Rambam - 1 chapitre par jour
Lois sur l’idolâtrie et les traditions des gentils : Chapitre Deux
Lois sur l’idolâtrie et les traditions des gentils : Chapitre Deux
1. Le commandement relatif à l’idolâtrie consiste essentiellement à n’adorer aucune créature : ni ange, ni sphère, ni étoile, ni aucun des quatre éléments fondamentaux, ni tout ce qui est créé à partir [c'est-à-dire d’une combinaison] de ceux-ci [cf. lois sur les fondements de la Torah ch. 4 § 1]. Même si celui qui leur rend culte sait que l’Eternel est D.ieu, et adore cette créature dans le même esprit qu’Énoch et ses contemporains au commencement [de l’idéologie païenne], il est un idolâtre. C’est à ce propos que la Torah nous a mis en garde, en disant : « Tu pourrais aussi porter tes regards vers le ciel et, en voyant le soleil…que l’Eternel ton D.ieu a donné en partage à tous les peuples », c'est-à-dire : Peut-être promèneras-tu le « regard de ton cœur » [ta réflexion] et réaliseras que ceux-ci dirigent le monde, que D.ieu les a partagés pour [éclairer et diriger] le monde entier étant donné qu’ils vivent [immuablement], sans jamais se décomposer, contrairement [aux êtres du] monde. Tu penseras alors qu’il sied de se prosterner devant eux et de les adorer. À ce sujet, [l’Écriture] a ordonné : « Gardez-vous de laisser séduire votre cœur », c'est-à-dire : Ne vous égarez pas par les pensées de votre cœur en adorant ceux-ci, comme intermédiaire entre vous et le Créateur.
2. Les idolâtres ont composé de nombreux textes concernant leur culte, en quoi consiste essentiellement leur culte, quelles sont les coutumes, et quels sont les statuts. Le Saint Béni soit-Il nous a ordonné de ne pas lire ces livres, de ne pas y penser, même à un seul détail : même regarder la silhouette de la figure est défendu, comme il est dit : « Ne vous tournez point vers les idoles ». À ce sujet, il est dit : « garde-toi de t’informer de leurs dieux, en disant : comment [ces peuples] servent-ils » ; tu ne dois pas t’enquérir de la forme de ce culte, bien que tu n’adores pas [cette idole]. En effet, cela te conduira à t’intéresser à elle et à imiter leurs actions, comme il est dit : « et je ferai de même ».
3. Toutes ces interdictions [évoquées dans les deux § précédents] concernent le même sujet, à savoir ne pas s’intéresser aux cultes idolâtres. Qui s’y intéresse par un acte se voit infliger la flagellation. Ce n’est pas seulement à l’idolâtrie qu’il est défendu de s’intéresser ; plutôt, il nous est défendu de laisser monter à l’esprit toute pensée qui nous conduirait à déraciner l’un des principes fondamentaux de la Torah. Nous ne devons pas détourner notre esprit vers ceci, y penser, et se laisser attirer par les pensées [doutes] du cœur. En effet, l’esprit de l’homme est étroit, et il n’appartient pas à l’esprit de tout un chacun de saisir pleinement la vérité. Ainsi, si chacun suit les pensées de son cœur, il détruira le monde, du fait de l’étroitesse de son esprit. Comment cela ? Parfois, il [l’homme] sera attiré par l’idolâtrie [pensant qu’il y a du vrai], parfois, il aura des doutes quant à l’unité de D.ieu, [c'est-à-dire] peut-être est-Il [Un], peut-être non ? Qui a-t-il en haut [au-delà des cieux] ? Qui a-t-il en bas [en dessous de la terre] ? Qui a-t-il eu avant [la création des cieux] ? Qui aura-t-il après [à la fin des temps] ? Parfois, [ses doutes porteront sur] la prophétie : peut-être est-elle authentique, peut-être non. Parfois, [ses doutes porteront] sur la Torah : peut-être est-elle d’origine divine, peut-être non. Or, n’ayant pas la logique nécessaire pour parvenir à la vérité, il tombera dans l’hérésie. C’est contre cela que la Torah a mis en garde, en disant : « et ne vous égariez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux, qui vous entraînent à l’infidélité », c'est-à-dire que chacun d’entre vous ne se laisse pas entraîner par son esprit étroit, pensant avoir saisi la vérité. Telle est la sentence des sages : « à la suite de vos cœurs », ceci est l’hérésie, « et de vos yeux », ceci est l’impudicité. Bien que [la transgression de] cette interdiction cause à l’homme d’être privé du monde futur, la flagellation n’est pas prévue.
4. Le commandement relatif à l’idolâtrie équivaut à tous les commandements, comme il est dit : « Si, par suite d’une erreur, vous n’observez pas tous ces commandements… » ; par tradition orale, ils [les sages] ont appris que le verset fait référence à l’idolâtrie. Tu apprends donc que quiconque reconnaît une fausse divinité nie toute la Torah, tous les prophètes, et tous les ordres que les prophètes ont reçus depuis Adam [le premier homme] jusqu’à la fin des temps, comme il est dit : « et depuis l’époque où l’Eternel l’a prescrit jusqu’à vos générations ultérieures ». Qui nie un faux dieu reconnaît toute la Torah et tous les prophètes, et tous les ordres que les prophètes – depuis Adam jusqu’à la fin des temps – ont reçus. Ceci est la base de tous les commandements.
