Le quatrième Rabbi de ‘Habad, le « Maharach » (initiales de « Morenou HaRav Chmouel ») avait un ‘Hassid dont la fille épousa un brillant jeune homme, érudit, craignant D.ieu et charitable qui était un mitnagued : un Juif religieux qui haïssait les ‘Hassidim.

Ce jeune homme, pour satisfaire son beau-père, s’en fut chez le Rabbi pour obtenir sa bénédiction avant le mariage, mais ne voulut plus en entendre parler par la suite. L’idée même de saints Rabbis donnant des bénédictions lui était inacceptable.

Au bout d’un an, le couple fut béni par la naissance d’un petit garçon, qu’ils appelèrent Chmoulik. C’était un bel enfant, avec des yeux pétillants de bonheur, mais après quelques semaines ils remarquèrent qu’il ne bougeait pas ses jambes !

Ils coururent de médecin en médecin, puis de professeur en professeur, mais peu à peu une triste réalité leur apparaissait : tous les médecins étaient d’avis que l’enfant serait paralysé à vie. C’était malheureux, mais on ne pouvait rien y faire, c’était de toute évidence une sorte de décret céleste.

L’enfant grandit. Il était intelligent et alerte, mais ses jambes ne fonctionnaient tout simplement pas, et toutes les prières et les bonnes actions de ses parents n’y changèrent rien. C’était comme les médecins l’avaient dit : sans espoir. C’est, en tout cas, ce dont le père était persuadé et quand sa femme lui jetait un regard plaintif, il lui répondait :

« Peuh ! Si les meilleurs professeurs n’ont rien pu faire, comment ton Rabbi pourrait-il y changer quoi que ce soit ? »

Mais quand l’enfant atteignit l’âge de seize ans, sa mère refusa de garder le silence.

« Que va-t-il se passer ! cria-t-elle à son mari. Faut-il que notre fils souffre seulement à cause de ton entêtement ? Regarde-le... Que va-t-il faire le reste de sa vie ? N’as-tu donc aucune pitié ? Qu’as-tu à perdre à demander une bénédiction au Rabbi ?! »

Ses paroles produisirent finalement leur effet et un jour son mari revient de la prière du matin et annonça qu’il était prêt à se rendre chez le Rabbi de Loubavitch... mais seulement à la condition que si cela ne donnait rien, elle cesse de le harceler.

Quelques jours plus tard, il arriva à Loubavitch. Une audience fut organisée et le lendemain soir, il entra dans le bureau du Rabbi.

Il ferma la porte derrière lui et se retrouva seul avec le Rabbi. Dès qu’il vit le saint visage du Rabbi, il fut pétrifié. C’était comme si sa langue refusait de bouger et son esprit devint si confus qu’il ne savait plus pour quelle raison il se trouvait là. Le Rabbi entama alors la conversation :

« Vous étiez ici il y a presque dix-sept ans. Comment allez-vous ? Comment va votre femme ? »

Le ton amical du Rabbi le fit sortir de sa rêverie et il déversa son cœur, racontant toute l’histoire de son fils malade et terminant son triste monologue en disant : « Rabbi, le garçon est sans espoir, s’il vous plaît sauvez-le. Nous ne savons pas quoi faire ! »

« Vous ne savez pas quoi faire ? répondit le Rabbi. Je vais vous dire ce qu’il faut faire. Trouvez-lui un chidoukh ! » (Trouvez-lui une épouse !)

« Une épouse ? balbutia le père du garçon. Un chidoukh ? Mais qui se marierait avec lui ? Avec qui pourrait-il se marier ? Je veux dire... »

Mais le Rabbi poursuivit : « Trouvez une pauvre orpheline. Je suis sûr que vous devez connaître une telle jeune fille, qui craigne D.ieu et ait un bon cœur. Parlez-lui sincèrement, achetez-lui des cadeaux, des bijoux, dites-lui que vous la soutiendrez et parlez-lui des bonnes qualités de votre fils. Soyez positif et, avec l’aide de D.ieu, cela la convaincra d’accepter d’épouser votre fils. »

Lorsqu’il quitta le bureau du Rabbi, il était un autre homme. Le Rabbi avait parlé de manière si claire et si détaillée que, pour la première fois en seize ans, il sentit que D.ieu allait vraiment aider. Il voyagea à Minsk, y acheta de beaux bijoux et, quelques jours plus tard, il était de retour chez lui.

Sur le chemin du retour, il lui apparut que la jeune fille qu’il cherchait vivait sous son propre toit ! Lui et sa femme avaient en effet recueilli une jeune fille orpheline et pauvre depuis plus de dix ans et, bien qu’il n’ait jamais imaginé qu’elle puisse épouser son fils, maintenant que le Rabbi l’avait mentionné, tout semblait logique.

Il s’adressa à la jeune fille et, lorsqu’elle vit les boites colorées qui contenaient les cadeaux, elle se demanda ce qu’elles pouvaient bien contenir.

Tout se passa exactement comme le Rabbi avait dit. Elle fut flattée d’être considérée comme un parti pour son fils, heureuse de faire partie de sa famille et révéla qu’elle était au courant des bonnes qualités de Chmoulik. En bref... elle accepta ! C’était un miracle ! Son fils allait se marier ! Le père commença à regretter tout ce qu’il avait jamais dit contre le Rabbi ! Quel dénouement heureux !

Mais ce n’est pas la fin de l’histoire.

Un jour avant le mariage, qui devait avoir lieu dans leur maison, les préparatifs battaient leur plein. On préparait les tables, on astiquait la maison et les marmites bouillaient sur le réchaud. L’odeur de viande rôtie était si forte et attrayante que tout le monde en prélevait un petit échantillon de temps en temps. Chmoulik ne fit pas exception et demanda à sa mère de lui faire goûter cette viande apparemment succulente.

Au début, elle hésita. Chmoulik était probablement excité à cause du mariage qui se préparait, mais il ne mangeait jamais de viande, pas même le jour du Chabbat, car cela le rendait malade. Il était un garçon fragile, de faible constitution, qui ne pouvait consommer que les aliments les plus légers. Mais il insista tant et si bien que sa mère finit par accéder à sa demande à contrecœur.

Et, bien sûr, dès qu’il eut fini de manger la viande, il se sentit bizarre.

Sa mère se précipita à son chevet et il commença à se plaindre que ses jambes lui paraissaient légères... soudain, pour la première fois de sa vie, il les bougea !

Le lendemain, soutenu par deux amis, il fut capable de marcher jusque sous la ‘houppa (le dais nuptial), et fit même quelques pas seul après la cérémonie. La joie au mariage ne connut pas de limites.

Depuis ce jour Chmoulik marcha normalement, vécu heureux avec son épouse et eut des enfants et des petits-enfants... grâce à la bénédiction de Rabbi Chmouel, le Rabbi de Loubavitch.