Question :

Je comprends que la Torah nous dit qu’il y a une mitsva de sonner d’une corne à Roch Hachana, mais pourquoi est-ce spécifiquement une corne de bélier ? S’agit-il d’une mitsva ou d’une simple tradition ?

Réponse :

Le Talmud nous dit que pour qu’une corne soit valable pour sonner à Roch Hachana, elle doit être un choffar.1 Mais qu’est-ce qu’un choffar ?

Il faut qu’il soit creux

Dans la Bible, nous trouvons deux mots qui sont communément traduits par « corne » : kerèn (קרן) et choffar (שופר). Kerèn (le grand-oncle étymologique du mot français « corne » et du mot anglais « corner » [« coin »]) désigne toute corne d’animal. Le Choffar, en revanche, fait référence à un type de corne très spécifique.2

Il existe deux types généraux de cornes d’animaux. Celle des moutons, des chèvres et d’autres animaux sont constituées d’une gaine de kératine (la matière dont sont faits les ongles) recouvrant un centre osseux. Ce dernier peut facilement être retiré, et il reste alors la gaine de kératine, qui forme une structure naturellement creuse pouvant être utilisée pour produire des notes de musique.

D’autres animaux, comme le cerf ou la girafe, ont des cornes ou des bois constitués d’un matériau solide. Ceux-ci peuvent également être transformés en corne pour souffler en perçant un trou à travers la corne.

Le mot choffar est linguistiquement lié à chefoféret, un tube ou un roseau naturellement creux. Ainsi, seul le premier type de corne est appelé choffar, et les cornes pleines sont exclues.3

Le bétail est également exclu

Pour chaque règle, il y a une exception. Bien que les bœufs et les vaches aient des cornes qui puissent être creusées, nous constatons néanmoins que la Torah ne fait référence aux cornes de ces animaux que comme kerèn et jamais comme choffar. Par conséquent, elles ne sont pas non plus des choffars et on ne peut pas en souffler le jour de Roch Hachana.4

Il y a également une raison plus profonde à cela : Il existe un dicton talmudique selon lequel « un accusateur ne peut pas servir de défenseur ». Le jour de Roch Hachana, nous sommes jugés pour nos péchés. La mère de tous nos péchés est sans aucun doute le Veau d’or que nos ancêtres ont adoré dans le désert. Comme les vaches et leurs cornes sont associées à l’« accusation », nous ne sonnons pas de leurs cornes lorsque nous demandons le pardon de D.ieu à Roch Hachana.5

Mais pourquoi le bélier ?

Après avoir exclu les bovins porteurs de kerèn et les animaux à cornes pleines, il nous reste une foule d’animaux cashers à cornes creuses. Alors pourquoi le bélier est-il roi ?

La corne du bélier rappelle la ligature d’Isaac, lorsqu’Abraham fut prêt à sacrifier son fils unique, ne s’arrêtant que lorsqu’un ange lui montra un bélier dont les cornes étaient empêtrées dans le fourré voisin. Ainsi, nous dit le Talmud, lorsque nous sonnons une corne de bélier, c’est comme si nous reconstituions cet acte de dévotion extraordinaire.6

En outre, la forme courbée des cornes de bélier (et de celles qui leur ressemblent 7 ) est emblématique de notre état de contrition, lorsque nous abordons humblement D.ieu et Lui demandons de nous accorder une bonne année.8

Et le koudou ?

Certaines communautés yéménites préfèrent la très grande corne d’un grand koudou (une antilope des bois). Les origines de cette coutume ne sont pas claires.9 Donc, à moins que ce ne soit votre coutume, il est préférable de s’en tenir à la corne de bélier.

En fait, certains rabbins (notamment Maïmonide) décrètent que seule la corne de bélier peut être utilisée.10 La halakha ne suit pas cette opinion, de sorte que s’il n’y a pas de corne de bélier, vous pouvez utiliser une corne d’un autre animal, mais tous s’accordent à dire que la corne de bélier est idéale.11

Le grand Choffar

Nos sages nous racontent que le jour même où Abraham lia Isaac, il vit le bélier s’arracher d’un fourré et s’empêtrer dans un autre. D.ieu dit à Abraham : « C’est ainsi que tes enfants sont destinés à être pris dans des iniquités et empêtrés dans des malheurs. »

Abraham se tourna alors vers D.ieu et demanda : « Maître du monde ! En sera-t-il toujours ainsi ? »

D.ieu répondit : « À la fin, ils seront rachetés par les cornes de ce même bélier, comme le dit le verset12 : “D.ieu sonnera du choffar et sortira dans les tempêtes du sud” ».13 Puisse cela se produire rapidement de nos jours !