5. Un juif qui s’adonne à l’idolâtrie est considéré comme un idolâtre en tous points, et n’est pas considéré comme un juif ayant commis une faute passible de lapidation. Un apostat par rapport à l’idolâtrie est considéré comme un apostat par rapport à la Torah entière. Et de même, les hérétiques au sein du peuple juif ne sont aucunement considérés comme des juifs. On ne les accepte jamais par le repentir , comme il est dit : « Aucun de ceux qui vont chez elle ne revient, incapable de retrouver le chemin de la vie ». Les hérétiques sont ceux qui suivent les pensées de leur cœur concernant les absurdités précédemment évoquées [§ 3], et transgressent ainsi les principaux commandements de la Torah par rébellion, dédain, la main haute, disant que cela n’est pas une faute. Il est défendu de parler avec eux et de leur répondre, comme il est dit : « n’approche pas l’entrée de sa maison ». La pensée d’un hérétique est liée à l’idolâtrie .
6. Qui reconnaît une fausse divinité, même s’il ne la sert pas, méprise et blasphème le Nom vénéré et redoutable [de D.ieu]. Celui qui sert une fausse divinité et celui qui blasphème le nom [de D.ieu] ont le même statut, comme il est dit : « et la personne qui agira avec une main haute, que ce soit l’habitant, que ce soit le converti, c’est l’Eternel qu’il outrage ». C’est pourquoi, celui qui sert une fausse divinité est pendu [après avoir été exécuté] comme celui qui blasphème, et tous deux sont lapidés. C’est pour cette raison que j’ai inclus les lois relatives au blasphémateur dans les lois relatives à l’idolâtrie, car tous deux nient l’essentiel [de notre religion].
7. Telles sont les lois qui régissent le blasphémateur : le blasphémateur n’est passible de lapidation que s’il prononce le Nom spécifique de quatre lettres : Alef-Dalet-Noun-Youd, et le maudit au nom de l’un des [sept] noms [de D.ieu] qui ne peuvent être effacés, comme il est dit : « Et celui qui prononce en blasphème le Nom de l’Eternel » ; la [mise à mort par] lapidation n’est prévue [que pour celui qui blasphème] le nom spécifique [de D.ieu], [tandis que le blasphème] des autres désignations [y compris les autres noms ineffaçables] est [simplement la transgression d’]un commandement négatif. D’aucuns expliquent que la peine [de lapidation] n’est prévue que pour [celui qui blasphème] le nom Youd-Ke-Vav-Ke ; quant à moi, je suis d’avis que la lapidation est prévue pour les deux [noms].
8. Où se trouve [dans la Torah] la mise en garde contre le blasphémateur ? Il est dit : « N’outrage pas D.ieu ». Chaque jour, lorsque les témoins sont interrogés, [la formule suivante :] « Que Yosse frappe Yosse » [est employée pour désigner le blasphème du nom de D.ieu] . Une fois le procès terminé [avant de rendre le verdict], on fait sortir tout le monde dehors, et on interroge le plus important des témoins, en lui demandant : « Dis explicitement ce que tu as entendu », et il répète [le blasphème en mentionnant le nom de D.ieu] . [Alors,] les juges se lèvent et déchirent [leurs vêtements] et ne recousent jamais [la déchirure faite]. Le second témoin dit alors : « J’ai entendu la même chose ». S’il y a de nombreux témoins, chacun d’eux doit dire : « J’ai entendu la même chose ».
9. Si un blasphémateur revient sur ses propos dans le « temps d’une parole », cela est sans effet ; plutôt, dès lors qu’il a blasphémé [le nom de D.ieu] en présence de témoins, il est lapidé. Celui qui blasphème le nom [de D.ieu] au nom d’une fausse divinité, les zélotes le frappent et le tuent. Si les zélotes ne le tuent pas et qu’il comparaît au tribunal, il n’est pas lapidé, à moins qu’il maudisse [le nom de D.ieu] avec l’un de Ses noms [ineffaçables].
10. Qui entend un blasphème du nom [de D.ieu] a l’obligation de déchirer [ses vêtements]. Même [s’il entend le blasphème d’une] des désignations [de D.ieu], il a l’obligation de déchirer [ses vêtements], s’il l’entend d’un juif. Celui qui entend [le blasphème] comme celui qui l’entend [rapporté] de la bouche de qui l’a entendu ont l’obligation de déchirer [leurs vêtements]. En revanche, celui qui entend [un blasphème] de la bouche d’un non juif n’a pas l’obligation de déchirer [ses vêtements]. Eliakim et Chevna ne déchirèrent [leurs vêtements] que parce que Ravchake était un juif apostat. Tous les témoins et juges imposent leurs mains, l’un après l’autre, sur la tête du blasphémateur et lui disent : « Tu es responsable de ton sang [de ta mort], car c’est toi qui t’es causé cela ». Seul le blasphémateur, de tous les condamnés à mort par le tribunal, se voit imposer [les mains des juges et des témoins], comme il est dit : « tous ceux qui ont entendu, appuieront leurs mains sur sa tête ».