Rambam - 3 chapitres par jour
Chapitre Premier, Chapitre Deux, Chapitre Trois
Lois des Rois
Elles contiennent 23 Mitsvot : 10 commandements positifs et 13 commandements négatifs, dont voici l’énoncé :
1. Se nommer un roi.
2. Ne pas le nommer d’entre les convertis.
3. Qu’il n’ait pas trop de femmes.
4. Qu’il n’ait pas trop de chevaux.
5. Qu’il n’ait pas trop d’or et d’argent.
6. Détruire les sept peuples.
7. N’en laisser vivre personne.
8. Effacer la descendance d’Amalek.
9. Se souvenir des actions d’Amalek.
10. Ne pas oublier ses méfaits et son agression sur la route.
11. Ne pas résider en Égypte.
12. Faire des propositions de paix aux villes assiégées.
13. Ne pas faire de proposition de paix à Ammon et à Moab lorsqu’on les combat.
14. Ne pas détruire les arbres fruitiers lors d’un siège.
15. Préparer un endroit du camp pour que les soldats s’y exonèrent.
16. Préparer une bêche à cet effet.
17. Oindre un Cohen qui parle aux combattants avant l’affrontement.
18. Que celui qui vient de se fiancer, ou de construire une maison, ou de planter une vigne se réjouisse de son acquis une année entière et soit exclu des troupes.
19. Qu’aucune tâche ne lui soit imposée, ni pour les besoins civils ni pour les besoins militaires.
20. Ne pas craindre ni s’enfuir du combat.
21. La permission de la « belle captive ».
22. Ne pas revendre la « belle captive ».
23. Ne pas l’asservir après l’avoir prise pour soi.
Ces Mitsvot sont expliquées dans les chapitres suivants.
Chapitre Un
1. Les enfants d’Israël ont reçu trois commandements en entrant en Terre d’Israël :
Se nommer un roi, comme il est dit : « Tu mettras sur toi un roi. »
Détruire la descendance d’Amalek, comme il est dit : « Tu effaceras le souvenir d’Amalek. »
Construire la Maison d’Élection (le Temple), comme il est dit : « Tu chercheras sa résidence et tu y viendras. »
2. La nomination d’un roi se fait avant la guerre contre Amalek, comme il est dit : « D.ieu m’a envoyé pour t’oindre roi (...) Maintenant, vas et tu frapperas Amalek. »
La destruction de la descendance d’Amalek précède la construction du Temple, comme il est dit : « Et ce fut lorsque le roi résidait dans sa demeure et que D.ieu l’eut débarrassé de tous ses ennemis alentour, alors le roi dit au Prophète Nathan : « Est-il possible que je réside dans une demeure boisée de cèdres ?... »
Puisque la nomination d’un roi est une Mitsva, pourquoi D.ieu ne fut pas satisfait lorsque le peuple demanda un roi à Samuel ? Parce qu’il l’avait demandé par hypocrisie. Ce n’était pas pour la Mitsva qu’ils agissaient, mais par rejet du Prophète Samuel, comme il est dit : « Ce n’est pas de toi qu’ils ont assez, mais de Moi. »
3. L’institution de la royauté ne peut se faire que par un tribunal de soixante-dix Sages et un Prophète. C’est ainsi que furent intronisés Josué par Moïse et son tribunal, puis Saül et David qui furent nommés par Samuel de Rama et son tribunal.
4. On ne nomme pas un roi d’entre les convertis, même après plusieurs générations, et il faut que sa mère soit du peuple d’Israël, comme il est dit : « Tu ne pourras nommer sur toi un homme étranger qui ne soit pas ton frère. »
Ceci non seulement pour la royauté, mais pour toute fonction au sein d’Israël : ni chef d’armée, ni chef de cinquante, ni décurion, ni même préposé à la répartition des eaux entre les différents propriétaires de champs. Et à plus forte raison, qu’un juge ou un prince ne peuvent être que du peuple juif, comme il est dit : « D’entre tes frères tu mettras sur toi un roi (id.) » c'est-à-dire que toutes les fonctions que tu places au dessus de toi ne peuvent être que pour l’un de tes frères.
5. On ne peut nommer une femme à la royauté, car il est dit : « sur toi un roi » et non une reine. De la même façon, toute fonction publique sur le peuple d’Israël ne peut être exercée que par un homme.
6. On ne nomme pas roi celui qui exerce un métier de boucher, coiffeur, gardien de bain ou tanneur. Non qu’ils en soient indignes, mais, exerçant un métier dédaigné, le peuple s’en moquerait toujours. Même celui qui a exercé un de ces métiers une journée est devenu inapte.
