké bepatich inclut toute activité qui achève la fabrication de quelque chose.1

Contrairement à d’autres melakhot qui impliquent des tâches réelles, l’interdiction de maké bepatich peut être transgressée par le simple fait de mettre une touche finale à un long processus. De plus, alors que la plupart des melakhot sont associées à un ensemble particulier d’activités, maké bepatich est beaucoup plus large :  il s’agit simplement de l’acte d’achever quelque chose, quelle qu’elle soit. Par exemple, la plupart des applications de la melakha de bichoul (cuisine) impliquent des activités liées à la préparation de la nourriture, et il est rare de la rencontrer autrement le jour du Chabbat. En revanche, maké bepatich peut apparaître un peu partout : lors de la préparation des aliments,2 en pliant des vêtements ou en déchirant un morceau d’essuie-tout.

Maké Bepatich dans le Mishkane

Les murs du Mishkane étaient faits de planches recouvertes d’une fine couche d’or qui était clouée aux planches avec une précision parfaite. Cet acte est une source possible. Un autre acte de maké bepatich dans le Mishkane consistait à redresser les outils ou les ustensiles qui avaient été déformés pour les rendre à nouveau utilisables.

La relation entre le Maké Bepatich et les autres Melakhot

Apparemment, chaque melakha accomplit quelque chose. Le labourage crée un champ labouré. L’écriture forme des lettres et des mots complets. Cuire transforme quelque chose de cru en aliment comestible. Il est donc évident que chaque melakha devrait impliquer un maké bepatich en plus de sa propre interdiction. Rabbi Mena’hem Méiri,3 un grand talmudiste du XIIIe siècle, propose une explication perspicace : si le processus d’une melakha est continu, maké bepatich n’entre pas dans l’équation. Par exemple, l’aiguisage d’un couteau le Chabbat est considéré comme maké bepatich.4  Or, la fabrication d’un couteau comporte de nombreuses étapes, dont de nombreuses melakhot. Une fois que toutes ces melakhot sont effectuées et que le couteau est entièrement formé mais émoussé, l’affûtage de la lame, qui n’implique aucune autre melakha, constitue un maké bepatich.

Le Talmud mentionne maké bepatich dans plusieurs scénarios, ce qui nous donne une indication de sa large portée :

1) Rendre quelque chose utilisable

Le Talmud5 stipule que celui qui pratique une ouverture pour le cou sur une chemise inachevée le jour de Chabbat, en coupant le tissu et les fils qui la maintenaient fermée, a transgressé l’interdiction de maké bepatich.

En créant l’ouverture, il rend la chemise propre à être portée, façonnant ainsi quelque chose le Chabbat. Cette forme de maké bepatich implique de prendre quelque chose qui ne peut être utilisé dans sa forme actuelle et d’accomplir quelque chose pour le rendre utilisable.

(Il est intéressant de noter que certains placent l’utilisation de l’électricité le jour du Chabbat dans cette catégorie. Lorsqu’un appareil électrique n’est pas connecté à une source d’électricité, toutes les pièces sont là, mais elles ne remplissent aucune fonction. Lorsque l’on appuie sur l’interrupteur et que l’on ferme le circuit, permettant ainsi au courant de circuler dans la machine, on rend la machine utile, ce qui est une forme de maké bepatich.6 )

2) Perfectionner quelque chose

Le Talmud7 dit que le fait d’enlever les fils saillants et irréguliers d’un vêtement transgresse la melakha de maké bepatich. Cela ne s’applique que si la personne est exigeante et ne portera pas le vêtement tant que tous les fils qui dépassent n’ont pas été enlevés.

Dans ce cas, le vêtement pourrait être porté sans enlever les fils qui dépassent ; cependant, puisque la personne est exigeante, le fait de les enlever perfectionne le vêtement, le rendant effectivement utilisable.

3) Créer quelque chose de nouveau

Le Talmud8 déclare qu’il n’est pas permis de placer pour la première fois le rembourrage dans un oreiller ou un coussin le jour du Chabbat, car cela crée un nouvel article, ce qui transgresse l’interdiction de maké bepatich.

En effet, il y avait au départ le rembourrage d’un côté et l’enveloppe de tissu vide de l’autre, mais il n’y avait pas d’oreiller. En introduisant le rembourrage à l’intérieur de l’enveloppe de tissu pour la première fois, on a créé une nouvelle entité : un oreiller.

4) Réparer quelque chose

Le Talmud9 enseigne que si la corde d’une harpe se rompt le jour de Chabbat, il est interdit de mettre une autre corde à sa place en vertu de l’interdiction de maké bepatich.

Lorsque la corde de la harpe se casse, la harpe n’est plus fonctionnelle. En plaçant une nouvelle corde, on la restaure et on la rend de nouveau complète.

Interdictions rabbiniques associées au Maké Bepatich

Les Sages ont interdit un certain nombre d’activités le Chabbat en raison de leur ressemblance avec la melakha de maké bepatich, ou pour éviter qu’on en vienne à transgresser celle-ci :

Plier les vêtements

Il ne faut pas plier les vêtements, les nappes ou un talith de la manière habituelle et précise, sauf si l’on a l’intention de les utiliser à nouveau le Chabbat.10 Les plier correctement empêche tout froissement potentiel et améliore leur apparence, ce qui ressemble à maké bepatich. On peut toutefois les plier d’une manière inhabituelle. Cela peut s’avérer utile lorsque le linge (qui a été étendu avant Chabbat) sèche pendant Chabbat et doit être rangé.11

Immerger de nouveaux récipients

La loi juive exige que la vaisselle et les ustensiles de cuisine neufs soient immergés dans un mikvé. Puisqu’il s’agit de l’étape finale avant de pouvoir utiliser ces objets, cette opération s’apparente à maké bepatich dans la mesure où elle complète l’objet et le rend apte à être utilisé. C’est pourquoi il est interdit d’immerger au mikvé de nouveaux ustensiles le jour du Chabbat.12

Jouer d’un instrument de musique

Il est interdit de produire des sons musicaux le Chabbat, de peur qu’on en vienne à réparer l’instrument, ce qui constitue une transgression de maké bepatich.13 Ce décret a une portée très large et peut inclure la production de sons musicaux même si un instrument n’est pas utilisé.14

Activités courantes à éviter :

  • Jouer d’une guitare, taper sur un bongo ou jouer du piano.
  • Remettre en forme une monture de lunettes ou replacer un verre dans la monture.15
  • Gonfler un matelas pneumatique neuf.16
  • Déchirer un morceau d’essuie-tout d’un rouleau, même loin de la ligne perforée.17
  • Insérer un lacet dans une nouvelle18  chaussure.19