Sujet : La proximité profonde avec D.ieu du fait du rayonnement des Treize Attributs de Miséricorde

[Pour mieux faire comprendre le concept de l’accueil du « rayonnement du visage de D.ieu dans le champ », le maamar développe la notion de la révélation des Treize Attributs de Miséricorde d’un point de vue général, et de ce qu’il en découle dans le service divin de l’homme.

C’est-à-dire :

Le sens simple de l’éveil des Treize Attributs de Miséricorde est qu’une personne ayant péché demande que son péché soit absout, ou qu’une personne en état de détresse invoque la miséricorde divine pour obtenir le salut. Cependant, d’après la ‘Hassidout, la révélation des Treize Attributs est le signe d’une profonde proximité entre D.ieu et l’âme humaine, qui suscite un vigoureux élan de l’âme à s’approcher de D.ieu.]

כִּי הִנֵּה כְּתִיב "יָאֵר ה' פָּנָיו אֵלֶיךָ", שֶׁהוּא עִנְיָן הֶאָרַת י"ג מִדּוֹת שֶׁיִּהְיֶה "פָּנִים בִּפְנִים".

Car il est en effet écrit : « D.ieu fera rayonner Son visage vers toi »,1 ce qui désigne le rayonnement des Treize Attributs de sorte qu’il y ait une situation où la Knesset Israël et D.ieu se retrouvent « face à face », à l’instar de deux personnes qui éprouvent une grande affection l’une pour l’autre et qui se tiennent face à face : au-delà de la proximité physique, cela exprime le lien profond qui les unit.

דְּהַיְנוּ שֶׁיָּאִיר גִּלּוּי פְּנִימִיּוּת רְצוֹנוֹ יִתְבָּרֵךְ לִמְקוֹר נְשָׁמוֹת יִשְׂרָאֵל, עַל יְדֵי שֶׁיִּהְיֶה עִקַּר פְּנִימִיּוּת רְצוֹנוֹ אֵלָיו יִתְבָּרֵךְ, לְדַבְּקָהּ בּוֹ בְּלֵּב וְנֶפֶשׁ, מֵעוּמְקָא דְּלִבָּא, בִּמְסִירַת נֶפֶשׁ, כְּמוֹ שֶׁנִּתְבָּאֵר בְּמָקוֹם אַחֵר.

C’est-à-dire que le rayonnement du « visage » de D.ieu symbolise le fait que rayonne la révélation de la volonté profonde de D.ieu à la source des âmes d’Israël, de sorte que cette volonté divine soit perçue et ressentie par les âmes, et ceci est la conséquence du fait que l’essentiel de la volonté profonde d’un Juif est, elle, tournée vers D.ieu, de sorte qu’il aspire à s’attacher à Lui de tout son cœur et de toute son âme, de toute la profondeur de son cœur, au point d’être prêt à donner sa vie pour Lui en lui consacrant toute son existence, comme cela est expliqué ailleurs. Ainsi, selon le principe « mesure pour mesure », peut-on mériter le rayonnement du « visage de D.ieu » qui signifie la révélation de la « profondeur » de la Lumière divine.

וְהֶאָרָה זוֹ הִיא נִמְשֶׁכֶת מִבְּחִינַת "אֵ-ל" שֶׁהוּא רֵאשִׁית כָּל הַי"ג מִדּוֹת וּמְקֹרָן וּכְלָלוּתָן, וּכְמוֹ שֶׁכָּתוּב "אֵ-ל ה' וַיָּאֶר לָנוּ", שֶׁהוּא בְּחִינַת אוֹר אֵין סוֹף בָּרוּךְ הוּא עַצְמוֹ מַמָּשׁ.

Ce « rayonnement » – cette proximité de D.ieu – envers les Enfants d’Israël provient de la « profondeur » du Divin, c’est-à-dire du degré extrêmement élevé du nom « E-l » qui est le premier des Treize Attributs de Miséricorde,2 car il est leur source et leur totalité, comme il est écrit dans les Psaumes : « L’Éternel est E-l et Il nous illumine »,3 ce qui désigne non pas la lumière réduite et limitée (dite « l’extériorité de la Lumière ») qui caractérise l’adaptation de l’influx divin à la capacité des mondes et des créatures qui sont, pour ainsi dire, « en dehors » de Lui, mais bien véritablement le Or Eïn Sof – la Lumière de l’Infini divin béni soit-Illui-même.

