Par la grâce de D.ieu
25 Chevat 5746 [4 février 1986]
Brooklyn, N. Y

Salutations et bénédictions :

J’accuse réception de votre lettre du 26 janvier, dans laquelle vous parlez d’un problème sérieux.

Comme vous l’avez demandé, je vous évoquerai en prière pour la réalisation des désirs de votre cœur pour le bien.

Bien que toutes les bénédictions viennent de HaChem, il est attendu d’un Juif qu’il fasse ce qui est nécessaire dans l’ordre naturel. En ce qui concerne ledit problème, vous savez sûrement qu’il existe des médecins et des psychiatres qui le traitent et qui ont réussi dans de nombreux cas. Je connais un certain nombre de cas de personnes qui avaient ce problème mais qui l’ont finalement surmonté, se sont mariées et ont fondé une famille.

À ce sujet, j’aimerais dissiper une idée fausse qui a entraîné certaines personnes dans la confusion et des conclusions erronées. Cette idée fausse provient de l’argument selon lequel, puisque certains individus sont nés avec ce problème, il doit s’agir d’une chose « naturelle » qui ne peut donc pas être désignée comme un mal, ou un péché, et il n’est donc pas nécessaire de faire quoi que ce soit pour la changer, ou en tout cas, ce n’est pas du tout un problème sérieux.

Cette approche est totalement dénuée de fondement, comme en témoigne le fait que la Torah (appelée Torath ‘Haïm et Torath Emeth : parce qu’elle est notre véritable guide dans la vie quotidienne) déclare que le fait de s’y adonner, ou même de s’y attarder mentalement, constitue une grave transgression du commandement d’HaChem. Il est donc également clair que le problème est contrôlable, car s’il échappait au contrôle de l’homme, HaChem n’en aurait pas fait un péché.

Le fait que le problème puisse être en grande partie congénital ne change rien à la situation. Chaque jour, des enfants naissent avec des natures particulières et des tendances ou des pulsions innées, certaines bonnes, d’autres mauvaises. C’est pourquoi les êtres humains doivent être formés et éduqués, de manière à développer et à renforcer les caractéristiques positives et à éliminer les mauvaises. Le Créateur a doté l’être humain de la capacité d’améliorer, voire de modifier, ses caractéristiques « naturelles » (c’est-à-dire innées). La kleptomanie en est un bon exemple. Il est généralement admis que la kleptomanie est une pulsion très compulsive. Mais personne ne suggérera que, parce que c’est probablement inné et qu’il est extrêmement difficile d’y résister, il faut dire au kleptomane qu’il peut voler, ou qu’il ne peut ou ne doit rien y faire, etc. Il en va de même pour celui qui naît avec la propension à détruire des choses, ou avec une nature querelleuse ou agressive, ou avec un penchant à tricher ou à mentir, ou tout autre trait inné considéré comme répréhensible. Aucune société normale ne déclarerait que, puisque quelqu’un est né de cette façon, il devrait être autorisé à vivre sa vie selon ses désirs et ses tendances naturels. Une telle attitude n’aide ni l’individu ni la société. Au contraire, tout devrait être, et est, fait pour aider les personnes à surmonter leurs problèmes neurologiques, quels qu’ils soient.

Il va sans dire que la personne qui souffre de ce problème ou d’autres problèmes neurologiques peut se demander : « Pourquoi HaChem a-t-il créé une telle inclination compulsive, qui est en contradiction directe avec Son code moral ? Pourquoi m’a-t-il affligé, moi qui désire me conformer pleinement à Ses commandements ? »

Aucun être humain ne peut répondre à de telles questions, auxquelles seul HaChem, le Créateur, peut répondre. Une observation que l’on peut suggérer en relation avec la question « Pourquoi moi ? » est la suivante : si un individu vit une situation particulièrement difficile, ou éprouvante, on peut supposer qu’HaChem lui a donné des capacités extraordinaires pour surmonter cette extraordinaire difficulté. L’individu concerné n’est probablement pas conscient de sa véritable force intérieure ; l’épreuve peut donc être conçue dans le seul but de faire ressortir chez l’individu sa force cachée, qui, après avoir surmonté son problème, pourra désormais être ajoutée à l’arsenal de ses capacités révélées, afin d’utiliser les deux pour des réalisations infiniment plus grandes, pour son propre bénéfice et celui des autres.

Maïmonide, le « Guide des Perplexes » de sa génération et de toutes les générations suivantes, qui fut également acclamé comme le plus grand médecin de son temps, déclare dans un passage bien connu, dans son célèbre code, le Michné Torah (Yad Ha’hazaka) : « Chaque personne a l’option (le pouvoir), si elle le désire, de se diriger pour ne faire que le bien et être un Tsadik, ou, si elle le choisit, de suivre le mauvais chemin et être un Racha. Ne pensez jamais qu’une personne est prédestinée dès la naissance à être un Tsadik ou un Racha. Il n’y a pas non plus de contrainte intérieure à faire un choix, mais on a la capacité de choisir le bon comportement, et c’est entièrement une question de volonté et de détermination propres » (traduction libre de Hil. Techouva, ch. 5, ou le sujet est traité en détail).

Une dernière remarque du point de vue scientifique : dire que l’esprit humain et le système neuronal sont d’une complexité inimaginable revient à dire l’évidence. Seul le Créateur connaît Son œuvre. Mais le Créateur a doté l’esprit humain de merveilleuses qualités qui lui permettent de sonder les mystères de la nature, de faire des recherches et des expériences et d’acquérir sans cesse de nouvelles connaissances sur lui-même et sur ses capacités physiques et mentales. Des progrès considérables ont été réalisés par les scientifiques dans leurs études sur les cellules et les hormones du cerveau. Il est désormais évident qu’un large éventail d’émotions et de sensations humaines peut être stimulé artificiellement à l’aide de techniques électroniques et biochimiques. Il est maintenant généralement admis que la plupart, sinon la totalité, des troubles neurologiques, y compris les comportements sexuels déviants, proviennent probablement de déficiences ou d’irrégularités chimiques (hormones) pendant la période de jeunesse. Certains troubles neurologiques sont déjà traités avec succès dans certains domaines impliquant le système neuronal, et il faut espérer que la gamme s’élargira et finira par inclure tout le spectre des troubles neurologiques, tant des individus que des nations.

En attendant, nous ne pouvons que mettre notre confiance en HaChem, et renforcer notre adhésion à la Torah et aux Mitsvot, dont il est écrit « Elles sont notre vie et la longueur de nos jours ».

Avec bénédiction,