7. Lorsque Israël se nomme un roi, on l’oint avec l’huile d’onction, ainsi qu’il est dit : « Samuel prit la fiole d’huile, lui versa sur la tête et l’embrassa. » Après qu’un roi ait été oint, cette onction le désigne lui et ses descendants pour toujours, car la royauté est héréditaire, comme il est dit : « Afin qu’il prolonge ses jours sur le trône, lui et ses fils parmi Israël. »
Si le roi décède en laissant un fils mineur, on lui réserve le trône jusqu’à ce qu’il grandisse, comme le fit Joïada pour Joas.
Celui qui a priorité pour l’héritage des biens (en l’absence de fils) a priorité pour la succession au trône. Le plus âgé des fils a priorité sur les puînés.
Ceci ne concerne pas que la Royauté, et toutes les hautes fonctions et nominations au sein du peuple d’Israël sont héritées par les fils et petits fils pour toujours. Ceci à condition que le fils remplisse les fonctions de ses ancêtres avec sagesse et crainte. N’aurait-il que la crainte sans la sagesse, on le met à la place de son père et on le forme. Quant à celui qui n’aurait pas de crainte de D.ieu, fut il même très avisé, on ne lui confie aucune fonction au sein d’Israël.
David ayant été oint, il a accédé à la couronne royale, et le trône est à lui et à sa descendance pour toujours, comme il est dit : « Ton trône est disposé pour toujours. » Mais il ne l’a acquis que pour ses fils dignes, comme il est dit : « Si tes enfants gardent mon alliance. »
Bien que seuls les fils dignes la méritent, la Royauté ne sera jamais ôtée de la descendance de David, ainsi que D.ieu le lui a assuré : « Si ses fils abandonnent ma loi et s’écartent de mes décrets (…) je punirai du bâton leur péché, et par des plaies leur faute, mais je ne lui renierai pas ma bonté. »
8. Si un Prophète désigne un roi d’entre les autres tribus d’Israël, et que ce roi aille dans les voies de la Torah et des Commandements, et qu’il mène les guerres de D.ieu, il est en tout un roi, et toutes les lois concernant le roi s’appliquent à lui (bien que l’accession au trône soit le lot de la lignée de David) et sa descendance règnera.
Ainsi voit on lorsque A’hya de Silo a investi Jéroboam et lui a dit : « Et si tu écoutes tout ce que je t’ai ordonné, je te construirai une maison durable, comme j’ai construit pour David, etc. » Et A’hya lui a dit : « Et à son fils je donnerai un sceptre, afin de conserver une place à David mon serviteur pour toujours devant Moi à Jérusalem. »
9. La Royauté de David est immuable, ainsi qu’il est dit : « Ton trône sera disposé pour toujours. »
Par contre, si un roi d’une autre lignée est appelé à régner, la Royauté échappera à sa descendance, ainsi qu’il est dit pour Jéroboam : « mais pas pour toujours. »
10. Les Rois du Royaume d’Israël ne sont pas oints avec l’huile d’onction, mais avec un baume aromatique. Ils ne sont jamais investis dans Jérusalem, sauf si c’est un roi du Royaume d’Israël qui serait de la lignée de David. N’est oint par l’huile d’onction que celui qui descend de David.
11. Lorsqu’on oint un descendant de David, on ne l’oint que près d’une source.
12. Un fils qui succède au trône de son père n’est pas investi par onction, sauf en cas de contestation ou de luttes de succession, pour mettre fin à la contestation. C’est pourquoi Salomon fut oint à cause d’Adonias, Joas à cause d’Athalie et Joachaz à cause de Joïakim son frère.
Lois des Rois : Chapitre Deux
1. On donne le plus grand respect au roi. On impose à tous sa crainte et sa frayeur, ainsi qu’il est dit : « Tu imposeras sur toi », c’est-à-dire que sa crainte doit être « sur » toi.
On ne monte pas son cheval, on ne s’assied pas sur son trône, on ne se sert pas de son sceptre, ni de sa couronne, ni d’aucun de ses objets personnels ou d’apparat.
Et lorsqu’il meurt, ses objets personnels doivent tous être brûlés. De même, seul un autre roi peut utiliser ses serviteurs, ses servantes, ses valets. C’est pourquoi Avichag était permise à Salomon et interdite à Adonias.
2. La femme d’un roi est interdite à quiconque pour toujours. Le roi lui-même ne peut prendre une femme répudiée ou veuve d’un autre roi.
3. Il est interdit de voir le roi lorsqu’il est nu ou lorsqu’il se coupe les cheveux, lorsqu’il est au bain ou lorsqu’il s’essuie.
Un roi ne libère pas la veuve de son frère au titre du Lévirat, car il est dit : « Elle crachera vers lui », et ceci serait un affront. Même s’il le veut, on ne le laisse pas faire, car même si un roi renonce à l’honneur qui est lui est dû, son honneur lui est dû.