 וּכְמוֹ שֶׁכָּתוּב "כִּי הֲוָיָ"ה אֱ-לֹהֶיךָ אֵשׁ אֹכְלָה הוּא", פֵּרוּשׁ: כְּמוֹ לְמָשָׁל זִיו וְאוֹר הָאֵשׁ הַיּוֹצֵא מַן הָאֵשׁ עַצְמוֹ שֶׁבִּכְלָלוּתוֹ אֵין בּוֹ שׁוּם הִתְחַלְּקוּת בֵּינוֹ לְזִיו וְאוֹר הַנִּמְשָׁךְ מִמֶּנּוּ.

Et, au sujet de la révélation du Or Eïn Sof, la profondeur de la Lumière divine, il est écrit : « Car l’Éternel ton D.ieu est un feu dévorant »,4 ce qui s’explique à travers l’analogie du rayonnement de la lumière du feu qui émane du feu lui-même, ce feu que, d’un point de vue général, rien ne distingue du rayonnement qui en émane. En effet, la lumière issue du feu n’est pas comparable à une idée émanant de l’esprit d’un maître pour être transmise à un élève : une fois émise, l’idée est différente de la forme qu’elle avait au sein de l’esprit du maître, alors que la lumière du feu demeure identique à sa source – au « luminaire ».

כָּךְ כִּבְיָכוֹל הֶאָרַת פָּנִים הַמֵּאִיר לִכְלָלוּת יִשְׂרָאֵל הוּא מִבְּחִינַת "אֵ-ל", שֶׁהוּא בְּחִינַת אוֹר אֵין סוֹף בָּרוּךְ הוּא עַצְמוֹ מַמָּשׁ.

C’est ainsi, si l’on peut dire, que le rayonnement du « visage » de D.ieu, c’est-à-dire de « l’intériorité », de la « profondeur » du Divin qui illumine l’ensemble des âmes d’Israël provient du degré du nom « E-l », car c’est une émanation sans aucun tsimtsoum – sans aucune contraction ni réduction – du fait qu’il s’agit du degré de la Lumière de D.ieu qui est véritablement infinie comme l’est D.ieu béni soit-Il (le « Luminaire ») Lui-même véritablement.

וְלָכֵן נִקְרָא "יִשְׂרָאֵל" מִלָּשׁוֹן "שָׂר אֵל", וְהַיּוּ"ד מוֹרֶה עַל הַתְמָדַת הַפְּעֻלָּה, כְּמוֹ "כָּכָה יַעֲשֶׂה כוּ'". וּפֵירוּשׁוֹ: שֶׁבְּחִנַּת "אֵ-ל" הוּא שָׁר וּמוֹשֵׁל בְּקִרְבּוֹ.

Or ce rayonnement ne dépend pas du service divin des Enfants d’Israël, mais est permanent et éternel et s’opère au sein de chaque âme. C’est également la raison pour laquelle ce peuple est appelé « Israël », qui est l’expression « Sar E-l » signifiant « Il domine, E-l », précédée de la lettre youd qui indique la permanence de cette action, car cette construction grammaticale exprime un présent permanent, comme l’enseigne Rachi dans son commentaire du verset : « Ainsi agissait Job ».5 Le sens de cela est que le degré de « E-l » est « sar », c’est-à-dire dominant à l’intérieur de chaque âme d’Israël.

דְּהַיְנוּ שֶׁיֵּשׁ בְּכָל נֶפֶשׁ מִיִּשְׂרָאֵל נִיצוֹץ אֱ-לֹהוּת מַמָּשׁ הַמְחַיֶּה נַפְשׁוֹ הָאֱ-לֹהִית, וּמוֹשֵׁךְ בְּטִבְעוֹ לְמַעְלָה לֵאוֹר בְּאוֹר הַחַיִּים, לִמְסֹר נַפְשׁוֹ אֵלָיו יִתְבָּרֵךְ.

Cela veut dire qu’il existe en chaque âme d’Israël une étincelle de divinité qui donne vie à toutes les dimensions et toutes les forces de son âme divine et qui, de par sa nature, imprime en elle une aspiration à s’élever vers le haut (comme le feu qui s’élève par nature) pour luire de la Lumière de la vie,6 et ceci s’illustre par le fait que chacun est prêt à donner sa vie à D.ieu. À ce sujet, il est longuement expliqué dans le Tanya7 que même les Juifs les plus « légers » ou pécheurs, des personnes ayant passé toute leur vie en quête de plaisirs permis ou interdits par la Torah, sont prêts à donner leur vie et à endurer toutes sortes de souffrances pour ne pas abjurer leur foi en le D.ieu unique, car Celui-ci rayonne au sein de chaque âme juive et la vivifie.

