Don Isaac Abravanel fut l’un des plus grands hommes d’État juifs ayant joué un rôle important dans l’histoire européenne. En même temps, il ne fut pas seulement un juif loyal et strictement religieux, mais aussi un grand érudit, un commentateur de la Bible et un philosophe. Il fut le dernier de la longue lignée des grands dirigeants et héros juifs de l’Âge d’Or espagnol.
Don Isaac naquit dans une famille riche et érudite du Portugal. Son père Judah était trésorier d’État du Portugal et l’un des grands favoris du roi Alphonse V. Isaac reçut une éducation juive approfondie et s’intéressa vivement aux langues et à la philosophie. Plus tard, il succéda à son père au service du roi.
Dans sa grandeur, Isaac n’oublia jamais ses humbles frères. Il utilisait ses vastes richesses pour soutenir les nécessiteux. Ainsi, lorsqu’Alfonso s’empara de la ville d’Arzila au Maroc et qu’il se trouva deux cent cinquante Juifs parmi les prisonniers, Don Isaac Abravanel nomma douze représentants chargés de réunir des fonds pour les racheter, et il fut lui-même le plus grand donateur. Lorsqu’ils furent rachetés, il les soutint de ses propres fonds pendant environ deux ans, jusqu’à ce qu’ils apprennent le portugais et puissent gagner leur propre vie. Abravanel utilisait également sa grande influence pour améliorer la situation de ses frères dans d’autres pays.
À la mort d’Alphonse V et avec l’arrivée sur le trône du Portugal de son successeur Don Joao II, la fortune d’Abravanel changea. En l’an 5243 (1483), Joao II entama une politique visant à se débarrasser de la noblesse, et en particulier des ministres d’État qui servaient son père. Abravanel apprit juste à temps que le roi avait fait décapiter plusieurs officiels de haut rang et qu’il était destiné à partager le même sort. Il était en route pour répondre à l’appel du roi, mais en apprenant ce qui l’attendait, Abravanel s’enfuit à Tolède en Espagne où sa famille avait autrefois vécu. Accompagné de sa femme et de ses deux enfants, Abravanel arriva à Tolède presque sans le sou, car l’ingrat Joao avait confisqué toutes ses richesses.
Abravanel obtint discrètement un poste dans une banque juive, et fut heureux d’avoir le temps de poursuivre ses études et son travail littéraire. Il continua ses commentaires sur la Bible qu’il avait été obligé d’interrompre à cause de la pression des affaires de l’État. Il écrivit ses commentaires sur Josué, Juges et Samuel, mais lorsqu’il commença ses commentaires sur le livre des Rois, le roi d’Espagne le convoqua pour prendre en charge le trésor de l’État. Ferdinand et Isabelle d’Espagne savaient qu’ils ne pouvaient trouver un plus grand génie financier et, l’année même où le célèbre Torquemada devint chef de l’Inquisition en Espagne, Abarvanel devint officiellement trésorier du roi et de la reine (deux ans avant l’expulsion des Juifs d’Espagne).
Lorsque le terrible décret d’expulsion de tous les Juifs d’Espagne, à l’exception de ceux qui abandonneraient leur foi, fut connu, Abravanel s’efforça d’éviter la catastrophe. Il supplia le roi et la reine de reconsidérer leur cruel décret, et il offrit une somme énorme au trésor royal. Le roi et la reine firent la sourde oreille à toutes ses supplications et refusèrent ses dons d’argent.
Le 9 Av 5252 (30 juillet 1492), Abravanel et sa famille se mirent en marche avec le reste de leurs coreligionnaires. Il abandonna sa haute position et rejoignit ses frères bien-aimés dans l’exil et la souffrance. Les malheureux réfugiés atteignirent finalement Naples en Italie. Lorsque Ferdinand apprit que les Juifs avaient trouvé refuge à Naples, il demanda au roi de Naples (appelé également Ferdinand) de ne pas autoriser les réfugiés à rester sur son territoire. Le jeune roi de Naples ignora cependant les protestations et les demandes des cruels souverains espagnols. De plus, il invita Abravanel à la maison royale et le nomma conseiller. Abravanel le servit ainsi que son fils Alfonso II, qui succéda au trône en 1494. Malheureusement, Naples fut capturée par le roi Charles de France l’année suivante, et le roi Alphonse II s’enfuit en Sicile. Abravanel accompagna sa Majesté en exil, et continua de le servir avec une dévotion paternelle, jusqu’à la mort du roi en exil. Abravanel partit alors pour l’île de Corfou, en Méditerranée.
Ayant perdu toutes ses richesses au profit des conquérants français, Abravanel souffrit de la pauvreté et des privations. Il s’installa à Monopoli, une ville du royaume de Naples, et 8 ans plus tard, il se fixa finalement à Venise. Les souverains de Venise ne tardèrent pas à l’inviter au conseil d’État et Abravanel devient l’un des principaux hommes d’État de la République vénitienne. C’est à Venise qu’Abravanel mourut en l’an 5269, à l’âge de 71 ans, profondément pleuré par les citoyens juifs et non-juifs de Venise. Les principaux souverains de Venise assistèrent à ses funérailles, et il fut enterré à Padoue.
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