Puisque le roi ne libère pas la sœur de son frère, il ne peut non plus l’épouser par Lévirat. De même à son décès, sa veuve qui ne peut être épousée par Lévirat ne peut non plus être libérée et reste à jamais en veuvage.
4. Si le roi perd un proche, il ne dépasse pas la porte du palais pour lui rendre les honneurs, et lors du repas de consolation, tout le peuple est assis par terre, et lui est assis sur le marchepied de son trône.
Si le roi rentre dans la Cour du Temple, et qu’il est de la lignée de David, il s’y assied, car seuls les rois de la lignée de David peuvent s’asseoir dans la Cour du Temple, ainsi qu’il est dit : « Le roi David vint et s’assit devant D.ieu. »
5. Le roi se fait couper les cheveux tous les jours, s’arrange et se pare de vêtements agréables et somptueux, ainsi qu’il est dit : « Tes yeux verront le roi dans sa splendeur. » Il siège sur le trône royal dans son palais et porte une couronne sur sa tête.
Tous doivent se rendre chez le roi lorsque le roi le veut. On reste debout devant le roi et on se prosterne à son arrivée. Même un prophète qui reste debout devant le roi, doit se prosterner à sa vue, ainsi qu’il est dit : « Nathan le prophète vint devant le roi, et se prosterna devant le roi. »
Mais le Grand Prêtre ne se présente devant le roi que si lui-même le désire, et il ne reste pas debout devant le roi : le roi reste debout devant le Grand Prêtre ainsi qu’il est dit : « Et il se tiendra debout devant Éléazar le Pontife. »
Malgré cela, le Grand Prêtre doit honorer le roi, le faire asseoir, se lever à son arrivée lorsqu’il se rend chez lui, et le roi ne restera debout devant lui que lorsqu’il interrogera le Jugement des Ourim.
De même, le roi doit honorer les Sages de la Loi, et se lever à l’arrivée du Sanhédrin et des Sages d’Israël, puis les faire asseoir à ses côtés. C’est ainsi que faisait Josaphat, roi de Juda : même devant un disciple des Sages il se levait de son trône, l’embrassait et l’appelait « mon maître, mon enseignant ».
De quel cas s’agit-il ? C’est lorsque le roi est seul chez lui avec ses serviteurs qu’il agit ainsi en privé. Par contre en public devant ses sujets, il ne le fera pas : il ne se lèvera devant personne, il ne lui parlera pas d’un ton doux, ne désignera son interlocuteur que par son nom, ceci afin d’inspirer du respect à tous.
6. De même que la Loi accorde un grand honneur au roi et contraint tous à l’honorer, de même le roi a pour devoir d’être humble et petit dans son cœur, ainsi qu’il est dit : « Et mon cœur est vide en moi. »
Il ne devra pas s’élever dans son cœur au-dessus du peuple exagérément, ainsi qu’il est dit : « Afin que son cœur ne s’élève pas au-dessus de ses frères. »
Il sera bon et miséricordieux avec les petits et les grands, s’occupera de leur condition matérielle et de leur bien-être, veillera au respect du plus petit d’entre eux.
Lorsqu’il s’adresse à la foule dans son ensemble, il leur parlera avec douceur, ainsi qu’il est dit : « Écoutez-moi mes frères, mon peuple », et aussi « si tu te mets aujourd’hui au service de ce peuple… »
Il devra toujours se comporter avec une extrême humilité. Il n’y a pas eu plus grand que Moïse notre Maître, qui a dit : « Que sommes-nous pour que vos plaintes s’adressent à nous ? »
Il supportera leur poids, leur fardeau, leurs plaintes et leurs humeurs, comme un nourricier supporte le nourrisson. La Torah l’a appelé « le berger », c’est-à-dire « pour faire paître Jacob, son peuple. » Le rôle d’un berger nous est expliqué par les Prophètes : « Tel un berger paissant son troupeau qui recueille les agneaux dans ses bras et porte contre lui... »
Lois des Rois : Chapitre Trois
1. Lorsque le roi commence son règne, il écrit pour lui-même un Livre de la Loi (Séfer Torah), en complément du Séfer Torah hérité de ses ancêtres et il le fait vérifier par le tribunal de soixante-et-onze Sages, à partir du Séfer Torah déposé dans la Cour du Temple.
Si ses ancêtres ne lui ont pas légué un Séfer Torah ou qu’il se soit perdu, il écrira deux Livres de la Loi : l’un restera déposé parmi ses biens personnels, car il a l’obligation d’en posséder un comme tout un chacun parmi les juifs, et l’autre l’accompagnera dans tous ses déplacements, excepté lorsqu’il est aux latrines ou au bain, ou en tout autre endroit impropre à l’étude.
