Rabbi Yossef Its’hak émergea de l’Union soviétique comme un symbole internationalement reconnu de la résilience juive face à l’oppression communiste.1 Bien qu’épuisé et affaibli par ses épreuves, il œuvra encore plus diligemment à mobiliser un soutien moral et matériel en faveur de la subsistance du judaïsme dans une Russie stalinienne de plus en plus oppressante. Au cours des semaines qui suivirent l’arrivée de Rabbi Yossef Its’hak à Riga, Rabbi Mena’hem Mendel (« le Rabbi ») l’assista en tenant un rôle de secrétaire en rédigeant ses lettres, en assurant le suivi de sa correspondance et en assistant aux réunions.2
« Un mois plus tôt ou un mois plus tard, le mariage doit avoir lieu. Mais avec quoi ? »À cette époque, Rabbi Yossef Its’hak faisait couramment référence à Rabbi Mena’hem Mendel comme étant « mon gendre désigné ». Pour ‘Habad-Loubavitch, son mariage avec ‘Haya Mouchka allait constituer un pas vers un nouvel avenir, dépassant le contexte russe pour toucher l’ensemble de la communauté des Juifs d’Europe de l’Est. Mais la correspondance qui nous est parvenue révèle deux préoccupations qui conduisirent leur mariage à être reporté d’une année supplémentaire. Les parents de Rabbi Mena’hem Mendel, Rabbi Lévi Its’hak et ‘Hanna Schneersohn étaient toujours pris au piège en Russie, et l’on espérait encore qu’ils pourraient obtenir l’autorisation de partir. Il y avait également un manque criant de fonds. « Un mois plus tôt ou un mois plus tard, écrit l’un des confidents de Rabbi Yossef Its’hak, le mariage doit avoir lieu. Mais avec quoi ? »3
Au cours de l’année suivante, Rabbi Mena’hem Mendel effectua plusieurs voyages à Berlin, dont certains durèrent plusieurs mois. Lors de son premier séjour dans la ville, il s’inscrivit au Séminaire Rabbinique Hildesheimer et obtint l’ordination (smikhah) de son directeur, le rabbin Ye’hiel Yaakov Weinberg.4 À Berlin, Rabbi Mena’hem Mendel représenta son futur beau-père pour diverses affaires communautaires,5 il poursuivit sa correspondance avec le Rogatchover Gaon6 et écrivit des lettres à sa future belle-mère décrivant certaines de ses rencontres et ses impressions de la ville.7 Lors de son dernier voyage à Berlin avant son mariage, Rabbi Mena’hem Mendel fut officiellement inscrit en tant qu’étudiant à la prestigieuse université Frederick William (Humboldt).8
Le dimanche 28 octobre 1928, Rabbi Yossef Its’hak écrivit de Riga à Varsovie à son oncle et à sa tante, Rav Moché et ‘Haya Mouchka Horenshtein, les informant qu’il avait décidé d’organiser la cérémonie de mariage dans leur ville, « dans le bâtiment et la cour de la Yeshiva Tom’hei Temimim Loubavitch ». Ce lieu, expliquait-il, serait une source de satisfaction particulière, rappelant l’atmosphère de la Yeshiva d’origine qui avait été le centre de la cour de son père à Loubavitch. Les parents du marié, écrit-il, n’avaient pas été en mesure d’obtenir les documents leur permettant d’y assister et il demanda aux Horenshtein « d’escorter » le marié jusqu’au dais nuptial à leur place.9 De leur côté, les parents de Rabbi Mena’hem Mendel organisèrent une célébration simultanée dans leur ville de Yekaterinoslav.10
« Devant moi se tient Mendel, fils de Leivik... il est accompli dans sa personne, son esprit et son âme... Je vois clairement un jeune homme d’une grande valeur... »Tenu le 14 Kislev – 27 novembre 1928, le mariage fut un événement tout à fait mémorable. De nombreux grands luminaires rabbiniques de Pologne étaient présents, et des milliers de ‘hassidim affluèrent de près comme de loin pour y participer. En l’honneur de cette occasion, Rabbi Yossef Its’hak portait pour la première fois le shtreimel de fourrure de son père.11
R. Eliyahou ‘Haïm Althoiz accompagna Rabbi Mena’hem Mendel de la gare de Varsovie à son hôtel et demeura aux côtés du jeune homme pendant les deux jours entre son arrivée et le mariage. Althoiz écrivit par la suite une longue lettre aux membres de sa famille et aux ‘hassidim restés en Russie dans laquelle il décrit avec force détails ses impressions sur cet événement historique. Ses impressions sur le jeune marié lui-même, le jeune homme qui venait de s’inscrire à l’université de Berlin, sont les plus poignantes et les plus précises :
« Devant moi se tient Mendel, fils de Leivik... Il est accompli dans sa personne, son esprit et son âme... Dans la vérité vraie, je vois clairement un jeune homme d’une grande valeur ; un grand érudit, ceinturé d’une ceinture de soie, qui jeûne, qui étudie le Réchit ‘Hokhmah tout au long de la journée, qui s’immerge [au mikvé] et prie avec une ferveur véritable pour l’amour du ciel. De par sa nature, vous savez sûrement que sa grande obstination l’empêche de faire quoi que soit aux fins d’une démonstration extérieure… Bien qu’il sache également ce qui lui est extérieur dans le monde profane, il sait certainement, avec un sens aigu, faire la différence entre le sacré et le profane ; en lui, le sacré n’est pas profané, ne serait-ce que de l’épaisseur d’un cheveu… Pensant à cela, j’ai remonté sa lignée génération après génération… et je n’ai pas trouvé meilleur que lui.12
Un mariage est un événement cosmique... devant être abordé avec sérieux autant que célébré avec joie.Chez ‘Habad, un mariage est un événement cosmique, une union mystique des âmes, et il faut l’aborder avec sérieux tout autant que le célébrer avec joie. Dans un discours prononcé avant la cérémonie, Rabbi Yossef Its’hak décrivit la relation entre les mariés comme un processus dans lequel chacun est complété par l’autre. C’est seulement par l’intégration intime d’une autre personne dans sa vie personnelle que l’on peut atteindre à la perfection de son individualité.13 Alors que le rôle d’un homme dans le mariage est traditionnellement considéré comme étant de prodiguer, Rabbi Mena’hem Mendel soulignera plus tard que la bénédiction ultime est uniquement l’apanage de la femme ; c’est le privilège du mari de faciliter les réalisations de son épouse.14
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