1. Le fondement de tous les fondements et le pilier de toutes les sciences est d’être conscient qu’il est une Existence Première qui fait venir toute chose à l’existence. Toute chose existante du Ciel et de la Terre, ou intermédiaire, n’est venue à l’existence qu’en vertu de la réalité de Son existence.
2. Si l’on considérait qu’Il n’existe pas, rien d’autre ne pourrait exister.
3. Si l’on supposait que tous les autres êtres sont inexistants, Lui seul continuerait d’exister ; leur non-existence n’impliquerait pas Sa non-existence. Car tous les êtres ont besoin de Lui, mais Lui, béni soit-Il n’a pas besoin d’eux, ni d’aucun eux. C’est pourquoi, Sa réalité est différente de celle de chacun d’eux.
4. C’est ce que le prophète entend quand il dit : « L’Eternel D.ieu est vrai » ; Lui seul est réel, et aucun autre n’a une réalité semblable à la Sienne. C’est [cette idée] que la Torah exprime [dans le verset] : « Il n’est rien d’autre que Lui », c'est-à-dire « il n’est pas d’existence autre que Lui qui est réelle comme Lui ».
5. Cette existence est le D.ieu du monde, et maître de la Terre entière ; Il dirige la sphère avec une force infinie et illimité, force qui est ininterrompue. En effet, la sphère tourne sans cesse, et il est impossible qu’elle tourne sans cause qui la fasse tourner ; c’est Lui, béni soit-Il, qui la fait tourner, sans main, et sans corps.
6. Reconnaître cela est un commandement positif, comme il est dit : « Je suis l’Eternel ton D.ieu ». Qui imagine qu’il existe un autre dieu hormis Lui transgresse un commandement négatif, comme il est dit : « Tu n’auras point d’autre dieu devant Moi », et nie [le principe] essentiel [du judaïsme], car [cette doctrine] est le principe de base dont tout dépend.
7. Ce D.ieu est Un. Il n’est pas deux ou plus, mais Un ; Son unité est différente de toute unité existante en le monde, c'est-à-dire qu’il n’est pas Un comme une catégorie générale qui inclus plusieurs entité, ni Un à la manière d’un corps qui est divisé en différentes parties et dimensions. [Son] Unité ne trouve pas d’exemple dans le monde. S’il y avait une pluralité de dieux, ils auraient un corps et une forme, car toutes les entités semblables ne se distinguent que par les attributs liés au corps et aux formes. Et si le Créateur avait un corps et une forme, il aurait une fin et une limite, car il est impossible qu’un corps soit infini. Et tout [être] dont le corps est fini et limité, sa force est également finie et limitée. Or, notre D.ieu, béni soit Son Nom, possède une force infinie et incessante, puisque la sphère continue de tourner, Sa force n’est pas une force corporelle. Et étant donné qu’Il n’est pas un corps, les propriétés du corps qui créent la division et la séparation ne Lui sont pas associées. Par conséquent, il est impossible qu’Il soit autre qu’Un. La connaissance de ce concept est un commandement positif, comme il est dit : « l’Eternel est notre D.ieu, l’Eternel est Un ».
8. [Cette doctrine, à savoir] que le Saint béni soit-Il n’a pas de corps, ni de forme, est exprimée dans la Torah et les prophètes, comme il est dit : « que l’Eternel est D.ieu, dans les Cieux en haut et ici-bas sur Terre » ; or, un corps ne peut se trouver en deux endroits en même temps. Et il est dit : « car vous n’avez vu aucune image », et il est dit : « À qui m’assimileriez-vous, à qui ressemblerai-Je ? » ; or, s’il avait un corps, il ressemblerait aux autres corps.