S’il part en guerre, le Séfer Torah est emporté avec lui. Lorsqu’il entre quelque part, le Séfer Torah est rapporté avec lui. Lorsqu’il siège au tribunal il est avec lui, et lorsqu’il est attablé il est avec lui, ainsi qu’il est dit : « Il sera avec lui et il y lira tous les jours de sa vie. »
2. « Il n’aura pas de nombreuses femmes ». La tradition orale enseigne qu’il peut avoir jusqu’à dix-huit femmes : épouses ou concubines, en tout dix-huit. S’il en a ajouté une et a eu commerce avec elle, il est passible de flagellation. Il peut par contre en renvoyer une et prendre une autre à la place..
3. « Il n’aura pas de chevaux en excès », si ce n’est ce qu’il faut pour sa cavalerie. Même un cheval non sellé pour laisser courir devant lui, comme font les autres Rois, cela lui est interdit. S’il en a rajouté, il est passible de flagellation.
4. « Il n’accumulera pas pour lui argent et or », pour déposer parmi ses trésors et s’en enorgueillir ou s’en parer, mais il s’en servira pour entretenir ses armées, ses esclaves et ses domestiques.
Quant à l’argent et l’or qu’il amassera dans les réserves du Temple, pour qu’ils y soient mis à la disposition de la nation et des guerres qu’elle mène, c’est une Mitsva de l’augmenter et la seule interdiction est de thésauriser pour lui-même dans ses trésors, comme il est dit : « Il n’accumulera pas pour lui.
Et s’il a constitué des trésors personnels, il est passible de flagellation.
5. Le roi n’a pas le droit de s’adonner à la boisson, ainsi qu’il est dit : « Rois, ne buvez pas du vin. » Il devra s’approfondir dans la loi et œuvrer pour les besoins du peuple d’Israël jour et nuit, ainsi qu’il est dit : « Il restera avec lui et il le lira tous les jours de sa vie. »
6. De la même façon, le roi ne s’adonnera pas à la luxure. Même s’il n’a qu’une seule femme, il ne passera pas son temps à ses côtés, comme d’autres sots, ainsi qu’il est dit : « Ne donne pas ta force aux femmes. »
La loi veille à ce que le cœur du roi n’en soit pas détourné, ainsi qu’il est dit : « Et son cœur ne sera pas détourné », car le roi donne l’exemple à toute l’assemblée d’Israël et c’est pourquoi le texte l’associe plus qu’un autre à l’observance de la Loi, comme il est dit : « Tous les jours de sa vie. »
7. Nous avons déjà expliqué que tous les rois de la Maison de David peuvent être jugés et que l’on peut témoigner à leur propos, alors que les Sages ont décrété que les rois du Royaume d’Israël ne peuvent ni juger, ni être jugés, ni témoigner ni être l’objet d’un témoignage, car ils méprisent les Sages et il en résulte profanation et déconsidération de la Loi.
8. Si quelqu’un se rebelle contre le roi, le roi peut le mettre à mort. Même s’il a ordonné à une personne de se rendre quelque part et qu’il ne s’y soit pas rendu, ou de ne pas sortir de sa maison et qu’il en soit sorti, il est passible de mort. Et si le roi veut le tuer, le rebelle sera exécuté ainsi qu’il est dit : « Tout homme qui contredira tes ordres. »
De la même façon, si quelqu’un fait honte au roi ou l’humilie, le roi a le pouvoir de le tuer, comme ce fut le cas de Séméi, fils de Ghéra.
Le roi ne peut faire exécuter que par l’épée.
Le roi peut faire arrêter ou faire flageller toute personne qui attente à sa dignité. Il ne peut pas cependant confisquer les biens; toute confiscation de biens serait un vol.
9. Celui qui s’abstiendrait d’exécuter un ordre du roi parce qu’il est occupé à l’accomplissement d’un commandement de la Loi – même un commandement peu important – n’est pas punissable : entre les ordres du Maître et les ordres de son serviteur, les ordres du maître priment.
Nul besoin de dire que si le roi ordonne de ne pas accomplir un commandement de la Loi, on ne tiendra pas compte de son ordre.
10. Si un homme a tué sans qu’on ait contre lui un témoignage satisfaisant ou qu’il n’ait pas été mis en garde par des témoins, ou qu’il n’y ait qu’un seul témoin, ou encore qu’il ait tué involontairement quelqu’un qui est son ennemi, le roi a le pouvoir de le condamner à mort, comme de prendre toutes les mesures d’exception exigées par les circonstances.
Ainsi le roi peut faire exécuter plusieurs condamnés en une seule journée, peut les faire pendre et les laisser pendus plusieurs jours, ceci pour répandre sa crainte et briser les méchants de ce monde