Ton nom sera désormais Israël, car tu as lutté avec D.ieu... et tu as vaincu.

Genèse 32, 29

Il y a des moments dans ma vie où je T’en veux vraiment. Je me sens tellement en colère pour l’angoisse que Tu provoques.

Après tout, tout ce que je demande, c’est la sécurité, la tranquillité, le bonheur et l’amour. Est-ce trop demander ? Il Te serait si facile de me les procurer !

Pourtant, à chaque fois, Tu jalonnes mon chemin d’épreuves insurmontables. Tu m’enjôles avec des périodes de calme et de bonheur, et soudain me jette dans de nouvelles tourmentes, aussi sombres que terrifiantes.

C’est vrai qu’avec le recul, je découvre souvent que j’ai grandi à travers ces épreuves. Mais bien trop souvent – en fait, le plus souvent – cette croissance se fait totalement à mon insu. Je me retrouve plutôt avec un profond sentiment d’insécurité, à me demander comment Tu as pu m’abandonner de la sorte, hantée par la peur de la prochaine tempête.

Il est vrai que, de nombreuses fois, je perçois les bénéfices qui résultent de ces difficultés. Mais, crois-moi, même alors, ces avantages n’effacent pas la douleur préalable. Le mal que Tu m’as infligé était réel. De même que la peur et les larmes qui ont coulé de mes yeux.

Sachant Ta capacité sans limites, comment puis-je justifier les souffrances que Tu m’infliges ? Sachant que Tu aurais certainement pu arranger que j’obtienne ces fameux bénéfices sans devoir souffrir, comment puis-je comprendre, et plus encore, expliquer Tes actions ?

Et, il ne s’agit pas seulement de moi. Ma colère et mon ressentiment sont amplifiés quand je considère les nombreuses personnes autour de moi. Je vois leurs souffrances et leurs épreuves, leurs manques et leurs besoins, et je n’ai pas de réponses.

Peut-être que si Tu me répondais, Tu me dirais que je ne devrais pas me focaliser sur les manques, mais sur le bien qu’il y a dans notre monde. Que je devrais être reconnaissante pour les nombreuses choses positives dans ma vie – l’amour qui m’entoure, ma famille, ma santé –, les abondants bienfaits dont Tu m’as gratifiée.

Mais voilà, l’ivresse de cette douceur ne fait qu’accroître ma soif pour elle.

Et l’amour dont Tu me combles me rend cette bonté encore plus nécessaire. Ce n’est pas seulement pour moi que j’en ai besoin, mais aussi pour mes proches. Ma passion protectrice à leur égard rend mes besoins – nos besoins – d’autant plus pressants.

Ainsi, tels sont les moments où je me sens pleine de ressentiment envers Toi. Mon esprit ne parvient pas à justifier pourquoi Tu permets que cela arrive. Pourquoi ne me protèges-Tu pas, moi, eux, nous tous, de la misère effrénée ? De la détresse gratuite ? Pourquoi le tissu même de notre monde est-il porteur de tant de douleur et d’adversité injustifiées ?

Alors que l’angoisse bouillonne en moi, que je me réveille en pleine nuit minée par l’anxiété, mon esprit crie : Pourquoi ? Pourquoi doit-il en être ainsi ?


Mais n’est-ce pas justement alors, dans mes plus profonds moments de désespoir, quand je ressens le plus vivement Ton abandon, que je m’élève pour communiquer avec Toi ?

N’est-ce pas quand je me sens le plus déchirée et esseulée que je Te recherche le plus ardemment ? N’est-ce pas lorsque ma colère et mon ressentiment s’enflamment que je ressens Ta présence le plus fortement, et que je cherche à T’atteindre ?

En effet, peut-être la colère souligne-t-elle notre proximité. Peut-être le ressentiment révèle-t-il la profondeur de notre lien. Peut-être que ma capacité à m’interroger à Ton sujet, à éprouver tant de sentiment à Ton égard – même si, parfois, c’est à Ton encontre –, montre à quel point Tu es important pour moi. Peut-être est-ce parce que Ta bonté est si évidente pour moi, parce que Ta puissance et Ton omnipotence sont si réelles pour moi, que mes émotions sont à ce point suscitées.

Et peut-être est-ce aussi pourquoi, dans mes plus profonds moments de désespoir et d’abandon, je ressens aussi Ta consolation.