Spiritualité : la partie de la réalité que l’on ne peut définir. La vérité des choses avant qu’elles soient mesurées.

Pour approcher la Kabbale, nous devons oublier les mots que nous utilisons. Oubliez physique. Oubliez spirituel. Ces termes sont vides de sens. Pire encore, ce sont des mensonges.

Ils suggèrent deux royaumes insulaires en guerre éternelle l’un avec l’autre. Comme si l’esprit était une intrusion redondante, une nuisance d’un autre monde. Comme si le physique se suffisait à lui-même, souffrant des invasions intermittentes de quelque entité fantasmagorique et spirituelle.

Dans le langage de la Kabbale, nous parlons en termes de lumière, de vent, de pluie et d’argile (voir le tableau à droite).

Il n’y a pas de conflit, mais une hiérarchie, une harmonie, une interdépendance et une unité. La lumière devient toute chose, comme les photons deviennent des électrons et des protons – tout en demeurant toujours reliée à sa source. La pluie résulte de la condensation de l’air, tout comme le matériel est seulement une condensation du spirituel. Même l’argile peut être modelée de sorte qu’elle absorbe les éléments d’en haut.

Qu’est-ce que le physique, après tout ? Ce qui empêche mes pieds de chuter à travers le sol sur lequel ils se tiennent, ou ma main de passer à travers la tasse qu’elle tient ? Quelles sont les deux choses qui se rencontrent et qui acceptent mutuellement de ne laisser passer aucune d’entre elles ?

Certainement pas les particules qui les composent. Celles-ci sont proportionnellement aussi éloignées les unes des autres que les étoiles et les galaxies entre elles. Cette tasse dans ma main est presque entièrement composée de vide. Surtout sachant qu’aucune de ses particules n’occupe réellement d’espace. Ces dernières sont décrites dans la physique quantique comme des points infinitésimaux où x et y se rencontrent. Comment des points mathématiques si chichement étendus peuvent-ils sembler si rigides dans ma main ? Comment un néant vide peut-il retenir un autre néant vide ?

Demandez à un physicien et il vous dira quelque chose de mystique : les particules n’ont pas d’effet les unes sur les autres. Leurs champs énergétiques, oui. Le champ électromagnétique qui organise les particules de votre main rencontre celui qui organise la tasse. Les champs entrent en conflit. Telle est la palpabilité que nous appelons physique : des particules qui n’occupent aucun espace, suspendues dans leurs positions et leurs orbites sous l’effet d’une certaine force.

Et qu’est-ce que cette force ? Pourquoi se comporte-t-elle de cette manière ? D’où provient-elle ? Dans quoi est-elle branchée ? Qu’est-ce qui la fait être ainsi ? Toutes les mesures que nous effectuons avec nos appareils ne nous le diront pas. Elles peuvent nous aider à disséquer ses propriétés fondamentales, à remonter toujours plus haut à ses origines hypothétiques. Mais à chaque virage de cette route, les panneaux indicateurs poseront la même question : qu’est-ce qui fait de cette force ce qu’elle est ?

S’il y a une chose que notre incursion dans le domaine des particules subatomiques nous a apprise, c’est ceci : même si nous croyons que les cristaux peuvent être expliqués par les molécules, les molécules par les atomes et les atomes par leurs particules et leurs champs, nous demeurons néanmoins avec un trou béant : la matière ne s’explique pas par elle-même.

Alors, qu’est-ce que la matière ? C’est un infime ensemble de cas qui permettent un certain degré de mesure définie ; l’aspect de la réalité que la perception de notre esprit peut résoudre. La grande majorité du cosmos échappe intrinsèquement à la définition. C’est pourquoi nous ne la considérons pas comme faisant partie de notre réalité, alors qu’en fait elle est l’essence même de notre réalité. C’est ce à quoi la Kabbale fait référence quand elle parle du spirituel : c’est ce qui explique le matériel tout en demeurant au-delà de celui-ci.

Le monde matériel procède de ce que nous appelons le spirituel. Par conséquent, pour être capables de le comprendre, nous devons comprendre comment il existe d’abord au sein de cette source spirituelle. Tel est le champ d’étude de la Kabbale.