Mais où était Barou’h ? Sa famille le voyait rarement. Tout ce que put dire Rabbi Joseph-Isaac à Abraham fut de lui indiquer le Beth-Hamidrache que fréquentait Barou’h.
Abraham ne perdit pas de temps et se hâta vers ce Beth-Hamidrache. Il s’installa dans un coin pour étudier, et avant longtemps, Barou’h entra bien sûr. Il vit le visiteur et, au grand soulagement et à la grande joie d’Abraham, Barou’h qui avait toujours été si distant et réservé le salua très cordialement et l’accueillit de la manière la plus amicale ! Ils s’embrassèrent affectueusement. Abraham dit : « Je vous ai cherché pendant si longtemps mon cher Barou’h ! J’étais terriblement peiné lorsque vous êtes disparu de Lyozna sans mot, sans laisser de trace derrière vous ! »
Abraham n’avait plus besoin qu’on le rassure : Barou’h était aussi bien disposé envers lui que lui envers Barou’h. Il pouvait le voir et le sentir et cela lui fit du bien au cœur.
Il sentait qu’après tout, il n’avait pas perdu son temps dans ce qui semblait une chasse à l’ombre. Le cher Barou’h était là, vraisemblablement appelé à devenir son gendre.
Abraham ne voulait pas brusquer les choses. Rabbi Joseph-Isaac lui avait conseillé la prudence. Cependant, ce dernier saisit l’occasion de sonder Barou’h sur le sujet de l’alliance proposée et de préparer le terrain afin qu’Abraham puisse discuter ce sujet vital avec lui.
Barou’h se montra moins difficile à manier qu’il n’aurait cru, et, en fait, accepta sans hésitation la proposition d’Abraham, ceci à condition seulement qu’il lui fût permis de vivre selon la voie qu’il s’était tracée.
Barou’h voulait expliquer clairement à Abraham qu’il pourrait devenir son gendre seulement si lui, et naturellement sa fille Rivkah acceptaient les conditions suivantes :
Barou’h ne demandait aucune dot, mais il voulait qu’Abraham lui fasse construire pour lui et Rivkah une maison séparée, la raison en étant qu’il voulait que cette maison devienne un refuge pour les voyageurs pauvres, particulièrement pour les Mystiques qui, à cette époque, parcouraient le pays, dans l’accomplissement de leur tâche sacrée d’aide aux pauvres Juifs foulés aux pieds et désespérés.
Barou’h avait connu de nombreux mystiques au cours de ses voyages. Comme nous le savons, Barou’h établissait ses quartiers dans un Beth-Hamidrache, où qu’il allât, et c’était vers le Beth-Hamidrache que se dirigeaient aussi les Mystiques. Ces Mystiques étaient assis, pour ainsi dire, entre deux chaises et personne ne se préoccupait de leur confort ou leurs besoins. Ils ne voulaient pas demander la charité, aussi n’avaient-ils pas autant que le mendiant qui se tenait à la porte du Beth-Hamidrache, pour éveiller la sympathie des cœurs généreux.
D’autre part, parce que la plupart d’entre eux voyageaient comme de pauvres et simples ouvriers, leur identité n’était pas connue et les familles qui étaient toujours prêtes à accueillir des hôtes de marque, ignoraient ces mystiques et ne leur offraient pas l’hospitalité.
Ainsi, c’était une rude vie que celle des Mystiques, et Barou’h rêvait d’un jour où il serait en mesure d’alléger leur sort en leur offrant un vrai lit pour dormir au lieu du banc dur du Beth-Hamidrache, aussi bien qu’un bon repas, au lieu des rares morceaux de nourriture qu’ils récoltaient dans leurs voyages.
Évidemment, Barou’h ne pouvait mettre son rêve à exécution jusqu’à ce qu’il se marie et se rappelant le proverbe qu’« une femme (en général) regarde les visiteurs d’un mauvais œil », il voulait prendre ses précautions. C’est pourquoi il insista tellement pour qu’Abraham accepte les conditions qu’il lui imposait. Abraham assura promptement Barou’h qu’il n’avait pas à s’inquiéter, et, connaissant le bon cœur de sa fille, il put promettre, même avant de le lui demander, qu’elle accepterait volontiers et avec joie de voir leur foyer converti en « asile » pour tous ceux que Barou’h souhaiterait inviter.
Maintenant qu’Abraham et Barou’h étaient parfaitement d’accord, Barou’h exprima son désir d’être fiancé dès que possible. Et Abraham partit avec ces bonnes nouvelles.
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