Lorsque revient le 9 Av et que ressurgissent dans la conscience collective du peuple juif les événements dramatiques qu'il commémore, la chute et la destruction du Temple, il paraît difficile de ne pas ressentir l'éternité de l'exil. En effet, n'est-ce pas historiquement à ce moment-là qu'il commença. N'est-ce pas toujours dans cette situation que nous nous trouvons puisque, tant que le Machia'h n'est pas encore venu, le Temple reste absent sur sa colline au cœur de Jérusalem? Ainsi à l'exil des hommes répond une sorte d'exil de D.ieu et cet état de fait ne peut que souligner la tonalité particulière de la période.

Pourtant, le peuple juif a traversé des siècles d'exil avec un long espoir en tête. Il a eu garde d'oublier cette idée simple: c'est sur le bois et les pierres du Temple que D.ieu a déversé Sa colère et non pas sur les hommes. A eux, il appartient de continuer le chemin. Certes, celui-ci peut donner l'impression de se perdre parfois au cours de l'histoire, ses tours et ses détours pourront sembler incompréhensibles, mais il se poursuit avec toute l'assurance que donne la conscience du but à atteindre.

Avec la destruction du Temple, tout paraît prendre un goût de cendre. Sous celle-ci cependant, couvent la grande flamme de la vie et de l'espoir, la grande lumière de la renaissance. Nos Sages n'ont pas manqué de l'enseigner: le jour même de la destruction du Temple est né le sauveur d'Israël, le Machia'h.

Tout de suite après cette commémoration, le Talmud présente une célébration importante: celle du 15 Av. Cependant si la joie éclate, c'est plus profondément qu'il faut en rechercher l'aspiration. En une phrase fameuse, la réponse à cette légitime interrogation est donnée: à ce moment, "la lune se tient dans sa plénitude". En milieu de mois, la lune est effectivement pleine. Dans cette idée, un symbole important se cache. De même que la lune décroît et semble disparaître pour toujours renaître, ainsi le peuple juif paraît parfois s'effacer au fil de l'histoire. Il trouve pourtant toujours les forces de sa résurrection.

Nous vivons, avec le jeûne du 9 Av, la destruction du Temple et le début de notre si long exil. Spirituellement, ces évènements ont marqué une chute considérable. De ce fait lorsque revient le 15 Av, l'élévation est aussi considérable qu'est plus éclatante la lumière qui vient du cœur de l'obscurité.

Comme bien souvent, le calendrier juif est ici bien plus que l'instrument du suivi des rites. Il est une leçon pour la vie. Voici revenu le temps de la joie. Il nous conduit, par nos efforts renouvelés, d'étape en étape jusqu'à l'aboutissement ultime: la venue de Machia'h.