וְהוּא לְמַעְלָה מִן הַחָכְמָה וְדַעַת שֶׁבְּנַפְשׁוֹ, כִּי עַל יְדֵי הַחָכְמָה וְהַדַּעַת לֹא הָיָה מַשִּׂיג בְּחִינַת זוֹ, לְבַטֵּל וּלְהַפְקִיר אֶת עַצְמוֹ מִכֹּל וָכֹל בִּשְׁבִילוֹ יִתְבָּרֵךְ.

Ce dévouement à D.ieu n’est pas quelque chose d’intellectuel. Cela transcende la sagesse et la connaissance, les forces intellectuelles de son âme, car la rationalité de celles-ci ne l’aurait pas conduit à atteindre ce degré d’abnégation par lequel il renonce à toute son existence pour D.ieu. En effet, la nature de l’intellect est de rechercher ce qui renforce l’existence de l’homme et le fait progresser, et non pas le sacrifice de soi par lequel il perd son existence. En revanche, de par l’étincelle de divinité qui est en lui, il est prêt à donner sa vie pour D.ieu « sans la moindre arrière-pensée, sans la moindre réflexion... sans la moindre raison, ni argument, ni réponse » (Tanya fin du chap. 18).

וְזֶהוּ "בָּנִים אַתֶּם לַהֲוָיָ"ה אַלֹקֵיכֶם": כִּי "בָּרָא כָּרְעָא דְּאָבוּהָ הוּא", שֶׁנִּכְלַל בִּרְצוֹנוֹ שֶׁל אָבִיו בְּלִי שׁוּם טַעַם וְדַעַת, כְּמוֹ בְּחִינַת רֶגֶל שֶׁבָּטֵל לְגַבֵּי רֹאשׁ, וְאֵין לוֹ רָצוֹן שֶׁלּוֹ כְּלָל.

Tel est le sens du verset « Vous êtes des fils pour l’Éternel votre D.ieu »,8 car la tradition enseigne que la relation unissant un fils à son père est telle que « le fils est comme la jambe du père »9 : car un véritable fils « s’inclut » dans la volonté de son père et s’y dévoue de manière totalement supra-rationnelle, tout comme la jambe est totalement soumise à la volonté de la tête, n’ayant elle-même aucune volonté propre. C’est ainsi que les Enfants d’Israël sont appelés dans la Torah des « fils » de D.ieu, de par la soumission supra-rationnelle à D.ieu implantée dans leur âme.

וְזֶהוּ "בָּטֵל רְצוֹנְךָ מִפְּנֵי רְצוֹנוֹ", שֶׁבִּכְדֵי שֶׁיָּאִיר אֶל הָאָדָם בְּחִינַת פְּנִימִיּוּת רְצוֹנוֹ יִתְבָּרֵךְ, צָרִיךְ לְבַטֵּל כָּל רְצוֹנוֹתָיו שֶׁלֹּא יִהְיֶה לוֹ רָצוֹן אַחֵר כְּלָל:

C’est à ce sujet que nos Sages ont enseigné10 « Annule ta volonté devant Sa volonté ». En effet, dès lors qu’il a été enseigné auparavant « Accomplis Sa volonté comme si elle était la tienne », que vient rajouter « Annule ta volonté devant Sa volonté » ?

De fait, ces deux enseignements caractérisent deux degrés différents.

« Accomplis Sa volonté comme si elle était la tienne », c’est faire en sorte de vouloir tout ce que D.ieu veut, c’est-à-dire l’accomplissement des 613 Mitsvot, etc.

« Annule ta volonté devant Sa volonté » est un niveau bien plus profond : car pour que rayonne sur l’homme et se révèle en lui « l’intériorité de la volonté de D.ieu » qui est la révélation de l’étincelle divine qui nous habite et du fait de laquelle nous sommes prêts à tout donner pour D.ieu, jusqu’à notre existence même, il est nécessaire d’annuler toutes ses volontés et ne plus avoir d’autre volonté que celle de D.ieu, à l’image d’une jambe qui n’a aucune volonté propre et dont l’action ne reflète que la volonté de la tête.