9. Puisqu’il en est ainsi, quel est donc le sens des expressions mentionnées dans la Torah : « Sous ses pieds », « écrites du doigt de D.ieu », « la main de l’Eternel », « yeux de l’Eternel », « oreilles de l’Eternel », et [expressions] semblables ? Toutes [ces expressions] sont adaptées à [la sagacité de] l’esprit humain, qui ne perçoit que le corporel. La Torah s’est exprimée dans la langage de l’homme, et toutes [ces expressions] sont des métaphores, comme il est dit : « J’aiguiserai l’éclair de Mon glaive » ; Porte-t-Il un glaive et tue-t-Il avec un glaive ? [Ce terme] est donc employé allégoriquement, et ainsi, toutes [ces phrases sont à comprendre] dans le même esprit. La preuve en est qu’un prophète dit avoir aperçu le Saint Béni soit-Il ayant « un vêtement blanc comme la neige », et un autre [dit L’avoir vu avec] « des vêtements teints de rouge de Boçra ». Moïse lui-même Le vit sur la mer comme un vaillant faisant la guerre, et au Sinaï, comme un ministre officiant enveloppé [de son châle de prière] ; [tout cela] indique qu’il n’a pas ni silhouette, ni forme. Ces [images ne] sont [que] des visions prophétiques. Mais l’[existence de D.ieu tel qu’Il est] véritablement, l’esprit humain n’est pas à même de la saisir et de la rechercher. Tel est le sens du verset : « Peux-tu, en cherchant, trouver D.ieu, trouver la perfection du Tout-Puissant ? »
10. Que Moïse voulut-il donc percevoir, quand il dit : « Monte-moi, de grâce, Ta gloire » ? Il voulut appréhender la réalité de l’existence du Saint béni soit-Il, de manière à l’intérioriser dans son esprit ; comme l’on connaît un homme, dont on a vu le visage et dont on a l’image gravée dans l’esprit, ce qui fait qu’on le distingue des autres personnes, ainsi, Moïse voulu [connaître l’existence de D.ieu] de manière à ce que Son existence soit distinct en son esprit des autres [formes d’]existence, au point de connaître la réalité de Son existence, telle qu’elle est. [D.ieu,] Béni soit-Il, lui répondit qu’il n’est pas dans le pouvoir de l’être humain vivant, fait d’un corps et d’une âme, de saisir pleinement cette réalité. [Néanmoins,] le Saint béni soit-Il lui révéla ce auquel personne n’avait eu accès auparavant – et n’aura jamais accès par la suite – jusqu’à ce qu’il perçut un tant soit peu la réalité de Son existence. Dans son esprit, le Saint béni soit-Il fut distinct des autres êtres, comme l’on pourrait distinguer un homme que l’on a vu de dos – et dont on a embrassé [du regard] tout le corps et les vêtements – d’un autre homme. C’est à cela que l’Ecriture fait allusion, dans le verset : « Tu Me verras par derrière, mais Ma face ne peut être vue ».
11. Attendu qu’il est évident qu’Il n’a pas de corps et de forme, il est également clair qu’aucun attribut propre au corps ne lui est approprié : ni lien ni séparation, ni lieu ni mesure, ni montée ni descente, ni gauche, ni droite, ni devant ni derrière, ni position assise ou debout. Il n’est pas [non] sur un plan temporel pour avoir un début et une fin, et un nombre d’années. Il n’est sujet à aucun changement, car il n’est aucun facteur qui ne lui cause de changement. Il n’est sujet ni à la mort, ni à la vie semblable à la vie du corps. Il n’est pas [définissable en termes d’]ineptie ou de sagesse semblable à la sagesse humaine. [Il n’a] ni sommeil ni lever, ni colère ni rire, ni joie ni tristesse, ni silence ni parole semblable à l’expression humaine. Telle est la sentence des sages : « il n’y a en haut ni position assise ou debout, ni séparation ni lien ».
12. Ceci étant, les expressions [susmentionnées] du pentateuque et des livres des prophètes sont toutes métaphoriques et rhétoriques. Par exemple, « Celui qui siège dans les cieux rira », « Ils m’ont mis en colère avec leurs vanités », « comme l’Eternel s’était plu », et [expressions] semblables. À ce propos, les sages ont dit : « La Torah s’exprime dans le langage de l’homme ». Et de même, il est dit : « Est-ce Moi qu’ils mettent en colère », et il est dit : « Moi, l’Eternel, Je n’ai pas changé » ; or, s’Il était parfois en colère et parfois allègre, ce serait un changement. Tous ces états n’existent que chez les êtres physiques obscurs et bas, qui résident dans les maisons d’argiles, et ont leurs fondements dans la poussière. Mais Lui, béni soit-Il est élevé et exalté au-dessus de tout ceci.
Extrait du "Livre de la Connaissance",
premier livre du Michné Torah de Maïmonide
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